Chapitre 8: La chute de l’homme – Confession de foi des Églises Réformées de Suisse
La chute de l’homme.
Dieu créa au commencement l’homme à son image, dans la justice ou dans l’intégrité (Gen. I. 26 -29; Eccl. VII. 29.). Mais par un abus de sa liberté il s’est laissé séduire par le serpent et il a abandonné cette droiture originelle (Gen. III. et 2 Cor. XI. 3.). Ainsi a-t-il été rendu sujet au péché, à la mort et à toutes sortes de misères; et tel que le premier homme est devenu par sa chute, tels sont aussi ceux qui sont issus de lui (Rom. V. 12-19.).
Ce que c’est que le péché.
Quand nous disons, que l’homme est sujet au péché, nous entendons par là cette corruption ou cette dépravation de l’homme, qui naît avec lui et qui est transmise depuis le premier homme, de Père en Fils:
– passions vicieuses,
– éloignement pour le bien,
– inclination au mal,
– dispositions à la malice, à la défiance et au mépris de Dieu,
Voilà les effets malheureux de cette corruption, qui nous rend tels, que de nous-mêmes nous ne pouvons nous porter au bien, ni le faire. À mesure que l’homme avance en âge, il porte souvent des fruits corrompus, dignes d’un mauvais arbre: pensées, paroles, actions contraires à la loi de Dieu, ce sont là ces fruits funestes (Gen. VI. 5-12; Job. XIV. 4; XV. 14-16; XXV. 4; Psaume XIV. 1-3; LIII. 1-3; LI. 5; LV. 19; Prov. XX. 9; Rom. III. 10-12; VIII. 7; Col. I. 21; Tite III. 3; Jean. VIII. 34-43)
Par là exposés à la colère de Dieu, nous n’avons à attendre de sa part qu’une juste punition; il nous aurait même en conséquence entièrement rejetés, si Jésus-Christ notre libérateur ne nous avait ramené à lui. (Rom. V. 3-12; Col. I. 12-13; 1 Pierre I. 13):
Ce que c’est que la mort.
Par la mort, à laquelle le péché nous a rendu sujets, nous entendons non seulement la mort corporelle, que nous devons tous subir une fois à cause du péché, mais aussi la séparation de Dieu et la punition éternelle, que nos péchés méritent. Vous étiez morts, dit l’Apôtre Saint Paul, dans vos fautes et dans vos péchés.
Nous étions de notre nature enfants de colère, aussi bien que les autres: Mais Dieu, qui est riche en miséricorde, poussé par cet extrême amour, dont il nous a aimé, lors même que nous étions morts dans nos fautes et dans nos péchés, Dieu, dis-je, nous a vivifié avec Jésus-Christ; car c’est par grâce que vous êtes sauvés (Eph. II. 1-5.).
Le péché est entré dans le monde par un seul homme, dit ailleurs le même Apôtre, et par le péché la mort, ainsi la mort a passé sur tous les hommes par un seul, dans lequel ils ont tous péché (Rom. V. 12 et suiv.).
Le péché originel.
Nous reconnaissons par conséquent, qu’il y a un péché originel dans tous les hommes. Nous avouons de même, que toutes les transgressions de la loi divine qui découlent de cette corruption originelle, sont de vrais péchés, quelque nom qu’on emploie pour les désigner:
– Soit qu’on les nomme péchés mortels, ou péchés véniels,
– Soit aussi celui qui est appelé péché contre le Saint-Esprit, lequel ne sera jamais pardonné (Matth. XII. 31-32; Marc III. 28-29.).
Tous les péchés ne sont pas égaux.
Nous confessons aussi, que tous les péchés ne sont pas également «criminels», quoiqu’ils découlent tous d’une même source corrompue: Les uns sont plus énormes que les autres: Aussi le Seigneur nous enseigne-t-il, qu’il y aura des degrés de peines proportionnés, quand il dit que Sodome sera traitée moins rigoureusement au jour du jugement que la ville, qui aura rejeté l’évangile (Matth. X. 15.).
Erreurs contraires rejetées.
Nous condamnons ainsi les erreurs de tous ceux qui enseignent quelque chose de contraire à ces dogmes, principalement Pélage et tous les Pélagiens.
Nous condamnons ainsi les erreurs que Jovinien, qui, comme les Stoïciens, faisait tous les péchés égaux. Nous approuvons à cet égard les sentiments de Saint Augustin, comme conformes à l’Écriture sainte, sur l’autorité de laquelle il les appuie.
Dieu n’est point l’auteur du péché.
Nous rejetons les erreurs de Florin et de Blastus contre lesquels saint Irénée a écrit, et celle de tous ceux, qui attribuent à Dieu le péché, comme s’il en était la cause ou l’auteur.
Il est expressément dit dans l’écriture, tu n’es point un Dieu qui prenne plaisir à la méchanceté, tu hais tous ceux qui commettent l’iniquité, et tu feras périr tous ceux qui profèrent le mensonge (Psaume V. 5-7.). Quand le Diable profère le mensonge, il parle de ce qui lui est propre, car il est menteur et le père de mensonge (Jean VIII. 44.).
Quand on lit dans les livres sacrés, que Dieu endurcit, qu’il aveugle, qu’il livre l’homme à un sens reprouvé, qu’il tente, toutes ces expressions figurées doivent être entendues d’une manière conforme à la sainteté inaltérable de l’Être suprême. C’est quelquefois un Dieu, vengeur quand sa miséricorde est méprisée, qui retire ses grâces; Souvent c’est un juge qui exerce une juste punition, mais c’est toujours l’homme qui fait le mal.
Tout ce que l’on peut dire à cet égard d’un Dieu souverainement saint c’est:
1. Qu’il permet le mal, qu’il le laisse faire par un juste jugement, qu’il n’emploie pas sa puissance pour l’empêcher.
2. Qu’il dirige le mal que l’homme commet envers autrui vers le bien, ainsi qu’on peut le remarquer dans l’histoire de Joseph.
3. Qu’il préside tellement sur les actions mêmes des méchants, qu’il les réprime sans leur permettre de donner effort à toute leur malice, en faisant tout le mal qu’ils pourraient faire.
C’est par une voie merveilleuse et ineffable, dit saint Augustin sur ce sujet, qu’il arrive, que ce qui se fait contre la volonté divine, ne se fait pas cependant sans cette volonté, parce que l’action ne se ferait point si Dieu ne permettait pas qu’elle se fit. Ce n’est pas par contrainte qu’il la laisse faire, mais parce qu’il le veut librement, et lui qui est bon, ne laisserait pas faire le mal, s’il ne pouvait pas par sa puissance tirer le bien du mal.
Il faut s’abstenir des questions curieuses.
Loin d’ici ces questions inutiles, ou dangereuses, qu’une curiosité téméraire a enfantées. Dieu a-t-il voulu qu’Adam tomba? L’a-t-il poussé au péché? Pourquoi n’a-t-il pas empêché sa chute?
Lors même que l’imprudence et l’importunité des hérétiques nous oblige de nous expliquer sur le concours de Dieu dans le péché, comme de pieux Docteurs ont été souvent forcés de le faire, évitons tout ce qui est plus curieux qu’utile.
Contentons-nous de savoir que Dieu avait défendu à l’homme de manger du fruit de l’arbre de science, que l’homme ayant volontairement transgressé cette défense, que Dieu l’a puni avec justice. En général ce n’est pas à la volonté et à la puissance divine que nous devons attribuer la malice des actions, mais à celle du diable et à la notre, qui ne se soumettent point à la volonté de Dieu.