Le sabbat dans le Nouveau Testament (Kevin DeYoung)

Lorsque nous tournons notre attention vers le Nouveau Testament, il est important de remarquer que Jésus n’enfreint jamais le quatrième commandement. Rompre les traditions qui découlent du sabbat ne présente aucun problème pour lui, mais les conflits avec les scribes et les pharisiens ne portaient pas sur la légitimité du sabbat lui-même. 

Jésus a réinstauré le sabbat comme une journée pour faire le bien

Dans Marc 2, Jésus approuve que ses disciples affamés cueillent des épis, et il explique que le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat (v. 27). Dans Marc 3, Jésus guérit un homme ayant une main paralysée, et il explique que nous devons faire le bien le jour du sabbat. Dans Luc 13, Jésus guérit une femme sous l’emprise d’un esprit qui la rend infime, et il explique que le sabbat est un jour de liberté (v. 12). Dans Luc 14, Jésus guérit un homme souffrant d’œdèmes, et il explique que le sabbat est un jour de miséricorde.

À l’évidence, Jésus n’a pas hésité à éliminer certains des éléments qui alourdissaient le sabbat. Plus important encore, il a réinstauré le sabbat comme une journée pour faire le bien, et non pas seulement pour accomplir notre devoir rituel. Or, les auteurs des Évangiles s’efforcent de démontrer que Jésus n’a jamais enfreint le quatrième commandement (Mt 5.17,18). 

Paul a rétabli une bonne attitude envers le sabbat mosaïque

Jésus a refaçonné la conception juive du sabbat, mais Paul est allé encore plus loin en rétablissant une bonne attitude envers le sabbat mosaïque. Dans Romains14, Paul parle d’adiaphora dans l’Église, c’est-à-dire des problèmes sur lesquels les chrétiens peuvent accepter de ne pas être d’accord. Étonnamment, Paul inclut les jours saints juifs dans cette catégorie : 

Tel fait une distinction entre les jours, tel autre les estime tous égaux. Que chacun ait en son esprit une pleine conviction. Celui qui distingue entre les jours agit ainsi pour le Seigneur. Celui qui mange, c’est pour le Seigneur qu’il mange, car il rend grâces à Dieu; celui qui ne mange pas, c’est pour le Seigneur qu’il ne mange pas, et il rend grâces à Dieu (Ro 14.5,6).

Des désaccords entre les juifs et les non-juifs

Dans l’Église primitive, les juifs et les non-juifs devaient trouver un moyen de vivre ensemble. Il n’est pas étonnant qu’il y ait eu des désaccords au sujet de nombreux rituels juifs. Qu’en était-il des bonnes lois ? Et des jours saints ? Que devaient-ils faire des aspects du culte instauré du temps de Moïse ? Paul leur répond : 

« Ne vous jugez pas les uns les autres au sujet de ces choses. Christ a accompli certains aspects de la loi. Des personnes choisiront d’honorer des jours précis, et c’est bien. D’autres choisiront de ne pas honorer ces jours, et c’est bien aussi. » 

Paul exprime la même chose dans sa lettre aux Colossiens. Il parle des anciennes ordonnances qui ont été clouées à la croix. Il parle des aspects de la loi de Moïse qui ont été accomplis en Christ :

Que personne donc ne vous juge au sujet du manger ou du boire, ou au sujet d’une fête, d’une nouvelle lune, ou des sabbats : c’était l’ombre des choses à venir, mais le corps est en Christ (Col2.16,17). 

Comment comprenons-nous le quatrième commandement à la lumière des instructions de Paul ?

Je sais que certaines personnes essaient de défendre l’idée que les sabbats mentionnés dans Colossiens 2 sont des références à des célébrations mensuelles et non hebdomadaires. Néanmoins, les passages de l’Ancien Testament laissent entendre le contraire. Ce modèle triple constitué des fêtes, des nouvelles lunes et des sabbats, apparaît plusieurs fois dans les Écritures. On le retrouve dans le même ordre dans Ézéchiel 45 et dans Osée 2, et dans un ordre différent (mais avec les trois mêmes éléments) dans 2 Chroniques 8 et 31. Dans chacun de ces exemples, les trois éléments semblent être la version abrégée pour désigner les « jours saints annuels, jours saints mensuels et jour saint hebdomadaire ». Je ne sais pas comment donner un sens à ces trois éléments si les « sabbats » désignent autre chose que le septième jour du sabbat hebdomadaire.

Cela signifie qu’il doit exister un sens plus important et que le sabbat n’est plus obligatoire pour les chrétiens du Nouveau Testament.

