Nos vies dans la sienne (Joe Rigney)
Cet article fait partie de la série : Desiring God sur la justification par la foi.
Comment la justification conduit à la sainteté
Notre bonne position devant Dieu dépend-elle de notre capacité à devenir plus semblable à Jésus, ou notre capacité à devenir plus semblable à Jésus découle-t-elle de notre bonne position devant Dieu ? J’ai commencé à me débattre avec cette question il y a vingt ans, alors que j’étais étudiant.
La Bible utilise toute une série de termes pour désigner ce que Dieu a fait pour nous en Christ – salut, régénération, justification, sanctification, adoption, élection, rédemption, glorification. La question à laquelle je me suis efforcé de répondre était la suivante : comment tous ces termes sont-ils liés les uns aux autres ? Plus spécifiquement et personnellement, quand, comment et dans quel ordre se produiront-ils pour moi ?
Historiquement, ma question portait sur la relation entre la justification (être déclaré juste devant Dieu) et la sanctification (le travail progressif continu par lequel nous sommes rendus conformes à l’image de Jésus). La justification précédait-elle et donnait-elle lieu à la sanctification ? Ou la justification était-elle d’une certaine manière basée sur ma sanctification ?
La résurrection et la rédemption
Romains 8.29-30 donne souvent le ton du débat :
En effet, ceux qu’il a connus d’avance, il les a aussi prédestinés à devenir conformes à l’image de son Fils, afin que celui-ci soit le premier-né d’un grand nombre de frères. Ceux qu’il a prédestinés, il les a aussi appelés; ceux qu’il a appelés, il les a aussi justifiés ; et ceux qu’il a justifiés, il leur a aussi accordé la gloire.
Nous avons ici un ordre de base : connu d’avance, prédestiné, appelé, justifié, glorifié. La question était de savoir comment les autres réalités du salut – sauvés, rachetés, adoptés, et sanctifiés – s’intègrent dans le tableau.
Alors que je me débattais avec cette question, je suis tombé sur un livre qui s’est avéré être un déclic pour moi : Resurrection and Redemption de Richard Gaffin (trad. « La résurrection et la rédemption »), professeur de longue date au Westminster Theological Seminary. Ce livre est petit – environ 150 pages – mais il a un impact théologique considérable. La thèse de base du livre m’a été d’une grande utilité pour réfléchir à la manière de rassembler les différents fils bibliques sur tout ce que Dieu a fait pour nous en Christ.
Nous serons ressuscités
Le livre commence par affirmer que l’unité de la résurrection de Christ et de la résurrection des croyants traverse le Nouveau Testament, en citant des textes comme ceux-ci :
1 Corinthiens 15.20 : « Mais en réalité, Christ est ressuscité, précédant ainsi ceux qui sont morts. »
Colossiens 1.18 : « [Christ] est la tête du corps qu’est l’Église; il est le commencement, le premier-né d’entre les morts, afin d’être en tout le premier. »
1 Corinthiens 15.16-18 : « En effet, si les morts ne ressuscitent pas, Christ non plus n’est pas ressuscité. Or, si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est inutile, vous êtes encore dans vos péchés, et par conséquent ceux qui sont morts en Christ sont aussi perdus. »
2 Corinthiens 4.14 : « Nous savons en effet que celui qui a ressuscité le Seigneur Jésus nous ressuscitera aussi par Jésus. »
Chacun de ces passages exprime la réalité que la résurrection de Christ est à la fois unique et nécessairement liée à notre résurrection future. Il est les prémices, le premier-né d’entre les morts. Il est le pionnier, l’inaugurateur, le précurseur qui ouvre la voie.
Nous sommes ressuscités
Cette unité, cependant, n’est pas simplement un lien entre la résurrection passée de Christ et notre résurrection future. Le Nouveau Testament souligne également que nous avons déjà été, en quelque sorte, ressuscités avec le Christ.
