Ne perdons pas courage si nous ne sommes pas certains de notre élection (Paulin Bédard)
Ceux qui ne sentent pas encore efficacement en eux une vive foi en Jésus-Christ, ou une confiance certaine du cœur, une paix de la conscience, un soin et souci d’une obéissance filiale, et une glorification en Dieu par Jésus-Christ, mais qui néanmoins se servent des moyens par lesquels Dieu a promis d’effectuer ces choses en nous : ceux-là ne doivent pas perdre courage quand ils entendent parler de la réprobation, ni se mettre au rang des réprouvés. Au contraire, ils doivent persévérer soigneusement dans l’usage de ces moyens, désirer ardemment l’heure d’une grâce plus abondante, et l’attendre en toute révérence et humilité.
Beaucoup moins encore doivent être épouvantés par la doctrine de la réprobation ceux qui, bien qu’ils désirent sérieusement se convertir à Dieu, lui plaire uniquement, et être délivrés de ce corps de mort, ne peuvent toutefois encore parvenir aussi avant qu’ils voudraient dans le chemin de la piété et de la foi, puisque Dieu, qui est miséricordieux, a promis qu’il n’éteindra point le lumignon qui fume, ni ne brisera le roseau cassé.
Mais cette doctrine est à bon droit en effroi à ceux qui, ayant mis en oubli Dieu et le Sauveur Jésus-Christ, se sont entièrement asservis aux sollicitudes de ce monde et aux convoitises de la chair, aussi longtemps qu’ils ne se convertissent point à Dieu.
— Canons de Dordrecht, article I.16
La doctrine de la réprobation ne nous est pas révélée pour ternir notre joie, au contraire, mais il peut arriver qu’elle nous rende très mal à l’aise. Se pourrait-il que Dieu ne m’ait pas choisi ? Il y a des gens qui sont extrêmement troublés par une telle idée. Les enfants de Dieu peuvent avoir des craintes dans leur cœur. L’article I.16 répond de façon très pastorale pour encourager ceux qui ont des doutes quant à leur élection. Il s’adresse à trois différents types de personnes.
Ceux qui ne discernent pas encore clairement les fruits de leur élection
Cette catégorie de personnes n’a pas encore une ferme conviction dans la foi. « Ils ne sentent pas encore efficacement en eux une vive foi en Jésus-Christ, ou une confiance certaine du cœur, une paix de la conscience, un soin et souci d’une obéissance filiale, et une glorification en Dieu par Jésus-Christ, mais néanmoins se servent des moyens par lesquels Dieu a promis d’effectuer ces choses en nous » (I.16). Ils sont faibles dans la foi, mais ils écoutent la Parole de Dieu, ils prient, ils participent aux sacrements. Ils veulent servir le Seigneur, mais ils ne sont pas certains de leur élection. Quand ils regardent à eux-mêmes, ils ne voient pas une foi ferme et solide. Ils se rendent compte que leur vie n’est pas assez à l’honneur de Dieu. Le doute et l’inquiétude surgissent alors dans leur esprit : suis-je vraiment un élu ? Ou suis-je un réprouvé ? « Ceux-là ne doivent pas perdre courage quand ils entendent parler de la réprobation ni se mettre au rang des réprouvés. Au contraire, ils doivent persévérer soigneusement dans l’usage de ces moyens, désirer ardemment l’heure d’une grâce plus abondante, et l’attendre en toute révérence et humilité » (I.16).
« Les choses cachées sont à l’Éternel, notre Dieu ; les choses révélées sont à nous et à nos enfants, à perpétuité, afin que nous mettions en pratique toutes les paroles de cette loi » (De 29.29).
Dieu ne nous appelle pas à fouiller ses secrets éternels pour savoir si nous serions « non élus ». Il nous dit clairement ce qu’il faut faire : « Crois au Seigneur Jésus, et tu seras sauvé » (Ac 16.31). Cette doctrine n’a pas pour but de décourager ceux qui ne ressentent pas l’assurance de la foi, mais de les encourager à marcher sur la bonne route.
