Le fondement de la justification : la justice imputée (John MacArthur)

Comment cette déclaration de Dieu peut-elle être juste ? Car selon Proverbes 17.15, « Celui qui absout le coupable [est] en abomination à l’Éternel. » Toute l’humanité est inique. Nous avons tous enfreint la loi de Dieu, et nous méritons la condamnation divine ; en effet, « tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu » (Ro 3.23), et « le salaire du péché, c’est la mort » (Ro 6.23). Or, Romains 4.5 déclare explicitement que Dieu justifie l’impie. Comment Dieu peut-il déclarer justes ceux qui sont réellement coupables sans commettre quelque chose d’abominable, pour reprendre l’expression de Proverbes 17.15 ? Comment Dieu peut-il être « juste tout en justifiant celui qui a la foi en Jésus » (Ro 3.26) ? La réponse à cette question est la doctrine de l’imputation. L’acte par lequel Dieu déclare la justification repose sur l’acte qui constitue l’imputation. C’est un acte double : Dieu impute – ou donne, crédite, attribue – notre péché à Christ et le punit à notre place ; et il impute la justice de Christ aux croyants et leur procure la vie éternelle en lui.

La provision de justice : l’imputation de la justice de Christ à nous             

Le pardon de Dieu ne met pas fin à l’œuvre divine de la justification. D’ailleurs, si le seul bienfait que le croyant reçoit par la justification était le pardon de ses péchés, il ne serait pas sauvé. Une ancienne définition de la justification proposée autrefois à l’école du dimanche disait « c’est comme si je n’avais jamais péché » ; cette définition est inexacte, parce que le salut ne se limite pas à rendre sans péché ou innocent, il doit aussi inclure la justice (Mt 5.20,48). La loi de Dieu que l’homme a enfreinte – ce qui lui vaut la peine de mort (Ro 6.23) – comporte des commandements positifs et des sanctions pénales. Autrement dit, la loi de Dieu exige à la fois (1) que ses créatures honorent des obligations en accord avec sa justice et (2) qu’ils subissent certaines sanctions s’ils ne remplissent pas leurs devoirs.

L’homme a échoué sur les deux tableaux

L’homme a échoué sur les deux tableaux. Nous ne menons pas des vies de parfaite justice en obéissant à Dieu en toutes choses, en l’aimant de tout notre cœur, de toute notre âme et de toute notre force, et en aimant notre prochain comme nous-mêmes. Et nous ne pouvons pas subir le châtiment que mérite notre désobéissance sans périr éternellement en enfer. C’est pourquoi, pour que nous soyons sauvés, il fallait que notre substitut non seulement subisse notre châtiment en détournant sur lui la colère de Dieu contre notre péché, mais de plus qu’il obéisse à tous les commandements de la loi auxquels nous aurions dû obéir. Cette double nature de l’œuvre substitutive de Christ est parfois désignée d’obéissance passive et d’obéissance active. John Murray explique :

La loi de Dieu comprend des sanctions pénales et des ordres positifs. Elle réclame non seulement que nous obéissions parfaitement à tous ses préceptes, mais également que nous subissions les châtiments mérités pour infraction et manquements. C’est cette double exigence de la loi de Dieu qu’il faut prendre en compte lorsque nous parlons d’obéissance active et passive de Christ. En tant que vicaire de son peuple, Christ s’est placé sous la malédiction et la condamnation à cause de notre péché, mais il a aussi satisfait à toutes les exigences positives de la loi de Dieu. En d’autres termes, il a subi la sanction du péché tout en satisfaisant parfaitement les exigences de la loi divine. Il a satisfait parfaitement aux exigences pénales et aux exigences fixées impérativement par la loi de Dieu. L’obéissance passive fait référence aux premières, et l’obéissance active aux dernières1.

La justice de Christ est essentielle

Sans cette provision positive de justice, le pardon nous aurait laissés dans un état d’innocence ou de neutralité morale, comme l’était Adam avant la chute – n’ayant jamais péché, mais n’ayant non plus jamais obéi.