Éphésiens 2.5-6 : « Nous qui étions morts en raison de nos fautes, il nous a rendus à la vie avec Christ – c’est par grâce que vous êtes sauvés –, il nous a ressuscités et fait asseoir avec lui dans les lieux célestes, en Jésus-Christ.. »
Colossiens 2.12-13 : « Vous avez en effet été ensevelis avec lui par le baptême et vous êtes aussi ressuscités en lui et avec lui, par la foi en la puissance du Dieu qui l’a ressuscité. Vous qui étiez morts en raison de vos fautes et de l’incirconcision de votre corps, il vous a rendus à la vie avec lui. Il nous a pardonné toutes nos fautes. »
Romains 6.3-4 : « Ignorez-vous que nous tous qui avons été baptisés en Jésus-Christ, c’est en sa mort que nous avons été baptisés ? Par le baptême en sa mort nous avons donc été ensevelis avec lui afin que, comme Christ est ressuscité par la gloire du Père, de même nous aussi nous menions une vie nouvelle. »
Ces passages enseignent que nous sommes unis à Christ non seulement dans sa résurrection, mais aussi dans l’ensemble de sa vie et de sa mort. Nous sommes morts avec Christ. Nous avons été crucifiés avec Christ. Nous sommes ressuscités avec Christ. Nous avons été assis avec Christ.
De tels passages permettent à Gaffin de conclure que cette union existentielle avec Christ est l’élément le plus fondamental de l’enseignement de Paul sur le salut.
L’homme intérieur et l’homme extérieur
L’union personnelle et existentielle entre nous et Christ est étroitement liée au fait d’avoir été choisi en Christ avant la fondation du monde et d’être en quelque sorte « en Christ » lorsqu’il a été crucifié, enseveli et ressuscité au premier siècle. En d’autres termes, si nous pouvons faire la distinction entre la rédemption planifiée (dans l’éternité passée), la rédemption accomplie (dans l’histoire, il y a deux mille ans) et la rédemption appliquée (dans nos vies individuelles), nous ne pouvons jamais les séparer, puisque toutes ont lieu « en Christ ».
Gaffin attire l’attention sur la dimension déjà-pas-encore de la rédemption appliquée. L’événement unique de la résurrection de Christ se traduit en de multiples événements dans la vie du croyant. Nous sommes déjà ressuscités avec Christ (Éphésiens 2.5), mais nous ne sommes pas encore ressuscités avec Christ (1 Corinthiens 15.12-20).
Gaffin utilise la distinction faite par Paul entre l’homme intérieur et l’homme extérieur pour illustrer ce point. Nous avons été ressuscités dans l’homme intérieur, tandis que nous attendons la résurrection de l’homme extérieur – c’est-à-dire la résurrection du corps lors de la seconde venue de Christ. Paul le dit explicitement dans 2 Corinthiens 4.16 : « Et même si notre homme extérieur se détruit, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. »
Quel est donc le rapport avec l’ordre du salut et les différents termes utilisés pour décrire ce que Dieu a fait pour nous en Christ ? Permettez-moi d’essayer d’exprimer ces leçons avec mes propres mots.
Cinq aperçus d’une seule réalité
Lorsque Dieu nous sauve, la chose fondamentale qu’il fait est de nous unir à Christ par la foi.
L’union avec le Seigneur Jésus crucifié et ressuscité est ce qu’est fondamentalement le salut. Mais pour nous aider à comprendre la merveille et la gloire de notre union avec Christ, Dieu nous donne de multiples mots-images ou métaphores pour révéler la signification de ce que Christ a fait pour nous. Chacun de ces mots ou images nous permet de comprendre le fait incompréhensible de notre union avec le Seigneur Jésus.
§ Nous pouvons décrire l’union avec Christ en termes de tribunal, dans lequel des mots tels que culpabilité et condamnation, justice et justification figurent de manière proéminente.
§ Nous pouvons déballer l’union avec Christ en utilisant l’imagerie du temple, dans laquelle la sainteté et l’impureté, la sanctification et la purification sont utilisées.
§ Nous pouvons déballer l’union avec Christ en utilisant l’imagerie familiale, le langage de la nouvelle naissance et de l’adoption occupant une place centrale.
§ Nous pouvons déballer l’union avec Christ en utilisant l’image de l’esclavage et de la rédemption, avec des mentions de servitude et de captivité, de rachat et de liberté.
§ Nous pouvons décrire l’union avec Christ en utilisant le langage du salut et de la délivrance, du danger et du sauvetage par un Sauveur.
