La nature de la justification : une déclaration légale (John MacArthur)
Avant d’examiner quelque aspect particulier que ce soit de la justification, il faut être au clair sur ce que la Bible enseigne à propos de la nature de la justification elle-même. La justification est une déclaration légale ou juridique de justice, et non une communication ou une infusion de justice. Elle décrit ce que Dieu déclare au sujet du croyant, non ce qu’il fait pour transformer le croyant. En fait, la justification elle-même n’opère aucun changement dans la nature ou le caractère du pécheur1. Il s’agit du changement instantané du statut de la personne devant Dieu, et non d’une transformation progressive qui s’opère en celui qui est justifié.
Les déclarations légales de ce genre sont courantes dans la vie quotidienne. Lorsque l’officier de l’état civil déclare : « En vertu des pouvoirs qui me sont conférés, je vous déclare unis par le lien du mariage » ou « je vous déclare mari et femme », il y a un changement instantané du statut légal du couple qui se tient devant lui. Quelques secondes plus tôt, la loi considérait les « futurs » mariés comme des individus distincts. Pourtant, sur la base de cette déclaration, leur statut légal devant Dieu et devant la société change totalement. Alors que cette déclaration a des implications profondes et qui changent la vie, les paroles de l’officier de l’état civil ne changent en rien la nature et le caractère des mariés. Ce n’est qu’une déclaration légale. Pour prendre un autre exemple, lorsque le président du jury annonce à la cour que l’accusé n’est pas coupable, le statut légal de ce dernier change instantanément. Quelques secondes plus tôt, la loi le considérait comme un « accusé » innocent jusqu’à qu’il soit prouvé coupable. À la suite de la déclaration du président, il n’est donc pas coupable aux yeux de la loi. Pourtant, le verdict du jury ne rend pas cet homme non coupable ; ce sont ses actions qui font de lui un homme coupable ou innocent. Le verdict ne le déclare pas innocent de toutes les mauvaises actions commises dans sa vie. Les paroles du président indiquent simplement le statut de l’accusé devant la loi. De même, la justification dont parle l’Écriture est le verdict que Dieu prononce à l’encontre du pécheur : « non coupable – entièrement juste ». Dans le cas de la justification, l’accusé n’est pas innocent, mais un autre a payé pour ses crimes.
Le désaccord autour de la justification
Le désaccord sur la nature de la justification a été l’un des débats fondamentaux lors de la Réforme, et il continue d’opposer profondément le christianisme biblique et le catholicisme romain. La théologie catholique romaine enseigne que la justification n’est pas seulement légale, mais également transformatrice. Autrement dit, selon l’enseignement catholique romain, « justifier » ne signifie pas « déclarer juste », mais « rendre juste ». Il est certes vrai que la grâce salvatrice de Dieu est transformatrice ; ceux qui sont déclarés justes à la conversion deviennent progressivement justes dans le cours de leur vie chrétienne. Cette transformation progressive définit non la réalité de la justification, mais celle de la sanctification. En négligeant de différencier ces deux applications étroitement liées, mais cependant distinctes de la rédemption, le catholicisme romain inclut la sanctification dans la justification. La conséquence inévitable est que la justice imparfaite du croyant remplace la justice parfaite de Christ comme seul fondement de la justification. Le résultat est une « justice, celle qui vient de la loi » qui, comme le dit Paul dans Philippiens 3.9 n’est pas la justice salvatrice de Dieu. En ne comprenant pas la nature de la justification qui est une déclaration légale, et en l’assimilant faussement à un processus transformateur, on détruit le fondement même de l’Évangile.
L’Écriture témoigne de cette vérité
L’Écriture rend clairement témoignage elle-même à cette vérité, car, à propos de la justification et de la justice, les auteurs bibliques se servent souvent des termes qui évoquent plus une déclaration qu’une transformation. Dans l’Ancien Testament, le groupe de mots construits sur tsadeq est souvent utilisé dans des contextes judiciaires. Deutéronome 25.1 en est un exemple : « Lorsque des hommes, ayant entre eux une querelle, se présenteront en justice pour être jugés, on absoudra l’innocent, et l’on condamnera le coupable » (voir aussi Ex 23.7 ; 1 R 8.31,32 ; Job 9.15 ; És 43.9,26 ; Jé 12.1). Comme nous l’avons dit plus haut, les juges ne rendent pas les gens justes ou méchants. Ils n’accomplissent aucune œuvre transformatrice qui infuse la justice ou la méchanceté dans la nature ou le caractère de la personne. Le juge déclare simplement l’accusé juste ou coupable. D’ailleurs, Dieu prononce un malheur sur « ceux qui justifient le coupable pour un présent » (És 5.23), car « celui qui absout le coupable et celui qui condamne le juste sont tous deux en abomination à l’Éternel » (Pr 17.15). Si la justification était transformatrice, comment pourrait-on dire que le fait de rendre juste une personne méchante serait une abomination ? La transformation du caractère d’une personne mauvaise par l’infusion de la justice en elle serait un acte juste ! Par conséquent, une compréhension transformatrice de la justification fait violence au sens de ces textes. Justifier le méchant, ce n’est pas le rendre juste, mais le déclarer juste alors qu’il ne l’est pas.
Les nombreuses preuves du Nouveau Testament
Le Nouveau Testament présente d’autres preuves en faveur de la nature déclarative de la justification. Premièrement, la justification se révèle comme déclarative et non transformatrice dans les circonstances où c’est Dieu qui est justifié. Dans Luc 7.29, nous lisons : « Et tout le peuple qui l’a entendu et même les publicains ont justifié (en grec, edikaiōsan ton theon) Dieu. » Si la justification était transformatrice, nous serions tout simplement en présence d’un blasphème, car l’idée que le peuple et les publicains aient pu opérer une transformation morale positive en Dieu est un non-sens. La Bible du Semeur (BDS) adopte la traduction : « ont reconnu que Dieu est juste ». Autrement dit, la justice de Dieu a été affirmée et démontrée (voir Ro 3.26). Deuxièmement, la justification est souvent opposée à la condamnation qui, elle, parle indubitablement de déclaration légale. Dans Romains 8.33,34, Paul déclare : « Qui accusera les élus de Dieu ? C’est Dieu qui justifie ! Qui les condamnera ? » (Voir aussi Ro 5.18 ; 2 Co 3.9 ; Job 9.20 ; Ps 94.21 ; Pr 17.15.) L’acte par lequel Dieu justifie est clairement opposé à celui par lequel on accuse et condamne. Or, condamner quelqu’un ne veut pas dire le rendre méchant ; c’est prononcer un verdict et déclarer qu’il est méchant. Pour que le parallélisme entre justification et condamnation soit respecté, nous devons comprendre que la justification ne consiste pas à rendre juste, mais à déclarer juste.
C’est pourquoi, dans les textes parlant de Dieu qui justifie le croyant dans un sens salvateur (p. ex. Ro 3.20-28 ; 4.4,5 ; 5.1 ; Ga 2.16 ; 3.11,21-26 ; 5.4), sachons qu’ils font référence à la déclaration de Dieu que le pécheur se trouve instantanément dans une position juste devant lui. Ces passages enseignent que Dieu déclare le croyant juste par un don de sa grâce, que le croyant reçoit par la foi seule, sans les œuvres.
- MacArthur, The Gospel according to the Apostles, p. 69-70.
Cet article est tiré du livre : Théologie systématique de John MacArthur.