Le point sur la critique textuelle (John Piper)
Les Manuscrits du Nouveau Testament
Le premier Nouveau Testament grec fut imprimé en 1516 par Érasme. Avant cela, toutes les copies se faisaient à la main. Nous devons notre Bible à l’amour et aux soins méticuleux apportés par d’innombrables moines et érudits au cours des quinze premiers siècles de l’ère chrétienne. Retrouver les manuscrits originaux écrits par les auteurs bibliques signifie relever le défi d’examiner tous ces documents recopiés à la main. C’est un immense défi. Pour illustrer mon propos, je prendrai le cas du Nouveau Testament.
Combien de ces manuscrits possédons-nous?
Combien de manuscrits grecs des écrits du Nouveau Testament sont actuellement en notre possession ? Environ 5 800. Les statistiques suivantes sont tirées de l’organisation Institut für Neutestamentliche Textforschung de Münster, en Allemagne, pour l’année 2011. À ma connaissance, aucune découverte de manuscrits n’a été faite depuis.
322 textes en caractères onciaux (lettres majuscules)
2 907 textes en lettres minuscules
2 445 portions de lectionnaires (parties de textes contenues dans les lectures de l’Église)
127 papyri (manuscrits écrits sur du papyrus)
_______
5 801
C’est un prodige que plusieurs de ces manuscrits sont consultables sur Internet au Center for the Study of New Testament Manuscripts.
Nous possédons un nombre époustouflant de fragments de manuscrits. Pour s’en rendre compte, il suffit de comparer ce nombre avec celui des autres documents historiques existants. Daniel Wallace, qui est considéré comme « le plus grand critique textuel contemporain du christianisme évangélique » décrit ainsi la situation en 2012 :
Les érudits du Nouveau Testament ont l’embarras du choix comparé aux données dont doivent se contenter les spécialistes du grec et du latin classiques. Le nombre moyen de copies d’auteurs de littérature classique ne dépasse pas vingt. Nous avons plus de 1 000 fois plus de manuscrits pour le Nouveau Testament que de manuscrits pour un auteur gréco-romain typique. Par ailleurs, les manuscrits d’un auteur classique typique remontent au plus tôt à 500 ans après la rédaction de l’original. Pour le Nouveau Testament, seules quelques dizaines d’années séparent les copies des originaux.
Quelques exemples de manuscrits d’autres oeuvres classiques
Quelques exemples :
La Guerre des Gaules, de Jules César (écrit entre 58 et 50 av. J.-C.) : il en existe actuellement une dizaine de manuscrits ; le plus ancien est postérieur de neuf cents ans à l’époque des événements.
Des parties de l’Histoire Romaine, de Tite-Live (écrit entre 59 av. J.-C et 17 apr. J.-C.) : elles ne nous sont préservées que dans une vingtaine de manuscrits ; un seul d’entre eux, composé uniquement de fragments, remonte jusqu’au quatrième siècle.
Les Histoires et les Annales de l’historien romain Tacite (écrits vers l’an 100) : ces textes ne sont préservés (partiellement) que dans deux manuscrits ; l’un date du neuvième siècle, l’autre du onzième.
L’Histoire, de Thucydide (460-400 av. J.-C.) : seuls huit manuscrits nous sont parvenus ; le plus ancien date des années 900 de notre ère. Quelques fragments de papyrus existent également ; ils datent du début de l’ère chrétienne.
Comparatif avec le Nouveau Testament
Pourtant, les historiens ne se sont jamais plaints de ne pas connaître de manière fiable ces auteurs importants. F. F. Bruce déclare :
Aucun helléniste ne songerait à mettre en doute l’authenticité d’Hérodote ou de Thucydide, sous prétexte que les plus anciens manuscrits valables de leurs œuvres ont été écrits plus de 1 300 ans après les originaux.
Aucun autre livre ancien ne rivalise avec la richesse des documents préservés pour le Nouveau Testament. Non seulement le nombre de manuscrits est remarquable, mais leur ancienneté l’est également. À titre d’exemple, le plus ancien fragment que nous possédons est un papyrus daté de l’an 130 environ et qui contient Jean 18.31-33,37s. L’un des plus anciens manuscrits du Nouveau Testament complet remonte aux environs de l’an 350 de notre ère. Il porte le nom de Codex Sinaiticus parce qu’il a été découvert dans un monastère sur le mont Sinaï.
Les conséquences d’un grand nombre de manuscrits
Le grand nombre de manuscrits du Nouveau Testament entraîne deux conséquences complémentaires. Premièrement, il existe de nombreuses variantes textuelles entre eux, du fait qu’ils étaient recopiés à la main et donc sujets à des erreurs de copie. Deuxièmement, ces variantes tendent à s’autocorriger étant donné que nous possédons un nombre considérable de manuscrits pour comparer. Donnons une nouvelle fois la parole à F. F. Bruce :
En fait, le grand nombre de manuscrits, en même temps qu’il accroît la possibilité d’erreurs de copie, accroît aussi, fort heureusement, la possibilité de corriger ces erreurs, si bien que la marge d’erreur dans le rétablissement des mots originaux est moins grande qu’on pourrait le craindre.
Cet article est tiré du livre : Une gloire particulière de John Piper