La conversation de Jésus avec Nicodème (R.C. Sproul)

Le récit du premier enseignement de Jésus sur le sujet de la nouvelle naissance se trouve dans Jean 3. Je voudrais prendre le temps de parcourir ce passage afin de vous permettre d’acquérir une base solide pour l’étude qui va suivre sur la nouvelle naissance.

Jean écrit : « Mais il y eut un homme d’entre les pharisiens, nommé Nicodème, un chef des Juifs, qui vint, lui, auprès de Jésus, de nuit » (Jn 3.1,2a). Jean nous présente immédiatement Nicodème et nous dit deux choses sur ses antécédents : premièrement qu’il était pharisien, et deuxièmement que c’était un dirigeant des Juifs. Les pharisiens étaient une secte religieuse conservatrice connue pour sa stricte obéissance à la loi de Dieu. Les «chefs des Juifs» étaient les autorités religieuses en Israël.

La nation juive était à l’époque placée sous l’autorité impériale de Rome et était gouvernée par un gouverneur romain. Cependant, l’autorité religieuse en Israël était dévolue à un groupe de soixante-dix hommes qui formaient un corps connu sous le nom de sanhédrin. Ces hommes étaient en quelque sorte l’équivalent des sénateurs aux États-Unis ou des cardinaux dans l’Église catholique romaine. Lorsque Jean identifie Nicodème comme un dirigeant des Juifs, il indique clairement qu’il était membre du sanhédrin. Tous les pharisiens n’étaient pas membres du sanhédrin, mais certains membres du sanhédrin étaient pharisiens. Donc Nicodème était un homme érudit et puissant, très compétent en matière de théologie.

Nicodème est venu voir Jésus de nuit. Pourquoi a-t-il fait cela? Je pense que Nicodème était légèrement nerveux. Il ne voulait pas être vu en public avec Jésus qui était certes populaire auprès du peuple, mais qui était un objet de suspicion pour les autorités religieuses. Cela explique sa discrétion lors de sa première rencontre avec Jésus.

Cependant, il est venu avec de belles paroles : « … qui vint, lui, auprès de Jésus, de nuit, et lui dit : Rabbi, nous savons que tu es un docteur venu de Dieu; car personne ne peut faire ces miracles que tu fais, si Dieu n’est avec lui» (Jn 3.2). Il est intéressant de voir que ce chef des Juifs a reconnu en Jésus un rabbin et s’est adressé à lui avec le respect qui était réservé à un théologien. Nicodème admettait que Jésus était un authentique enseignant de la Parole de Dieu. Il déclare ensuite que certains des chefs juifs avaient reconnu que Jésus était un enseignant envoyé par Dieu, grâce aux miracles qu’il faisait. Cette attitude était très différente de celle de nombreux membres du parti des pharisiens. Ces derniers n’avaient pas une vision aussi positive de Jésus. En réalité, ils attribuaient même ses activités remarquables à la puissance de Satan (Mt 12.22-32). Pourtant, ce pharisien a refusé de porter une accusation aussi scandaleuse ; au contraire, il est venu faire l’éloge de Jésus. Il lui a dit : « Jésus, je reconnais que tu es un docteur envoyé par Dieu, car aucun homme ne pourrait exercer le genre de puissance dont tu as fait preuve à moins que Dieu n’authentifie son message. »

Une condition nécessaire

Notez de quelle manière Jésus a réagi. Il n’a pas dit: «Je suis touché par cet honneur que tu me fais, chef des Juifs, membre du sanhédrin; c’est extraordinaire d’être ainsi salué par une personne qui a une position si élevée.» On a plutôt l’impression que Jésus attendait patiemment que Nicodème cesse de le complimenter. Une fois que Nicodème s’est tu, Jésus a répondu comme il l’a toujours fait dans son enseignement – en coupant court au superflu pour aller directement au cœur du problème. Il a répondu à Nicodème : « En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu » (Jn 3.3). Autrement dit : « Nicodème, cesse de parler de questions secondaires et d’honneurs personnels. Ce que je veux te faire comprendre, c’est ceci : il y a une chose que chacun doit absolument faire pour voir le royaume de Dieu. »

En théologie et en philosophie, nous aimons faire des distinctions, et une distinction très importante dans ces disciplines notamment est celle qui se trouve entre ce que nous appelons une «condition nécessaire» et une «condition suffisante». Une condition nécessaire est définie comme une chose qui doit absolument se produire avant que quelque chose d’autre puisse suivre. Par exemple, pour qu’un feu s’allume, la présence d’oxygène est absolument nécessaire. S’il n’y a pas d’oxygène, il ne peut y avoir de feu. En revanche, une condition suffisante est ce qui est nécessaire pour qu’un résultat se produise. L’oxygène n’est pas une condition suffisante pour le feu. Il est nécessaire au feu, mais à lui seul, il ne garantit pas la production d’un feu. Vous ne pouvez pas avoir de feu sans oxygène, mais vous pouvez avoir de l’oxygène sans avoir de feu. En résumé, une condition nécessaire est une condition sine qua non – sans laquelle l’effet désiré ne se produira pas.


Jésus a présenté une condition nécessaire dans cette conversation avec Nicodème. Nous devrions être très attentifs chaque fois que Jésus enseigne des conditions nécessaires, mais c’est encore plus vrai dans le cas présent, puisqu’il énonce une condition absolue pour entrer dans le royaume de Dieu. Il dit en effet: «[…] si un homme ne naît de nouveau, il ne peut voir le royaume de Dieu.» Autrement dit, à moins que «A» ne se produise, «B» ne peut pas suivre. Comprenez-vous pourquoi c’est si important? Par ces mots, Jésus a énoncé la condition nécessaire pour entrer dans son royaume. Il a interrompu cet homme extrêmement compétent en matière de théologie, qui était un chef religieux reconnu et loué par ses concitoyens en Israël, et l’a frappé en plein front avec cette vérité: «Tu dois naître de nouveau. » C’est comme si j’entrais dans une église, et qu’au moment où le pasteur me posait une question théologique ou me disait quelque chose de gentil, je lui disais : « Attendez. Vous ne pouvez même pas voir le royaume de Dieu parce que vous devez naître de nouveau. » Pas étonnant que les pharisiens se soient montrés si hostiles envers Jésus.


Pour le dire aussi simplement que possible, si vous ne renaissez pas spirituellement, vous n’êtes pas chrétien. Il est nécessaire de naître à nouveau pour être chrétien. Personne ne naît chrétien. Personne n’entre dans ce monde en étant déjà introduit dans le royaume de Dieu. Les pharisiens pensaient qu’ils étaient nés dans le royaume de Dieu. Ils raisonnaient ainsi : « Nous sommes les enfants d’Abraham. Nous faisons tout ce qu’il faut. Nous avons la loi de Moïse.» Mais Jésus leur dira plus tard: «Vous n’êtes pas les enfants d’Abraham. Vous êtes les enfants de ceux que vous servez » (voir Jn 8.39-47).


Je ne saurais trop insister sur le caractère radical de cette déclaration de Jésus. Si elle nous semble radicale, elles devaient l’être encore plus pour les contemporains de Christ.


Cet article est tiré du livre : « Que signifie « naître de nouveau » ? » de R.C. Sproul