La redevabilité en tant que membre de l’Église locale (Brian Croft)
Au début de mon ministère de revitalisation d’une Église, j’ai été étonné par le fait que sur 800 personnes listées comme membres, seulement 40 d’entre elles se présentaient régulièrement les dimanches matin, mais également par l’absence de toute procédure visant à amener les gens de l’Église à devenir membres. C’était vrai pour cette Église, mais c’est aussi vrai pour toute Église pour laquelle j’ai travaillé et qui avait grand besoin d’une revitalisation.
Dans plusieurs Églises, il semble y avoir la présence d’un non-dit lorsque les dirigeants se rencontrent : comment se fait-il qu’il existe un si grand écart entre le nombre de personnes qui apparaissent sur la liste de membres et le nombre de personnes qui viennent à l’Église les dimanches matin ? La manière dont est conceptualisée l’adhésion à une Église locale par ses anciens et ses membres révèle, en fait, son niveau de santé. L’importance que nous donnons à la redevabilité entre les membres d’une Église et l’analyse de cet écart nous permettront d’arriver à une solution réfléchie pour une Église en bonne santé.
La solution, dans un certain sens, aura nécessairement un lien avec la conviction que de devenir membre d’une Église est essentiel pour la vie spirituelle du croyant. Par conséquent, il faut absolument véhiculer à notre assemblée l’importance d’adhérer à une Église locale puisque c’est de cette manière que nous pouvons nous rappeler que notre marche avec Jésus ne se fait jamais seule et que nous avons besoin de nos frères et sœurs en Christ. Nous devons, en effet, prendre soin les uns des autres. Encourager les gens de notre Église à devenir membres permet de bâtir une vie communautaire telle que nous la voyons tout au long du Nouveau Testament. Il est primordial d’enseigner aux membres d’une Église de quelle manière ils sont bibliquement appelés à être en relation les uns avec les autres puisque cela est un concept clé pour les préparer à aller de l’avant dans leur nouvelle vie chrétienne. Il existe quatre domaines dans lesquels les membres d’une Église qui font ainsi une alliance entre eux doivent démontrer leur amour et se tenir mutuellement redevables : lorsqu’il est question du péché, de la souffrance, du découragement et de l’affirmation d’une foi sincère.
Le péché
Un des rôles les plus importants des membres d’une Église est de se tenir redevable quant à notre manière de vivre notre vie chrétienne et de témoigner le nom de Jésus. C’est ce que nous indiquent plusieurs passages des Écritures où nous voyons que certains membres non repentants d’une assemblée ont été repris par d’autres membres. Jésus décrit en détail, dans Matthieu 18.15-18, les quatre étapes de la discipline qui se terminent avec l’excommunication de celui qui refuse de se repentir. Dans sa première lettre aux Corinthiens, Paul demande aux membres d’excommunier ceux de l’Église qui commettent l’immoralité sexuelle (1 Co 5.2). Paul encourage même les membres de l’Église de Thessalonique à reprendre ceux qui profitent de la générosité de l’Église (2 Th 3.6-15). Puisque le nom de Christ et la sainteté de l’Église sont en jeu, il est donc essentiel que les membres d’une même Église soient redevables les uns envers les autres quant à leur manière de vivre l’Évangile.
La souffrance
La vie chrétienne ne doit pas être vécue seule et nous le voyons encore plus clairement pendant nos moments de souffrance. En effet, notre monde déchu garantit que nous aurons droit à notre lot de souffrance. Toutefois, Dieu a prévu que nous n’aurions pas à souffrir en étant seuls. Cette réalité est évidente tout au long des Écritures, mais d’autant plus concise dans la lettre de Paul à l’Église de Galatie : « Portez les fardeaux les uns des autres, et vous accomplirez ainsi la loi de Christ » (Ga 6.2). Les croyants doivent souffrir ensemble et, plus encore, ils doivent supporter les fardeaux des autres membres de leur congrégation. C’est notamment au sein de la communauté alliancielle d’une Église locale que nous pouvons réellement prendre part à la souffrance des autres et porter mutuellement nos fardeaux, nous assurant ainsi que personne ne souffre seul.
Le découragement
Ce monde déchu amène aussi des épreuves, de la douleur et des difficultés qui entraînent inévitablement du découragement. Bien que certains soient enclins au découragement plus facilement, tous devront un jour y faire face. C’est pourquoi Paul enseigne à l’Église de Thessalonique de « console[r] ceux qui sont abattus, supporte[r] les faibles, use[r] de patience envers tous » (1 Th 5.14). Les croyants qui s’engagent à prendre soin les uns des autres ne doivent donc pas le faire seulement lors des bons jours. Au contraire, le témoignage des chrétiens est plus puissant lorsque ceux-ci s’acceptent pour qui ils sont, lorsqu’ils s’aiment, qu’ils reconnaissent mutuellement leurs faiblesses, et qu’ils s’encouragent à travers les périodes d’épreuves et de découragement.
