Le canon biblique est-il fiable ? (David Cadotte)

Comment savoir quels livres devraient faire partie de la Bible ou non ? Cette question met en lumière ce que Michael J. Kruger appelle le « problème du canon [1] ». Les érudits non chrétiens croient que les chrétiens n’ont pas de réponse à cette question. Ils pensent que notre croyance en notre canon actuel constitue seulement un pas de foi. La définition et la reconnaissance du canon biblique constituent un enjeu critique pour l’Église. Nous devons avoir confiance en la Parole, car « tout ce qu’elle enseigne doit être cru, sinon rien de ce qu’elle enseigne ne peut l’être [2] ». Les écrits des érudits non chrétiens à propos de la Bible ont commencé à sortir des cercles académiques et leurs enseignements atteignent aujourd’hui tous les croyants. Plusieurs livres sont écrits pour mettre en doute la paternité des écrits bibliques ou l’unité de la théologie de l’Église primitive. De plus, de nouveaux écrits apocryphes sont régulièrement découverts. Tout cela génère continuellement le doute chez les croyants qui sont amenés faussement à penser qu’ils ne connaissent pas les vrais fondements du christianisme. Il est donc essentiel d’avoir un cadre pour parler de la Bible comme un tout cohérent et établir une théologie de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament.

L’écrivain Mark Twain a écrit un jour que « la différence entre le bon mot et le mot adéquat équivaut à la différence entre la foudre et la luciole [3] ». Cette analogie nous montre l’importance de la terminologie. Si l’on tord ne serait-ce qu’un peu la terminologie, on peut semer la confusion dans un débat. Il existe une controverse sur la définition du canon. Chaque définition va influencer la date d’établissement du canon. Si l’on considère que le canon est établi seulement lorsqu’il constitue un ensemble fermé de livres, on pourrait placer cette date au IVe siècle. Si l’on considère que c’est uniquement son utilisation par l’Église qui détermine le canon, on peut penser qu’il est constitué quelque part durant le IIe siècle. Toutefois, lorsqu’on se penche sur l’ontologie du canon, il devient évident que les Écritures ne deviennent pas canoniques, mais qu’elles le sont en elles-mêmes dès le moment de leur rédaction dans la perspective du plan de Dieu.

Dans son ouvrage Théologie systématique, John MacArthur définit la canonicité comme « la reconnaissance et l’acceptation par l’Église des livres de l’Écriture comme Parole inspirée de Dieu [4] ». Ce n’est pas l’Église elle-même qui détermine quelles sont les Écritures qui font autorité, mais bien l’autorité divine inhérente à ces écrits. Pour faire partie du canon de l’Ancien Testament ou du Nouveau Testament, chaque livre devait répondre à trois critères principaux : démontrer des preuves de son inspiration par sa paternité prophétique ou apostolique, refléter une cohérence de doctrine avec l’Écriture existante, être accepté dans son ensemble par le peuple de Dieu. Il est intéressant d’examiner le parcours de la reconnaissance du canon biblique de l’Ancien Testament et de noter que les écrits vétérotestamentaires ont été reconnus dès que les auteurs étaient identifiés en tant que porte-parole de Dieu. De la même manière, la plupart des livres qui constituent aujourd’hui le Nouveau Testament étaient déjà reconnus par le peuple de Dieu dès le premier siècle, et seulement quatre ou cinq livres ont fait l’objet de réels désaccords.

Le besoin de reconnaître et de préserver la révélation divine s’est révélé dès le début de la composition de la Torah. En Deutéronome 31.24-29, nous voyons comment Moïse a pris soin de placer le livre de la loi dans l’arche de l’alliance pour en préserver le témoignage après sa mort. Cela nous démontre également que les anciens du peuple reconnaissaient l’autorité divine de ces écrits. Ensuite, toute nouvelle révélation était comparée aux Écritures existantes pour sonder ce qui venait de Dieu (De 13.1-5). À l’époque de l’Église primitive, les apôtres ont ressenti aussi le besoin de préserver leurs enseignements : « Ainsi donc, frères, demeurez fermes, et retenez les instructions que vous avez reçues, soit par notre parole, soit par notre lettre » (2 Th 2.15). Après la mort des apôtres, l’Église a vu le besoin d’établir un canon néotestamentaire. Cette initiative était tout à fait naturelle pour l’Église, contrairement à ce qu’affirment certains érudits. En fait, les croyants de l’Église primitive ont vu l’importance de compléter le canon biblique existant avec le témoignage de Jésus-Christ, qui était l’accomplissement et l’acte final de la révélation de l’Ancien Testament. C’est, par exemple, cette idée que nous remarquons dans Matthieu 1 avec la généalogie du fils de David. Matthieu place la vie et l’œuvre de Jésus dans la plus grande histoire du peuple de Dieu. La création d’un canon néotestamentaire était aussi inévitable, car la venue de Jésus-Christ a introduit une nouvelle alliance entre Dieu et son peuple, et celle-ci devait être naturellement accompagnée de documents écrits qui en indiqueraient les termes. L’idée d’établir un canon n’était aucunement étrangère aux premiers chrétiens. L’Église n’a jamais eu à attendre une longue période de temps avant d’établir l’authenticité de la révélation divine. Nous avons donc toutes les raisons de croire que le canon biblique actuel est fiable.

[1] Michael J. Kruger, « The Problem of Canon », The New Testament Canon, Biblical Studies Teaching Series, Ligonier Ministries, 2019, DVD, trad. libre.

[2] Tabletalk, mars 2015, no 3, p. 11, trad. libre.

[3] Mark Twain, Letter to George Bainton, 15 octobre 1888, trad. libre.

[4] John MacArthur, Théologie systématique, Trois-Rivières, Québec, Éditions Impact, 2018, p. 125.