Le respect du quatrième commandement

Toutefois, nous n’avons pas encore tout dit sur le respect du quatrième commandement. Dans le Nouveau Testament, il semble y avoir une tentative délibérée de considérer le jour du Seigneur comme un nouveau type de sabbat. Relisez, par exemple, le récit de la résurrection dans les Évangiles. Selon Jean 20, Luc 24 et Marc 16, la résurrection a eu lieu « un jour après le sabbat », que l’on traduit généralement par « le premier jour de la semaine ». Bien que cette dernière traduction soit exacte, le mot grec d’origine ne signifiait pas « premier », mais « un ». Il semblerait que l’Église primitive considérait déjà le dimanche comme le jour un suivant le sabbat. Ainsi, les chrétiens ont commencé à commémorer le huitième jour de la semaine, le jour de la recréation, le « jour un après le sabbat ». 

Cette proposition exégétique est clarifiée dans le reste du Nouveau Testament et développée plus en détail par l’Église primitive. Les passages d’Actes 20.7 et de 1 Corinthiens 16.1-2 parlent du rassemblement des disciples le premier jour de la semaine, tandis que dans Apocalypse 1.10, il y a une référence précise au jour du Seigneur. À partir de la seconde moitié du IIe siècle de l’Église primitive, le terme « jour du Seigneur » est manifestement employé pour désigner le dimanche. Justin Martyr (ou Justin de Naplouse), apologiste du IIe siècle, a déclaré que l’Église se réunissait pour le culte le dimanche, le premier jour de la semaine. La Didachè, un document de l’Église datant du début du IIe siècle, utilise l’expression « jour du Seigneur » pour désigner ce jour de culte collectif. À la fin du ier  siècle, Ignace, l’un des Pères de l’Église, a déclaré : « [Les chrétiens] n’observent plus le sabbat, mais orientent leur vie sur le jour du Seigneur, où notre vie est alors régénérée par sa vie et par sa mort. » 

Si on examine les quatre premiers siècles de l’Église, on s’aperçoit que l’observation du sabbat était spiritualisée pour représenter une vie de dévotion et d’humilité envers Dieu. S’acharner à observer strictement le septième jour était perçu comme une judaïsation. D’ailleurs, le concile de Laodicée (363) est allé jusqu’à affirmer que les chrétiens devraient travailler le septième jour et honorer plutôt le jour du Seigneur. Il y avait manifestement un changement en cours. Comme Benjamin B. Warfield l’a exprimé :

« Christ a emporté le sabbat avec lui dans la tombe, et il a apporté le jour du Seigneur avec lui, lorsqu’il est sorti du tombeau le matin de la résurrection. »

Synthèse

Alors, comment synthétiser tout cela ? Devons-nous, oui ou non, observer le quatrième commandement ? La réponse courte est « oui, mais ». Oui, nous devons l’observer. Il fait partie de la volonté morale de Dieu révélée pour tous. Mais la manière de l’observer a changé. 

Certains aspects du sabbat ont été abolis

Si on ne tient pas compte du contexte culturel et de la jurisprudence, le sens principal du sabbat mosaïque est que nous devons nous reposer de notre travail et faire confiance à Dieu. C’est le principe que nous voyons accompli en Christ. Jésus nous a montré le sens le plus complet et le plus profond du sabbat, à savoir que nous devons faire confiance à Dieu, car il est celui qui pourvoit, nous soutient, nous délivre et nous sauve. Les sanctions judiciaires et les lois protocolaires qui forçaient les gens à se reposer le samedi ont été effacées. 

Cela dit, je crois que les principes fondamentaux du repos du sabbat demeurent, car ils ont été rapidement associés au jour du Seigneur. Voici quelle était la position de Calvin dans son traité de l’Institution de la religion chrétienne

« Il est certain que ce qui était d’ordre cérémonial dans ce commandement a été aboli par l’avènement de Christ… D’où il découle que toute observation superstitieuse des jours doit être totalement rejetée par les chrétiens. » 

Observer le jour du Seigneur

Calvin poursuit en soulignant l’importance d’observer le jour du Seigneur, en maintenant qu’il a été institué pour remplacer le sabbat, et qu’il soutient les mêmes principes. On constate notamment que le jour du Seigneur est (1) un jour de rassemblement pour l’adoration et (2) un jour où l’on se repose de notre travail. Et plus important encore, le quatrième commandement nous pousse (3) à trouver notre repos spirituel en Christ chaque jour de la semaine. 


Cet article est tiré du livre : Les dix commandements de Kevin DeYoung