Cherchez à être plus satisfait en Dieu : Invitation à l’hédonisme chrétien (John Piper)

Au cours du mois d’octobre, nous prévoyons de publier douze articles avec un accent explicite sur ce que nous appelons l’hédonisme chrétien. C’est la première fois.

Pour nous, à « Desiring God », c’est comme dire : « Nous allons célébrer la raison de notre existence. » Le nom de ce ministère est « Désirer ou prendre plaisir en Dieu » à cause du livre de 1987 portant ce titre. Le sous-titre du livre est crucial : Méditations d’un chrétien hédoniste. C’est ce que nous sommes : des chrétiens hédonistes. Ce site web existe comme un débordement de méditations bibliques par des chrétiens hédonistes.

L’hédonisme chrétien

Mon but ici est de clarifier ce que nous entendons par cette phrase « Hédonisme chrétien ».

Je sais que l’expression « hédonisme chrétien » n’est pas dans la Bible. Tout comme les mots trinité, discipulat, évangélisation, prédication textuelle, relation d’aide, éthique, politique, charismatique, et bien d’autres ne sont pas dans la Bible. La Bible n’inclut pas un soixante-septième livre appelé « Synthèse du Tout ». Elle ne dispose pas non plus d’un glossaire des concepts.

Il a plu à Dieu d’inspirer un volume avec des douzaines de beaux fils de vérité tissés à travers les 66 livres. Tous les fils ne portent pas nécessairement de nom. Il nous a laissé beaucoup de travail glorieux à faire.

« Les œuvres de l’Éternel sont grandes, recherchées par tous ceux qui les aiment » (Psaume 111.2).

Alors que nous étudions et suivons ces beaux fils et observons le Maître Tisserand, nous voyons des réalités précieuses et nous leur donnons des noms pour pouvoir parler d’elles alors qu’elles se rassemblent selon des schémas observables. L’un de ces schémas est l’hédonisme chrétien.

Gloire sérieuse, joie sérieuse

Notre phrase préférée pour expliquer l’essence de l’hédonisme chrétien est la suivante : Dieu est plus glorifié en nous quand nous sommes plus satisfaits en lui. Nous croyons que cette vérité a ses racines dans les relations trinitaires éternelles de Dieu. Nous croyons qu’elle est au cœur de la raison pour laquelle Dieu a créé le monde. Et nous croyons que ses implications pour la vie, maintenant et pour toujours, sont universelles. Cette vérité touche tous les aspects de la vie humaine : de la consommation de jus d’orange à la pizza (1 Corinthiens 10.31), de l’accueil des étrangers (Romains 15.7) au dernier souffle (Philippiens 1.20). Ce n’est pas marginal. Jamais de la vie. Pas pour rien au monde.

L’hédonisme chrétien est un élément central de l’œuvre de rédemption de Dieu et de notre vie chrétienne

Vous pouvez voir que nous sommes sérieux. Pour nous, l’hédonisme chrétien n’est pas un simple surnom ou slogan. C’est un élément central de l’œuvre de rédemption de Dieu et de notre vie chrétienne. C’est central et global parce que la gloire de Dieu est centrale et globale.

Ou, pour changer la métaphore spatiale, puisque la glorification de Dieu est la fin ultime (et pas seulement le centre) de la création, l’hédonisme chrétien est d’une importance capitale, car Dieu ne sera pas glorifié comme il le devrait, si son peuple ne se satisfait pas en lui comme il le devrait.

Un peuple de Dieu dont les cœurs ne sont pas suprêmement satisfaits de la grandeur, de la beauté et de la valeur de Dieu sera un peuple défectueux, et un déshonneur à Dieu. Par conséquent, le but final de l’univers – la glorification de Dieu et le perfectionnement de son peuple – dépend du triomphe de Dieu sur nos préférences pécheresses pour ce qui n’est pas Dieu.

C’est ce qui se passe par la croix, la résurrection, l’effusion du Saint-Esprit, le progrès de la sanctification, et le perfectionnement final de toutes choses par Christ. Dieu aura une Épouse rachetée par le sang, impeccable pour son Fils, et non une Épouse défectueuse. Et il ne sera pleinement glorifié, pas déshonoré. Par conséquent, l’essentiel pour la beauté de l’Épouse sera sa satisfaction dans le Fils de Dieu. Sans cela, elle lui ferait honte.