Le Saint-Esprit se plaît à utiliser des moyens pour nous fortifier dans la foi
« La foi vient de ce qu’on entend et ce qu’on entend vient de la parole de Christ » (Ro 10.17).
Nous avons besoin de nous mettre à l’écoute de la Parole de Dieu, chercher notre réconfort dans ses promesses, croire en Jésus-Christ, chercher en lui notre vie, mettre en pratique sa Parole. C’est ainsi que nous serons fortifiés dans la foi. « Mais celui qui aura plongé les regards dans la loi parfaite, la loi de la liberté, et qui aura persévéré, n’étant pas un auditeur oublieux, mais se mettant à l’œuvre, celui-là sera heureux dans son activité » (Ja 1.25).
Un arbre fruitier a besoin de temps pour grandir et porter du fruit
Jésus et les apôtres ont comparé la vie chrétienne à un arbre qui porte du fruit (Jn 15.1-8 ; Ga 5.22,23). Quand on vient à la foi, on ne peut pas porter du fruit instantanément ; il faut du temps. Certains arbres prennent plus de temps pour parvenir à maturité, de même les croyants parviennent à maturité spirituelle à des moments différents de leur vie. La croissance dans la foi est un processus qui a besoin d’être nourri et cultivé. Continuons donc à nous mettre à l’écoute de sa Parole. En son temps, Dieu nous fera grandir pour nous faire porter plus de fruit.
Ceux qui ne sont pas encore parvenus au degré de foi désiré
Le deuxième groupe de personnes, ce sont « ceux qui, bien qu’ils désirent sérieusement se convertir à Dieu, lui plaire uniquement, et être délivrés de ce corps de mort, ne peuvent toutefois encore parvenir aussi avant qu’ils voudraient dans le chemin de la piété et de la foi » (I.16). Ils luttent dans leur vie chrétienne à cause de leur manque d’obéissance, leur manque de zèle, leur manque de piété, leur manque de sainteté. Il est facile de s’identifier à cette catégorie. Tous les jours, nous luttons contre le péché, un excès de colère, une convoitise, des paroles blessantes, un désir de voler. Nous devenons découragés de constater que nous retombons toujours dans les mêmes péchés. Il y a tellement de péchés dans nos vies et tellement peu de victoires qu’on peut en venir à se demander : suis-je vraiment un élu ? Le doute finit par s’installer.
Au fond, notre combat ressemble à celui de l’apôtre Paul. Il avait un cœur nouveau, transformé par le Saint-Esprit, et pourtant il disait :
« Je suis charnel, vendu au péché. […] Ce qui est bon, je le sais, n’habite pas en moi, c’est-à-dire dans ma chair: j’ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas » (Ro 7.14,18,19).
Paul était très dérangé par le fait qu’il n’avait pas la victoire sur le péché. Il reconnaissait le combat qui faisait rage en lui et criait son désespoir : « Qui me délivrera de ce corps de mort ? » Il connaissait toutefois la réponse : « Grâces soient rendues à Dieu par Jésus-Christ notre Seigneur ! » (Ro 7.24,25.)
La rédemption se trouve dans le sang de Jésus
Le Seigneur pardonne nos péchés par son sang et nous promet de nous transformer par son Esprit. Suis-je un réprouvé ? Je sais que mes péchés sont encore nombreux. Mais Dieu agit en moi pour produire une tristesse qui mène à la repentance ainsi qu’un désir de justice. C’est là un fruit de l’élection ! Dieu est fidèle ! Il va achever ce qu’il a commencé ! Nous avons donc cet encouragement. « Beaucoup moins encore doivent être épouvantés par la doctrine de la réprobation, […] puisque Dieu, qui est miséricordieux, a promis qu’il n’éteindra point le lumignon qui fume ni ne brisera le roseau cassé (És 42.3) » (I.16).
