La sainteté : le camping nouveau genre (Kevin DeYoung)
Le camping n’est pas requis
Je n’ai jamais compris quel était l’attrait du camping. Bien qu’il y ait un grand nombre de campeurs chevronnés dans mon entourage, j’ai toujours trouvé étrange qu’une personne travaille d’arrache-pied toute l’année pour se permettre de vivre une semaine dans la forêt. Je comprends tout à fait le plaisir d’être ensemble, mais pourquoi se réunir dans des tentes en se privant de commodités ?
Je crois comprendre que l’attrait du camping consiste à vivre une aventure. Partir explorer la création de Dieu le sac au dos, c’est génial. Toutefois, remplir la camionnette telle l’arche de Noé, se rendre sur un terrain de camping infesté de moustiques et tenter en vain de recréer une version acceptable de la cuisine et de la chambre à coucher laissées derrière nous ne fait aucun sens. Qui a décidé que les vacances devaient être une version plus difficile de la vie normale ?
Tous les ans, notre Église annonce le « camp familial ». Tous les ans, ma femme exprime le désir d’y aller, mais curieusement, nous nous retrouvons toujours dans un autre État des États-Unis durant la semaine où a lieu ce célèbre événement. À bien y penser, l’intérêt principal d’un camp familial est que les enfants, affranchis du joug parental, sont libres de courir et de se salir du lever jusqu’au coucher du soleil. C’est un peu comme Sa Majesté des mouches, mais au Michigan.
Aussi attirante que puisse paraître une pause entre amis sans avoir à surveiller sa progéniture, il doit bien y avoir un moyen moins salissant et moins humide de sortir les enfants pendant une semaine. (N’est-ce pas pour cette raison qu’existent les colonies de vacances bibliques ?). En effet, même si les enfants s’amusent, même si la température est clémente, même si personne n’a besoin de points de suture, et même si le dix-septième hotdog est toujours aussi savoureux que le premier, il sera toujours aussi difficile d’empêcher le sable de se glisser dans mes livres.
Je sais que le monde est rempli de passionnés de camping. Ils ont le droit d’y prendre plaisir, mais ce n’est tout simplement pas mon truc. Je n’ai jamais fait de camping quand j’étais jeune. Ma famille et moi n’étions pas friands de plein air. Nous n’avions rien contre les activités extérieures. Un regard par la fenêtre ou une sortie pour faire les courses nous permettait d’être témoins de ce genre d’activités. Ainsi, nous n’avons jamais fait de camping : nous ne possédions même pas de tente, encore moins une autocaravane ou tout autre genre de véhicule récréatif. Personne dans ma famille n’allait à la chasse ou à la pêche. Même notre barbecue était à l’intérieur de la maison (sans rire, c’était un Jenn-Air, faites une recherche).
Le camping a toujours été pour moi une source de grand mystère. Je n’ai jamais souffert d’en être privé. Voilà une chose de moins à planifier. Le camping est sans doute fantastique pour les autres, mais je suis content de ne jamais avoir à en parler, à y penser ou à en faire. Que vous soyez fascinés par votre glacière ou par vos chaises pliantes, cela vous regarde. De telles choses ne me manquent pas.
La sainteté est-elle requise ?
Est-il possible que votre vision de la sainteté soit semblable à ma vision du camping ? C’est bien pour les autres. Vous éprouvez un certain respect envers ceux qui se compliquent volontairement l’existence, mais ce n’est pas vraiment votre truc. La sainteté n’a pas fait partie de votre vie lorsque vous étiez jeunes. Personne n’en parlait. Ce n’était ni le sujet des prières familiales ni la priorité de votre Église. Ainsi vous ne pourriez pas affirmer aujourd’hui que ce sujet vous tient à cœur.
La poursuite de la sainteté semble n’être qu’un souci de trop dans une vie déjà assez pénible. De toute évidence, ce serait fabuleux d’être une meilleure personne, et vous espérez sincèrement ne pas commettre de très grands péchés. Puisque vous avez été sauvé par grâce, vous vous dites sans doute que vous possédez déjà toute la sainteté dont vous avez besoin et que, franchement, c’est très bien ainsi.
La faille dans notre sainteté, c’est que nous ne nous en préoccupons pas vraiment. Dans nos Églises, nous entendons très peu d’exhortations passionnées à poursuivre une sainteté inspirée par l’Évangile. Certes, nous abordons le sujet du péché et nous encourageons une bonne conduite. Toutefois, beaucoup trop d’enseignements encouragent les gens à devenir de meilleures personnes par leurs propres efforts. Ce moralisme n’est pas du tout utile.
Un évangile qui se contente de nous dicter notre conduite sans annoncer ce que Christ a accompli n’est pas l’Évangile. Je ne dis pas que nous méritons d’être punis tous les dimanches parce que nous regardons la chaîne des sports ou parce que nous conduisons un VUS. Je parle plutôt de l’erreur des chrétiens, en particulier la nouvelle génération et encore plus ceux qui méprisent la « religion » et le « légalisme », de ne pas prendre au sérieux l’un des objectifs les plus importants de notre rédemption, qui est aussi l’une des preuves requises pour la vie éternelle : notre sainteté.
J. C. Ryle, un évêque de Liverpool du xixe siècle, affirmait avec raison :
« Nous devons être saints, car c’est la raison et le but pour lesquels Christ est venu dans le monde… Jésus sauve entièrement. Il ne se contente pas de libérer le pécheur de la honte de son péché, il fait beaucoup plus, il détruit l’emprise du péché sur lui (1 Pi 1.2 ; Ro 8.29 ; Ép 1.4 ; 2 Ti 1.9 ; Hé 12.10)[1]. »
Nous redécouvrons d’une certaine manière tout ce dont Jésus-Christ nous a délivrés, et nous nous en réjouissons à juste titre. Je crains cependant que nous n’accordions pas suffisamment d’importance et ne consentions que peu d’efforts à atteindre tout ce pour quoi il nous a sauvés. Les plus passionnés par l’Évangile et par la gloire de Dieu ne devraient-ils pas être les plus consacrés dans leur poursuite de la sainteté ? Je m’inquiète de ce sérieux manque d’enthousiasme dont personne ne semble se soucier.
Notes :
[1]J. C. Ryle, Holiness: Its Nature, Hindrances, Difficulties, and Roots [La sainteté : sa nature, ses obstacles, ses difficultés et ses racines], Moscou, ID, Charles Nolan, 2011, p. 49 (italiques pour souligner).
Cet article est adapté du livre : « La faille dans notre sainteté » de Kevin DeYoung