Pour cette raison, l’Écriture parle du pécheur justifié comme étant compté pour juste et aussi pardonné. Le peuple de Dieu atteste cette vérité dans Ésaïe 61.10 : « Je me réjouirai en l’Éternel, mon âme sera ravie d’allégresse en mon Dieu ; car il m’a revêtu des vêtements du salut, il m’a couvert du manteau de la délivrance, comme le fiancé s’orne d’un diadème, comme la fiancée se pare de ses joyaux. » D’ailleurs, le salut est décrit en termes de justice imputée déjà du temps d’Abraham. Il est dit dans Genèse 15.6 qu’Abraham « eut confiance en l’Éternel, qui le lui imputa à justice » (en grec, elogisthē autō eis dikaiosynēn [Septante]). L’apôtre Paul cite ce verset dans Romains 4.3 pour appuyer son raisonnement concernant la justification sur la base d’une justice imputée. Puis il ajoute : « Or, à celui qui fait une œuvre, le salaire est imputé, non comme une grâce, mais comme une chose due ; et à celui qui ne fait point d’œuvre, mais qui croit en celui qui justifie l’impie, sa foi lui est imputée à justice » (en grec, logizetai… eis dikaiosynēn, Ro 4.4,5).

Au chapitre suivant, Paul identifie la justice imputée aux croyants comme étant la justice personnelle de Christ. Dans Romains 5.12-19, Paul compare et oppose les deux chefs de file de l’humanité : (1) Adam et (2) Christ, le dernier Adam (1 Co 15.45). Le point culminant de son raisonnement se trouve dans les versets 18 et 19 :

De même que la transgression d’un seul homme [Adam] a plongé tous les hommes dans la condamnation, ainsi la justice d’un seul homme [Christ] aboutit à la justification de la vie pour tous les hommes. Comme par la désobéissance d’un seul homme beaucoup ont été désignés pécheurs, ainsi, par l’obéissance d’un seul homme, beaucoup seront désignés justes. (Traduction de l’auteur)

Le raisonnement majeur de Paul est le suivant : Adam a désobéi à Dieu, et sa désobéissance a été créditée pour la condamnation de tous ceux qui étaient en lui. De même, Christ a obéi à Dieu, et son obéissance a été imputée à tous ceux qui sont en lui. Par conséquent, loin d’être une « fiction légale », l’imputation du péché et l’imputation de la justice reposent toutes deux sur une base factuelle, des actions concrètes d’Adam et de Christ.

Dieu satisfait les exigences de la loi

Par conséquent, en ce qui concerne la justification, Dieu ne satisfait pas seulement les conditions pénales de la loi en imputant notre péché à Christ et en le punissant à notre place, mais il satisfait aussi les exigences positives de la loi en nous imputant la justice de Christ. Paul décrit cet échange extraordinaire dans 2 Corinthiens 5.21 : « Celui qui n’a point connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu. » Dans la justification, la justice parfaite que Dieu exige (Mt 5.20,48) ne s’accomplit pas en nous dans un sens transformateur ; elle nous est créditée par notre union avec Christ, le Juste, qui a accompli toute justice en notre faveur (Mt 3.15 ; Ga 3.27). C’est pourquoi Paul écrit : « Car Christ est la fin de la loi pour la justification de tous ceux qui croient » (Ro 10.4). Lorsque nous sommes « trouvés en lui », nous n’avons aucune justice personnelle obtenue par notre observance des commandements de Dieu ; nous saisissons au contraire la justice de Dieu, étrangère (car elle appartient à un autre, pas à nous), qui s’obtient pas la foi en Christ (Ph 3.9)140. Par l’action de Dieu, nous sommes unis à Christ « qui a été fait pour nous sagesse, justice, sanctification et rédemption » (1 Co 1.30).

En résumé, en Christ nous avons un substitut qui a subi le châtiment à notre place et qui nous a acquis la justice. Christ nous a obtenu le pardon en expiant nos péchés sur la croix. De même que nos péchés lui ont été imputés lorsqu’il est mort sur la croix, ainsi sa justice est portée à notre crédit. Sa justice parfaite est donc le fondement sur lequel nous nous tenons devant Dieu. Les pécheurs ne sont pas justifiés en raison de quelque bonne chose en eux ; Dieu peut nous déclarer justes – il peut justifier l’impie tout en étant juste – parce qu’il nous crédite gracieusement la justice parfaite de son cher Fils. Le seul fondement de la justification est la justice de Christ qui nous est attribuée comme un don par la seule grâce (voir Ro 3.24 ; Ép 2.8,9 ; Tit 3.7).


  1. Murray, Redemption Accomplished and Applied, p. 21-22.

Cet article est tiré du livre : Théologie systématique de John MacArthur.