Dénicher les trésors du Heidelberg
La chose qui est plus difficile à faire que de trouver la vérité, c’est de ne pas la perdre. Ce qui, au début, est nouveau et précieux devient banal et vieux. Ce qui est d’abord une découverte palpitante devient un exercice machinal. Ce qui pousse une génération au sacrifice et au zèle devient pour la génération suivante une cause de rébellion et d’apathie. Comment se fait-il que les unions et les mouvements d’Églises s’écartent presque toujours de leur ancrage théologique ? Comment se fait-il que des personnes qui grandissent dans l’Église aient souvent plus de mal à exprimer clairement leur foi que le nouveau chrétien converti à 45 ans ? Comment se fait-il que ceux qui grandissent avec les crédos et les confessions soient généralement ceux qui les détestent le plus ?
Peut-être est-ce parce que la vérité est comme le bout du nez – elle est plus difficile à voir quand elle est juste devant nous.
Sans conteste, l’Église en Occident a de nombreuses choses nouvelles à apprendre. Mais pour la plupart, tout ce que l’on doit apprendre est ce que l’on a déjà oublié. La tâche théologique principale à laquelle est confrontée l’Église en Occident n’est pas de réinventer ni d’être pertinente, mais de se rappeler. On doit se rappeler l’histoire ancienne. On doit se rappeler la foi autrefois donnée aux saints. On doit se rappeler les vérités qui ont fait naître la Réforme, le renouveau et la régénération.
Puisqu’on veut se rappeler toutes ces choses, on doit aussi se rappeler nos crédos, confessions et catéchismes, si tant est qu’on les ait déjà entendus.
Votre réaction à cette dernière phrase se range probablement dans l’une des trois catégories suivantes. Certains, surtout les jeunes, croyez-le ou non, penseront : « La foi ancienne, c’est cool. Je suis à fond pour les crédos et les confessions. » D’autres penseront : « Attends un peu, les catholiques n’ont-ils pas des catéchismes ? Pourquoi avoir besoin d’un document humain pour nous dire quoi penser ? Je n’ai d’autre crédo que la Bible, merci bien. » Et d’autres encore, les plus rêches, ne veulent rien d’autre que d’en finir avec les catéchismes. « Je connais, j’ai déjà donné, c’est en-nuyeux. J’ai vu des gens qui connaissaient leurs crédos sur le bout des doigts et qui ne les rendaient pas missionnels, passionnés, ni même très sympas. »
À ces trois groupes, je réponds simplement : « Venez voir. » Venez voir ce qu’est la foi ancienne. Venez voir si la brise fraîche des siècles passés peut réveiller votre foi endormie. Venez voir si votre Église est piteuse à cause de ses confessions ou catéchismes ou si votre Église piteuse a rendu les confessions et catéchismes piteux toute seule. Que vous ayez grandi avec les confessions et les catéchismes ou qu’ils vous semblent débarqués d’une autre planète spirituelle, je vous dis : « Venez voir. » Venez voir le Christ dans les lieux les plus improbables – dans une mangeoire, à Nazareth, ou même dans le Heidelberg.
Mieux que vous ne le pensez (Pas aussi mauvais que dans vos souvenirs)
J’aime le Catéchisme de Heidelberg, pas comme j’aime ma femme ou comme j’aime la Bible, mais plus profondément que j’aime les Chicago Bears et plus éternellement que j’aime une bonne pizza à pâte épaisse. « Aimer » et « catéchisme » sont deux mots que l’on n’a pas l’habitude d’entendre ensemble, sauf dans des phrases comme : « J’aime que mon Église ne fasse plus apprendre le Catéchisme aux enfants[1]. » Reste que j’avoue ouvertement aimer le Catéchisme de Heidelberg. J’aime le Catéchisme parce qu’il est vieux, biblique et vrai. Il n’est pas parfait. Il n’est pas infaillible. Il en dit trop peu sur certains sujets et trop sur d’autres. Mais il est du début à la fin fiable et magnifique, simple et profond. Par-dessus tout, j’aime le Catéchisme de Heidelberg parce que j’aime l’Évangile qu’il expose et le salut qu’il proclame.
