L’utopie est-elle humaine ou divine? (Peter Jones)
J’ai étudié le phénomène récent du marxisme culturel, une idéologie qui semble séduire de plus en plus les personnes qui se trouvent dans les rangs des soi-disant « progressistes ». Tout le monde veut une vision optimiste sur la façon de fonctionner dans les affaires culturelles. C’est ce qu’ont fait Marx et Engels en observant les conditions sordides de la classe ouvrière du milieu du 19e siècle, notamment l’emploi injuste des enfants. Poussé à juste titre à rechercher la justice sociale, Marx, cependant, a cherché la sagesse non pas dans la Bible, mais dans la théorie séculière de Hegel. Selon cette théorie, l’histoire procède par un conflit inévitable sur des questions matérielles entre les oppresseurs (la bourgeoisie, les propriétaires avides de pouvoir possédant les moyens de production) et les opprimés (les travailleurs du prolétariat)1. Marx croyait avec optimisme qu’une révolution sanglante inévitable serait le prélude à l’établissement d’un communisme utopique : « à chacun selon ses besoins, de chacun selon ses moyens ».
Cela ressemble à Noël tous les jours, une utopie de justice et de plaisir sans fin. Pourquoi pas? « L’homme est l’être suprême », selon Marx, et donc capable de créer un paradis virtuel (une société sans classes) qui vaut la peine d’être réalisé coûte que coûte. Des êtres humains faillibles créeraient une belle société grâce à l’ingéniosité humaine. Hélas, dans l’histoire du marxisme, cette idée a coûté très cher. Si tous les moyens sont valables pour parvenir à des fins utopiques, comme le croient les marxistes, alors les néomarxistes, soucieux des moyens, peuvent immoralement « justifier » un système sans Dieu. C’est immoral parce que la nature pécheresse de l’homme est adorée et que toute notion de Dieu est éliminée. Selon Lénine, « l’athéisme fait naturellement et inséparablement partie du marxisme 2». Le marxisme n’a jamais fonctionné parce qu’il n’a jamais pris en compte le péché humain et parce qu’il a toujours exagéré la capacité de la nature humaine à faire le bien. On fait entièrement confiance dans des dirigeants humains faillibles et pécheurs qui ont le pouvoir de définir l’équité pour la société humaine. Inévitablement, ceux-ci utilisent ce pouvoir pour établir l’« équité » uniquement pour satisfaire leur propre bien-être matériel et leurs désirs égoïstes. Le marxisme a massacré des millions de malheureux qui ont refusé de se plier aux plans imparfaits, purement humains et utopiques de leurs dirigeants.
Rarement l’Amérique a vu un clivage plus net que celui que nous voyons aujourd’hui entre deux visions politiques fondamentales du monde, dont l’Église doit parler avec une clarté scripturaire. Dans le domaine politique, il y a le choix entre deux possibilités, le libéralisme ou le communisme.
- Le libéralisme, dans ce contexte, signifie le respect des libertés individuelles, y compris le droit à la propriété privée. Les citoyens sont soumis à l’État de droit, qui est placé sous une autorité supérieure : la constitution. Cependant, cette constitution maintient les droits et s’appuie sur les droits donnés par la plus haute autorité : le Dieu Créateur qui est la source de ces droits, qui sont une partie essentielle de la révélation biblique.
- Le communisme utilise le contrôle de la culture par le gouvernement ou par le parti pour posséder tous les biens et répartir tous les bénéfices de manière égale pour le bien de tous. Les droits individuels doivent être ignorés dans la mesure où ils entravent le travail des dirigeants du gouvernement. L’annulation de la culture devient donc la norme.
Ces deux systèmes politiques sont radicalement opposés, et les progressistes démocrates actuels choisissent le marxisme. Dieu disparaît de leur discours et de leurs programmes. Ces choix politiques nous rappellent, à leur manière limitée, les deux possibilités ultimes dont Paul a parlé dans Romains 1.25 : soit le monisme, qui est l’adoration de la création (y compris des êtres humains créés) ou la binarité, qui est l’adoration du Créateur. Le choix entre ces deux visions du monde — les deux seules disponibles — constitue le choix ultime auquel tout être humain est confronté.
Au moment de célébrer Noël, notamment, nous sommes frappés par l’Évangile du Créateur omniscient, qui est devenu notre Rédempteur en la personne de Jésus-Christ, le Fils de Dieu. La condescendance de Dieu, qui s’est abaissé au niveau de ses créatures par amour pour nous, établit un modèle d’utopie fondé non pas sur l’égoïsme et l’ignorance de l’homme, mais sur l’amour désintéressé du Dieu omniscient à l’égard de sa créature. On peut faire entièrement confiance à cette révélation éminemment personnelle qui nous fait connaître ce qui est bon, tant dans cette vie que dans la vie à venir. Comme je l’ai écrit il y a quelques Noëls :
« Le cadeau de Noël ultime est l’idée inimaginable que Dieu se donne lui-même. Paul, presque à court de mots, dit : “Que dirons-nous donc à ce sujet?” Mais l’apôtre inspiré sait ce qu’il faut dire. “Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?” Il sait que c’est le don le plus étonnant qu’on puisse imaginer. Vous pouvez imaginer la main de Paul trembler lorsqu’il écrit : “Lui qui n’a pas épargné son propre Fils, mais qui l’a livré pour nous tous, comment ne nous donnera-t-il pas aussi tout avec lui, par grâce?” » (Rm 8.31-32).
Nous avons déjà là un goût d’utopie dans cette vie et la promesse d’une utopie sans fin dans la vie à venir.
Notes
2. Lénine, Religion, Introduction.
Peter Jones, professeur de théologie
Traduit de « Utopia : Human or Divine? », Truthxchange, 18 décembre 2020.
L’auteur est directeur du ministère Truthxchange, conférencier international et professeur de Nouveau Testament à la Faculté de théologie de Westminster, Californie, États-Unis.
2020. Utilisé avec permission. Cet article est sous licence Creative Commons.
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