Westminster et Warfield

Une façon de vérifier si vous êtes un chrétien hédoniste est de vous demander ce que le mot et signifie dans la réponse à la première question du Catéchisme de Westminster.

Question 1 : Quel est le but principal de la vie de l’homme ? 

Réponse : Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu et de trouver en lui son bonheur éternel.  

Une telle question peut vous paraître étrange : Que signifie « et » ? Mais ce n’est peut-être pas si étrange quand vous vous arrêtez pour remarquer que ces deux buts (glorifier et trouver son bonheur) sont appelés un « but » dans la question : « Quel est le but principal de la vie de l’homme ? » Il ne dit pas : « Quels sont les buts principaux de la vie de l’homme ? » Ainsi, l’utilisation au singulier de « but » est comme un drapeau qui nous fait signe et qui dit : « Stop. Réfléchissez. Comment ces deux choses sont-elles liées de telle sorte qu’elles ne soient qu’une seule chose ? »

L’hédonisme chrétien n’est pas le premier à répondre que « et » signifie « en » ou « par ». « Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu en trouvant en lui son bonheur éternel. » En 1908, dans la Princeton Theological Review, Benjamin Warfield écrit que le Catéchisme de Westminster a peut-être pris la seconde moitié de sa première réponse (« et de trouver en lui son bonheur éternel ») du Catéchisme de William Ames qui avait, en fait, écrit « en trouvant en lui son bonheur éternel » (Warfield’s Works, vol. 6, Baker, 2003, 396).

Warfield lui-même interprète pratiquement la double réponse de la première question d’une manière hédoniste chrétienne :

Aucun homme n’est vraiment réformé [je dirais biblique] dans sa pensée à moins qu’il ne conçoive l’homme non seulement comme l’instrument de la gloire divine, mais aussi comme destiné à refléter la gloire de Dieu dans sa propre conscience, à exulter en Dieu : oui, s’il ne trouve pas lui-même son bonheur en Dieu comme Celui qui est tout glorieux. (397)

Pour paraphraser : Il est insuffisant de parler de l’homme comme d’un homme destiné à glorifier Dieu, sans aussi rendre explicite que la manière dont l’homme est destiné à glorifier Dieu est par l’état interne de sa conscience ; et cet état interne qui glorifie Dieu est son expérience consciente « d’exulter en Dieu ». Ce qui veut dire prendre plaisir en Dieu en tant que Celui qui est tout glorieux. Ce qui revient à dire que le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu en trouvant en lui son bonheur éternel. Ou : Dieu est glorifié dans l’homme par le fait que l’homme est satisfait en Dieu.

Warfield le dit encore plus clairement dans les dernières phrases de son article :

« Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu et de trouver en lui son bonheur éternel. » L’on ne peut trouver son bonheur en Dieu, certainement, sans le glorifier, car comment celui à qui la gloire appartient intrinsèquement peut-il être apprécié sans être glorifié ? Mais l’on ne peut pas non plus glorifier Dieu sans trouver en lui notre bonheur, car comment celui dont la gloire est ses perfections peut-il être glorifié s’il n’est pas aussi apprécié ?

En effet ! Prenez cette dernière question rhétorique : « Comment peut-il être glorifié s’il n’est pas aussi apprécié ? » Réponse : Il ne le peut pas, du moins pas comme il devrait l’être. Alors, transformez cette question rhétorique en une déclaration : Dieu ne peut être glorifié comme il doit l’être, à moins d’être apprécié comme il doit l’être.

John Brown et Thomas Vincent

John Brown de Haddington, un pasteur écossais mort en 1787, développa le Catéchisme de Westminster de cette façon :

Question : Pourquoi glorifier Dieu et trouver son bonheur en lui sont-ils unis comme un seul but principal ?  

Réponse : Parce que personne ne peut obtenir ou rechercher à juste titre l’un sans l’autre.

Question : Comment glorifions-nous Dieu de la façon la plus grande qui soit ?  

Réponse : En le recevant et en trouvant notre bonheur en lui de la façon la plus complète qui soit.

L’hédonisme chrétien paraphrase cette dernière question et la réponse qui va avec : Dieu est plus glorifié en nous quand nous trouvons notre plus grand bonheur en lui.