Il nous arrive de fixer notre attention sur nos imperfections et d’oublier de regarder à Jésus. La Parole de Dieu donne beaucoup d’encouragement à nous tous qui sommes faibles dans la foi. « L’Éternel, l’Éternel, Dieu miséricordieux et compatissant, lent à la colère, riche en bonté et en fidélité » (Ex 34.6). Ne regardons pas à notre force, mais à sa force, non pas à notre infidélité, mais à sa fidélité.
Gardons précieusement la promesse de Jésus :
« Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos. Prenez mon joug sur vous et recevez mes instructions, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour vos âmes » (Mt 11.28,29).
Écoutons sa Parole qui nous exhorte tendrement, mais fermement à nous tourner vers Jésus.
Ceux qui se moquent de Dieu et qui vivent dans le péché
Le troisième groupe de personnes est celui qui refuse de se convertir et qui s’abandonne à la façon de vivre de ce monde et aux plaisirs de la chair. « Mais cette doctrine est à bon droit en effroi à ceux qui, ayant mis en oubli Dieu et le Sauveur Jésus-Christ, se sont entièrement asservis aux sollicitudes de ce monde et aux convoitises de la chair, aussi longtemps qu’ils ne se convertissent point à Dieu » (I.16). Ceux-là devraient sérieusement s’inquiéter ! La doctrine de la réprobation est terrible pour ceux qui refusent de se convertir. Ces gens devraient réfléchir très sérieusement au fait que Dieu ne laisse pas le péché impuni. Il peut laisser les gens dans leurs péchés. Il peut les endurcir dans leur incrédulité et leur faire payer le salaire qu’ils méritent dans l’enfer éternel.
« Cette doctrine est à bon droit en effroi. » C’est un avertissement et un appel à se repentir pendant que Dieu en donne encore l’occasion. Une telle repentance est nécessaire, car « c’est terrible de tomber dans les mains du Dieu vivant ! » (Hé 10.31.) Il arrive souvent que cet enseignement, par la grâce de Dieu, saisisse une personne et lui fasse voir la gravité de sa condition pour l’amener ensuite à se convertir. Remarquons bien que ceux qui refusent encore de se convertir ne sont pas appelés des réprouvés. Nous ne devrions jamais conclure une telle chose de qui que ce soit. Tant qu’une personne respire, nous devrions l’appeler à la repentance et à la foi.
Le devoir de l’Église de prêcher la doctrine de la réprobation
L’Église a la responsabilité de prêcher et « d’annoncer tout le conseil de Dieu » (Ac 20.27), et cela inclut la doctrine de la réprobation. Nous ne devrions pas hésiter à l’enseigner. Il ne nous est toutefois pas permis de penser que telle personne est réprouvée, car Dieu ne nous l’a pas révélé. La doctrine de la réprobation nous enseigne à craindre Dieu et à « mettre en œuvre notre salut avec crainte et tremblement » (Ph 2.12). Car Dieu est un feu dévorant. C’est une chose terrible de vivre dans l’Église, d’écouter la Parole de Dieu et d’avoir encore l’audace de vivre dans le péché !
Cette doctrine nous encourage à utiliser avec diligence les moyens que Dieu nous a donnés pour vivre et grandir dans la foi. Elle nous pousse à trouver notre unique assurance en Jésus-Christ. Même si nos péchés sont encore nombreux, ce n’est pas une raison de désespérer. La tristesse à cause de nos péchés est une œuvre de l’Esprit et un fruit de notre élection. Dieu n’a pas fini son œuvre dans nos vies ! Il ne va pas laisser tomber ce qu’il a commencé. Nous pouvons dire avec joie et avec confiance :
« Je suis persuadé que celui qui a commencé en vous cette bonne œuvre la rendra parfaite pour le jour de Jésus-Christ » (Ph 1.6).
Cet article est tiré du livre : Le solide fondement du salut de Paulin Bédard