J’ai grandi avec le Heidelberg. Je ne me souviens pas avoir été obligé de l’apprendre bêtement par cœur comme les tables de multiplication. Il n’était pas le centre de ma vie, mais il était là. Je serai éternellement reconnaissant au pasteur de mon enfance de m’avoir fait lire le Catéchisme de Heidelberg et d’en avoir discuté avec moi dans son bureau avant ma profession de foi à la fin du primaire. J’étais stressé de le rencontrer, et encore plus stressé de rencontrer tous les anciens. Mais les deux rencontres furent agréables. Du reste, j’ai été obligé de lire les 129 questions et réponses à neuf ans. Ce fut une bénédiction que je ne réalisais pas à l’époque. Depuis lors, je possède un exemplaire du Catéchisme et, avec le temps, j’ai appris à le comprendre et à l’affectionner de plus en plus.
Tout le monde n’est pas aussi mordu du Catéchisme que moi. Pour certains, les catéchismes sont trop linéaires, trop systématiques, trop assertifs. Pour d’autres, les catéchismes ont mauvaise presse parce que, justement ou injustement, les seules histoires que l’on entend sur l’enseignement catéchétique sont des histoires au sujet du vieux pasteur Vander-truc qui menaçait de nous flanquer une raclée si l’on n’était pas capables de se souvenir de ce que Dieu demandait de nous dans le huitième commandement. Le plus souvent, les catéchismes ne sont tout simplement pas lus, parce qu’on les accuse de parler de théologie, et la théologie, dit-on, est ennuyeuse… et des mots comme « Heidelberg » et « Westminster » sont encore plus ennuyeux. (D’ailleurs, je n’ai jamais été fervent des programmes d’école du dimanche raffinés qui tentent de faire croire qu’un catéchisme est autre chose que des questions et des réponses sur la Bible. Vous pouvez l’appeler « Promenons-nous avec Dieu, une histoire palatine » ou « Les glorieuses vérités du Heidelberg », mais c’est toujours un catéchisme, et nos enfants le savent.)
Toutefois, en dépit même de cette mauvaise presse, je pense que le Catéchisme peut faire son retour. Nous devons tous – enfants et adultes – mieux connaître la Bible que le Catéchisme de Heidelberg. Cela ne fait aucun doute. Mais nous tous – enfants et adultes – pouvons voir notre foi renforcée, notre connaissance élargie et notre amour pour Jésus approfondi en nous attachant à lire la riche vérité comme celle que l’on trouve dans le Catéchisme de Heidelberg. Je n’oublierai jamais la fois où je me trouvais en cours d’éducation chrétienne dans une faculté évangélique non hollandaise et rattachée à aucune union d’Églises. L’un de nos travaux portait sur le Catéchisme de Heidelberg – ce petit livre qui, dans mon enfance, faisait rouler les yeux des étudiants. Mais mes camarades de faculté se sont émerveillés de cet ouvrage. « Où est-ce que c’était tout ce temps ? » « Ce sera parfait pour l’école du dimanche ! » « Je vais l’utiliser pour les cours de nouveaux membres ! » La plupart des jeunes issus des Églises réformées néerlandaises que je connaissais auraient aimé que le Catéchisme de Heidelberg eût disparu. Mais à la faculté, mes camarades de classe voyaient quelque chose que nombre de mes pairs avaient manqué. Le Catéchisme de Heidelberg est vraiment, vraiment bon.
Cet article est tiré du livre : La Bonne Nouvelle presque oubliée de Kevin DeYoung
[1] N. D. T. : Dans cet ouvrage, le mot Catéchisme écrit avec une majuscule faire référence au Catéchisme de Heidelberg.