Les veuves, l’Église de Jérusalem et les diacres (Brian Croft)

La manifestation d’une compassion envers les pauvres, les veuves et les orphelins est, selon l’épître de Jacques, ce qui définit l’essence du véritable service chrétien. Il n’est pas le seul à affirmer une telle chose dans le Nouveau Testament. Dès les débuts de l’Église, les croyants étaient encouragés à prendre des dispositions spéciales envers les veuves (Ac 6.1-7). Lorsque Paul écrit à Timothée, qui se trouve alors à Éphèse – bien après les événements décrits dans le livre des Actes –, il inclut des instructions claires au sujet des veuves, encourageant les jeunes veuves à se remarier et les Églises à prendre soin de celles qui resteront seules (1 Ti 5.3-16). Puisque la loi de Moïse –telle qu’on la retrouve particulièrement dans les livres prophétiques – et les enseignements de Jésus sont remplis d’exemples où il est question de prendre soin des veuves, il serait alors surprenant que les écrits apostoliques n’en fassent pas mention.

Des tensions à l’Église de Jérusalem

Depuis les débuts de l’Église de Jérusalem, ses membres vivaient constamment de l’opposition et des persécutions. En grandissant, d’autres problèmes sont survenus au cœur même de l’Église, comme la découverte de l’hypocrisie d’Ananias et Saphira. L’importance des soins apportés aux veuves dans l’Église semble notamment liée à cet événement. En effet, selon Actes 4.34,35, les membres de l’Église ne manquaient de rien et certains avaient même vendu leurs terres ainsi que leur maison pour remettre le profit réalisé à l’Église. Une distribution avait ensuite été faite à chacun selon leurs besoins (Ac 4.35). Il est probable que cette distribution, tout comme la collecte dans 2 Corinthiens 8 – 9,  ait servi au soin des veuves.

Il y avait plusieurs tensions dans l’Église de Jérusalem dues, en partie, aux différences sociales et culturelles. D’un côté, il y avait les Juifs « purs », ceux qui parlaient en araméen et qui étaient profondément ancrés dans la culture juive. D’un autre côté, il y avait des Juifs hellénistiques qui avaient adopté les traditions et le langage grecs. Ces derniers ont commencé à murmurer et même peut-être à se plaindre des soins apportés à leurs veuves dans l’Église. En effet, plusieurs étaient convaincus qu’il y avait la présence d’une certaine partialité, surtout en ce qui avait trait à la distribution de nourriture.

Les circonstances ne sont pas claires. Luc ne mentionne aucune forme de partialité dans l’Église de Jérusalem. Il se peut que le traitement préférentiel n’ait pas été intentionnel. Il est également probable que la réaction des Juifs hellénistiques révèle plutôt les difficultés croissantes que représentait la responsabilité de prendre soin d’autant de veuves. Peu importe la raison derrière cette plainte, les apôtres ont réalisé qu’ils devaient agir afin d’éviter les divisions dans l’Église tout en s’assurant que chaque veuve allait recevoir ce dont elle avait besoin.

La nomination de diacres

En réalisant qu’il serait impossible pour eux d’assumer l’entière responsabilité du ministère envers les veuves tout en continuant de s’appliquer à la prière et au ministère de la Parole, les apôtres ont nommé sept hommes qui accompliraient le rôle de diacre. Ils étaient, bien entendu, qualifiés pour ce ministère. Ces hommes avaient un bon témoignage, et ils étaient remplis d’Esprit Saint et de sagesse (v. 3). Il existe plusieurs interprétations de ce passage, mais je suis persuadé que ces hommes ont été nommés en tant que diacres afin de refléter la compassion de Christ. Nous pouvons voir dans l’Ancien Testament combien la situation des veuves était importante aux yeux de Dieu. L’Église de Jérusalem n’a donc pas introduit un nouveau principe. En fait, elle a plutôt continué une pratique qui était déjà bien ancrée dans l’ancienne alliance.

Il est important, cependant, de réaliser que l’Église prenait tout de même soin des veuves avant la nomination des diacres (Ac 2.44,45). Toutefois, le rôle de ces hommes était de s’assurer que le ministère était exécuté pleinement et équitablement. Les Écritures commandent aux croyants de démontrer de la compassion envers les veuves et de prendre soin d’elles. Une veuve peut donc bibliquement s’attendre à ce que les membres de son Église locale lui rendent visite pour alléger sa solitude ou pour la réconforter. Ainsi, une veuve dans l’Église ne devrait, en aucun cas, être négligée et ignorée.

En prenant soin de ces veuves comme nous l’enseigne la Bible, nous les encourageons à demeurer auprès du peuple de Dieu et à mettre leurs dons au service de Christ. L’adoration, le ministère et la participation à la vie de l’Église demeurent des aspects centraux dans la volonté de Dieu pour les veuves malgré tous les changements que la mort d’un époux entraîne.

Le rôle des diacres aujourd’hui

Généralement, dans le monde occidental, l’État est celui qui a le devoir de prendre soin des veuves. Toutefois, ce n’est pas cette perspective que la Bible enseigne. Nous avons déjà établi que, selon la Parole, cela fait partie des tâches du croyant et que cela doit représenter bien plus qu’une simple action humanitaire. Il existe des raisons théologiques derrière l’importance de prendre soin des veuves, dont le fait que l’Église a été rachetée grâce au sacrifice de Christ. Il est descendu vers nous alors que nous avions désespérément besoin de lui en tant que pécheurs et, dans sa grâce, il nous a sauvés. Ainsi, les membres de l’Église ont le devoir de refléter cette facette miséricordieuse de Dieu en prenant soin de ceux qui sont dans le besoin, et ce, à commencer par les veuves.

Trop souvent, le rôle des diacres n’est pas compris de cette manière. Par contre, compte tenu de tout ce que nous avons dit dans ce texte, les diacres ne devraient-ils pas être perçus comme étant des représentants de Christ remplis de miséricorde et de compassion ? Les apôtres se sont souciés de tracer une ligne pour démarquer leurs priorités de celles des diacres. Cela ne signifie pas que les anciens ne devraient jamais faire le travail d’un diacre puisque cela voudrait dire qu’ils n’auraient pas à démontrer la compassion de Christ à ceux qui sont dans le besoin. Toutefois, cela signifie que cette responsabilité repose d’abord sur les diacres. Ceux-ci devraient être les premiers à visiter les veuves et à encourager les membres de l’Église à faire de même. Ils ne devraient pas s’attendre à ce que les anciens prennent l’initiative dans ce domaine.