L’affirmation d’une foi sincère
En tant que membres d’une congrégation, notre engagement envers les autres membres nous permet d’affirmer la foi sincère et véritable d’une personne. Bien entendu, nous ne sommes pas Dieu, mais seulement humain. Ainsi, il nous est impossible de vraiment connaître le cœur d’un croyant et de savoir avec certitude s’il appartient à Christ. Cependant, le Nouveau Testament nous indique différentes façons d’évaluer ceux qui professent suivre Jésus. Les apôtres, par exemple, montrent notamment comment il est possible, d’abord pour les pasteurs, mais aussi pour les membres d’une même assemblée, d’affirmer la foi de quelqu’un.
Il existe deux exhortations dans les Écritures qui témoignent de cette réalité, et les deux s’avèrent reliées à la repentance d’un frère confronté à son péché. Nous retrouvons le premier exemple dans la lettre de Paul à l’Église de Galatie : « Frères, si un homme vient à être surpris en faute, vous qui êtes spirituels, redressez-le avec un esprit de douceur. Prends garde à toi-même, de peur que tu ne sois aussi tenté » (Ga 6.1). L’affirmation de la véritable repentance d’un membre d’une congrégation par les autres membres devient ainsi un moyen de redevabilité entre eux.
Le passage de 2 Corinthiens 2 révèle un deuxième exemple, lorsque Paul demande aux membres de l’Église de valider le retour dans l’assemblée d’un membre qui a été excommunié à cause d’une absence de repentance. Paul explique la raison dans les versets 6 à 8 : « Il suffit pour cet homme du châtiment qui lui a été infligé par le plus grand nombre, en sorte que vous devez bien plutôt lui pardonner et le consoler, de peur qu’il ne soit accablé par une tristesse excessive. Je vous exhorte donc à faire acte de charité envers lui. » Paul évoque alors le pouvoir qui se trouve entre les mains des membres de l’Église de Corinthe – qui luttent tout autant avec le péché et l’immaturité que celui qui a été excommunié – de restaurer et de réaffirmer leur amour pour celui qui s’était jadis éloigné. Dans ces deux exemples, nous observons que les membres d’une Église ont l’autorité ainsi que la responsabilité de restaurer dans l’assemblée un autre membre avec douceur et amour.
Ainsi, pour toutes ces raisons, c’est-à-dire la vie spirituelle des croyants d’une Église et la profession du nom de Jésus, nous devons absolument encourager les chrétiens d’une même assemblée à devenir des membres liés par une alliance de redevabilité. Nous sommes trop souvent témoins du peu d’importance qu’une Église en grand besoin de revitalisation accorde à l’adhésion à une congrégation. En effet, l’accent mis sur la croissance du nombre de croyants éclipse souvent le processus d’évaluation de futurs membres. Au moment où l’Église commence à décliner, le concept de redevabilité entre les membres n’est plus présent depuis un certain temps. Les conflits non résolus se transforment alors en divisions et les membres cessent de prendre soin les uns des autres. Alors que l’Église commence à prendre peur à la vue d’une diminution au niveau des présences, elle devient prête à accepter toute personne en tant que membre sans toutefois insister sur l’importance de la redevabilité. Les péchés continuent ainsi d’évoluer par l’absence de confrontation et la vie d’Église ne suit bientôt plus les standards bibliques. En fait, une caractéristique commune des Églises divisées et en déclin est le sentiment généralisé d’avoir droit à notre vie privée, amenant les membres à ne plus vouloir prendre part à la vie des autres alors que Dieu nous a créés afin que nous soyons en relation les uns avec les autres.
En tant que croyants, nous avons besoin des autres membres de notre Église. Nous avons besoin des autres pour nous aider à porter nos fardeaux, pour pleurer et souffrir ensemble, pour nous encourager dans nos moments de faiblesse et de découragement. Nous avons également besoin d’être rassurés quant au fait d’être aimés tels que nous sommes et d’avoir le soutien nécessaire dans notre marche avec Dieu. Bref, une Église mourante et divisée doit faire le point sur l’importance d’être membre si elle veut être revitalisée et réunifiée. L’adhésion à une Église locale permet d’obéir aux commandements que Christ a donnés à son Église afin de refléter le plan souverain et la gloire de Dieu.