Thomas Vincent, un puritain, pasteur anglais mort en 1678, posa la même question :

Question : Pourquoi glorifier Dieu et trouver son bonheur en lui sont-ils unis comme le seul but principal de la vie de l’homme ?

Réponse : Parce que Dieu les a inséparablement unis, afin que les hommes ne puissent pas vraiment concevoir et chercher l’un sans l’autre. Ceux qui trouvent le plus leur bonheur en Dieu dans sa maison sur terre, le glorifient et trouvent leur bonheur en lui le plus. Et quand Dieu sera pleinement apprécié par les saints dans les cieux, il sera le plus grandement glorifié. (Les citations de Brown et Vincent ont été compilées par Virginia Huguenot à « http://virginiahuguenot.blogspot.com/2009/02/to-glorify-god-and-to-enjoy-him-forever.html »)

Ainsi, l’une des revendications les plus essentielles de l’hédonisme chrétien – à savoir « Dieu est plus glorifié en nous quand nous sommes plus satisfaits en lui » – n’est pas nouvelle. Elle est enracinée dans de multiples catéchismes historiques, en particulier la fameuse question de Westminster, « Quel est le but principal de la vie de l’homme ? » avec la réponse : « Le but principal de la vie de l’homme est de glorifier Dieu et de trouver en lui son bonheur éternel. »

L’hédonisme chrétien se joint à un long cortège de pasteurs et de théologiens qui ont reconnu que cette double réponse a une unité profonde en ce que la glorification de Dieu dans le cœur humain ne peut se produire pleinement, quand Dieu n’est pas pleinement apprécié comme le trésor suprême du cœur.

Est-ce biblique ?

Bien sûr, il importe peu que les catéchismes humains aient affirmé l’hédonisme chrétien. Ce qui compte en fin de compte, c’est de savoir si Dieu a établi le monde de cette façon, et s’il nous a révélé cette vérité dans sa parole infaillible, la Bible.

« Desiring God » travaille depuis 25 ans pour montrer dans les Écritures que la réponse à cette question est oui. Nous nous soucions mille fois plus de ce que Dieu pense que de ce que les autres disent. Nous vous encourageons à faire de même. Si vous ne pensez pas que l’hédonisme chrétien est enseigné dans la Bible, nous ne voulons pas que vous y croyiez parce que nous l’enseignons. Nous espérons que vous resterez avec nous pendant le mois d’octobre et que vous examinerez toutes choses, car nous approchons l’hédonisme chrétien sous différents angles.

Je terminerai cet article par un texte biblique qui enseigne que Dieu est plus glorifié en nous quand nous sommes plus satisfaits en lui. Je mentionnerai ensuite l’implication pratique la plus générale et la plus globale possible.

La mort comme un gain

Dans Philippiens 1.20 Paul dit que la passion de sa vie est de glorifier Christ. Il le dit ainsi :

« Selon ma ferme attente et mon espérance … Christ sera glorifié (magnifié, honoré) dans mon corps avec une pleine assurance, soit par ma vie, soit par ma mort. »

Puis, dans les phrases qui suivent, il explique comment il glorifiera le Christ par sa vie et par sa mort. Dans les deux explications, il montre qu’il pense comme un chrétien hédoniste.

En ce qui concerne la mort, il dit que la raison pour laquelle Christ sera glorifié par sa mort, c’est parce qu’il vivra la mort comme un gain (verset 21). Et la raison pour laquelle il vivra la mort comme un gain, c’est parce que cela signifiera « être avec Christ, ce qui de beaucoup est le meilleur » (verset 23). Ce que je fais, en tant que lecteur sérieux de la Bible, c’est de m’arrêter à ce point et de me demander : « Pourquoi l’expérience de Christ en tant que gain à l’heure de la mort glorifie-t-elle Christ ? » Que répondriez-vous ? 

Il explique « gain » par les mots « ce qui de beaucoup est le meilleur ». C’est-à-dire, mourir et être avec Christ est beaucoup mieux que tout ce que ce monde a à offrir (puisqu’il est sur le point de mourir). Il le dira plus loin dans cette lettre : « Et je considère même tout comme une perte à cause du bien suprême qu’est la connaissance de Jésus-Christ mon Seigneur. » (Philippiens 3.8)

Paul dit donc que son estimation et son expérience de la valeur de Christ sont si grandes qu’il tire plus de joie du fait d’être avec Christ que de toute autre chose dans le monde. C’est pour cela que Christ est glorifié dans l’expérience de la mort de Paul. Vous manifestez la grandeur et la gloire de quelqu’un quand vous êtes si satisfait en lui et en sa présence que tout perdre en ce monde, pour être avec lui, est ressenti comme un gain pour vous.