Plutôt que d’essayer de placer les différents termes dans l’ordre exact, nous pouvons au contraire les considérer comme des moyens multiples que Dieu a choisis pour révéler la grandeur et la gloire de ce qu’il a fait pour nous.
Cinq images du déjà-pas-encore
De plus, en raison de la dimension « déjà pas encore » de notre salut, nous pouvons voir que chacune de ces images contient trois phases distinctes : une phase positionnelle définitive, une phase progressive continue, et une phase finale culminante. Si nous parcourons à nouveau ces images, nous pourrions dire ce qui suit :
En termes de tribunal, nous sommes coupables et condamnés, mais Christ vit, meurt et ressuscite en notre faveur, et Dieu nous déclare donc justes en lui. Ceci est définitif et concerne une nouvelle position et un nouveau statut juridique basé sur l’œuvre achevée de Christ. En conséquence, nous quittons la salle d’audience et cherchons à mener une vie droite et pieuse, en marchant dans la justice devant Dieu, en attendant le jour où nous serons publiquement justifiés en tant que son peuple, lorsqu’il nous ressuscitera corporellement d’entre les morts.
En termes de temple, Dieu est saint et, par conséquent, il purifie ce qui est impur et met à part ce qui est commun pour un usage saint. Il y a une œuvre décisive de purification et de sanctification lorsque nous nous confions à Christ (positionnelle), et ensuite le reste de notre vie est une tentative de vivre des vies saintes, de plus en plus et progressivement séparées du péché et du mal, tandis que nous attendons notre purification complète et finale dans les nouveaux cieux et la nouvelle terre.
En termes de famille, Dieu nous fait naître de nouveau de manière décisive, et nous cherchons ensuite à marcher fidèlement comme ses enfants. Ou bien, il nous adopte dans sa famille (c’est la conversion), et nous marchons maintenant comme des fils obéissants, en attendant la déclaration finale de notre filiation et de notre conformité à l’image de son Fils lorsque nous serons glorifiés.
En termes d’esclavage et de rédemption, nous étions asservis au péché et à la mort, et Dieu nous libère de manière décisive lorsqu’il nous unit à son Fils. Dès lors, nous cherchons à vivre de plus en plus et progressivement en hommes libres, puisque c’est pour la liberté que Christ nous a libérés, dans l’attente de la rédemption de nos corps au dernier jour.
En termes de danger et de sauvetage, Dieu nous délivre de la peine du péché (la mort), puis tout au long de notre vie, il nous sauve de plus en plus de la puissance du péché, en attendant le jour où nous serons complètement délivrés de la présence du péché dans son royaume éternel.
Pour moi et pour me rendre conforme
« La résurrection et la rédemption » a marqué un tournant décisif pour moi, car ce livre a résolu la question de savoir si ma bonne position devant Dieu (la justification) dépendait de ma conformité croissante à Jésus (la sanctification progressive).
Gaffin m’a assuré, avec l’Écriture, que ma position devant Dieu – qu’il s’agisse du tribunal, du temple ou de la famille – était réglée de manière décisive et définitive, simplement en me confiant à Jésus. La justification se fait par la foi seule, parce que la foi m’unit à Christ, qui est ma justice. La justice qui sous-tend ma justification n’est pas quelque chose d’opéré en moi par Dieu, mais quelque chose d’accompli pour moi – en dehors de moi – par Christ. L’union avec lui – sa vie, sa mort et sa résurrection – me met en règle avec Dieu, de sorte que Dieu est entièrement pour moi.
Ensuite, à partir de ce nouveau statut et de cette nouvelle position devant Dieu, Dieu commence à me rendre progressivement et de plus en plus conforme à l’image de Jésus. Le travail est souvent lent, souvent douloureux. Le péché demeure, même si le salaire du péché ne pèse plus sur moi. Mais ma quête de sainteté et d’obéissance à Dieu est enracinée dans l’œuvre achevée de Jésus, à la fois dans l’histoire et dans ma vie, et j’espère le jour prochain où Dieu me ressuscitera d’entre les morts et montrera publiquement ce qu’il a fait pour moi et en moi.
Cet article est une traduction de l’article anglais « Our Lives in His » du ministère Desiring God par Timothée Davi.