L’amour de Christ dans Cantiques des Cantiques (Michael Reeves)
Le Cantique des Cantiques comprend une belle révélation pour nous. Jonathan Edwards explique que le titre même, « Cantique des Cantiques », crée en nous des attentes élevées par rapport à son contenu :
Le nom que Salomon donne à ce cantique me conforte dans l’idée qu’il est plus qu’une chanson d’amour ordinaire, et qu’il a été conçu pour être un cantique divin, et d’une autorité divine, car nous lisons dans 1 Rois 4.32, que Salomon a « composé mille cinq cantiques ». Celui-ci, il l’appelle le Cantique des Cantiques (Ca 1.1), ce qui signifie que c’est le plus excellent de tous ses cantiques, ce qui me semble être très probable en raison de ce titre, parce que c’était un cantique sur le plus excellent sujet, celui de l’amour, de l’union et de la communion entre Christ et son épouse, dont le mariage et l’amour conjugal ne sont qu’une ombre1.
Il y a deux personnages principaux dans le Cantique des Cantiques : l’amant et la bien-aimée. L’amant est un roi berger, comme David (Ca 1.4,7), mais il est le Fils de David (Ca 3.7). Il se tient debout à la porte et il frappe (Ca 5.2,3). Au chapitre 3, sa litière ressemble au tabernacle, au temple, et comme le Seigneur dans l’Exode, il vient du désert dans une colonne de fumée (Ca 3.6), et son parfum ressemble aux odeurs dans le temple. La bien-aimée est décrite comme Israël lors de l’exode, arrivant du désert, « s’appuyant sur son bien-aimé » (Ca 8.5). Comme Israël dans Ésaïe 5.1-7, elle est à plusieurs reprises comparée à une vigne et à Jérusalem (Ca 8.10-12). Et l’épouse est aussi une sœur (Ca 4.9) : Christ est le mari et le frère, mais puisqu’épouser une sœur est un tabou selon Lévitique 18.9, il est très peu probable que cela puisse décrire une romance ordinaire juive2.
Cantique des Cantiques et le Christ Jésus
La mort sépare habituellement les amants, mais l’amour de ces deux amants est aussi fort que la mort. Même des inondations ne pourraient l’emporter (Ca 8.6,7). C’est comme si le Cantique des Cantiques avait été écrit principalement pour décrire cette histoire d’amour unique entre Christ et l’Église. Et la similitude du livre dans son ensemble avec le Psaume 45, que le Nouveau Testament cite en référence à Christ, est surprenante. Ce n’est donc pas étonnant que le Cantique des Cantiques, comme l’Apocalypse, s’achève par l’épouse qui appelle l’époux.
C’est dans ce contexte que l’époux affirme que l’épouse attire les regards :
Que tu es belle, ô mon amie, comme Tirtsa. Tu es superbe comme Jérusalem, et redoutable comme des soldats rangés sous leur bannière… Qui donc est celle qui apparaît comme l’aurore et qui est belle comme la lune, brillante comme le soleil et redoutable comme des soldats rangés sous leur bannière ? (Ca 6.4,10, BDS.)
L’épouse est comme une armée. Et elle est aussi lumineuse que le soleil, avec la beauté reflétée de la lune. D’abord jeune fille gênée (Ca 1.5-7), elle est désormais redoutable. Comme le visage de Moïse reflétait la gloire du Seigneur, l’Église reflète la magnificence redoutable de l’Époux. L’apôtre Paul a enseigné que par l’Esprit, les croyants sont transformés à l’image de Christ « de gloire en gloire » (2 Co 3.18). Mais ici, nous lisons que le Cantique des Cantiques précise que cette transformation consiste à croître en reflétant l’aspect redoutable de Christ.
Une Église transformée
Conduite par l’Esprit dans la conformité avec le Christ, l’Église commence à manifester au monde les redoutables qualités divines : la sainteté, la béatitude, le bonheur, la plénitude et la beauté. Ainsi, l’Église brille comme la lune dans l’obscurité, suscitant à la fois l’émerveillement et l’effroi. Les croyants deviennent comme les gens solides qui vivent au paradis dans Le grand divorce de C. S. Lewis : leur plénitude et leur joie aimante sont redoutables aux yeux des autres. Ce mélange est profondément attirant et inexplicable, mais en même temps troublant pour les incroyants à cause de la manière dont cela révèle leur corruption et leur caractère grincheux. Dans la crainte de Dieu, les croyants deviennent, comme leur Dieu, heureusement et magnifiquement redoutables.
1. Jonathan Edwards, Notes on Scripture, dans Works of Jonathan Edwards, Stephen J. Stein, éd., New Haven, Conn., Yale University Press, 1998, vol. 15, p. 92n147
2. Ce paragraphe et le suivant ont été adaptés de la préface que j’ai écrite pour un livre de Richard Sibbes intitulé The Love of Christ: Expository Sermons on the Verses from Song of Solomon Chapters 4–6, Puritan Paperbacks, Édimbourg, Banner of Truth, 2011
Cet article est adapté du livre : « Réjouissez-vous et tremblez » de Michael Reeves