Ainsi, ma paraphrase de la manière de penser de Paul ici est que Christ est plus glorifié en Paul quand Paul est tellement satisfait en Christ qu’il trouve son bonheur en Christ plus que dans tout ce que le monde a à offrir, même si cela lui coûte sa vie. C’est l’hédonisme chrétien. Et c’est exactement ce que Paul a enseigné et vécu.

Vivre avec joie

Et si Paul vit ? Il répond aussi à cette question en tant qu’hédoniste chrétien.

Souvenez-vous qu’il a dit : « Selon ma ferme attente et mon espérance … Christ sera glorifié (magnifié, honoré) dans mon corps avec une pleine assurance, soit par ma vie, soit par ma mort. » En fait, même s’il préférerait mourir, si son gain était la seule chose à considérer, il sait qu’il va vivre. Dieu a du travail pour lui. Alors comment Paul nous montre-t-il que le reste de sa vie glorifiera Christ ?

Mais à cause de vous il est plus nécessaire que je demeure dans la chair. Et je suis persuadé, je sais que je demeurerai et que je resterai avec vous tous, pour votre avancement et pour votre joie dans la foi, afin que, par mon retour auprès de vous, vous ayez en moi un abondant sujet de vous glorifier en Jésus-Christ. (Philippiens 1.24-26)

Suivez son raisonnement : (1) Je demeurerai en vie et viendrai à vous. (2) Le but et l’effet de ma venue vers vous seront votre joie dans la foi. (3) L’effet de cette joie sera que vous vous « glorifierez en Jésus-Christ ». Voyez-vous le but vers lequel sa vie et son ministère se dirigent ? Et comment l’objectif est-il atteint ?

Le but est « la gloire », ou littéralement le fait de « se vanter » (grec kauchēma), en Christ. Le mot pour « se vanter » pourrait se traduire par « exulter » ou « louer » ou « manifester la grandeur ». Tel est le but : la glorification de Christ (comme au verset 20). Et comment Paul entend-il qu’ils atteignent ce but ? En les aidant à faire l’expérience de la « joie » dans ou de la foi. Il aurait pu juste dire foi. Mais il a dit « joie dans la foi ». Pourquoi ? Parce que leur vantardise en, leur exultation, leur glorification de Christ, se produisent dans et par leur joie en Christ. C’est de l’hédonisme chrétien. Le but principal des Philippiens est de glorifier Dieu (en son Fils) en trouvant leur joie en lui pour toujours. Christ est plus glorifié dans les Philippiens quand ils sont plus satisfaits en lui.

Nous sommes des chrétiens hédonistes parce que c’est ce que la Bible enseigne.

Notre plus grand devoir

J’ai dit que je conclurais en vous donnant l’implication la plus globale et la plus pratique possible de l’hédonisme chrétien. C’est celle-là : Puisque Dieu est plus glorifié en vous lorsque vous êtes le plus satisfait en lui, c’est votre devoir, donné par Dieu et prescrit par la Bible, à chaque instant de votre vie, de chercher à être plus satisfait en Dieu comme votre trésor suprême que vous ne l’êtes dans toute autre chose dans l’univers.

La Bible soutient cette implication pratique et globale de l’hédonisme chrétien. Je vais vous laisser avec une seule parole de Jésus à laquelle vous devriez penser.

Celui qui aime son père ou sa mère plus que moi n’est pas digne de moi, et celui qui aime son fils ou sa fille plus que moi n’est pas digne de moi. (Matthieu 10.37)

Demandez-vous : quel genre d’amour les parents ont-ils pour leurs enfants ? Et de bons enfants pour leurs parents ? N’est-ce pas un amour affectueux ? Un amour précieux ? Un amour qui étreint, qui a soif ? Jésus dit qu’il doit être plus aimé, plus chéri, plus précieux que nos bonheurs terrestres les plus chers.

Si c’est le cas, il est de notre devoir de chercher à devenir ce genre de personne. En effet, c’est notre plus grand devoir (Matthieu 22.36-37).


Traduit de l’anglais par Timothée Davi avec permission.