Pourquoi vous avez besoin de la foi pour voir la gloire de Dieu (Tony Reinke)

Le plus grand spectacle au monde

Au sein de ce monde amateur de spectacles, avec tous ses créateurs de spectacles et son industrie du spectacle, s’est produit le plus grand spectacle jamais conçu dans le plan de Dieu et opéré dans l’histoire du monde : la croix de Christ. C’est la charnière de l’Histoire, le point de contact entre avant et après Jésus-Christ, où tous les temps entrent en collision, où tous les spectacles humains en rencontrent un divin et cosmique jamais égalé.

L’acte de crucifixion, répété des milliers de fois dans l’Empire romain, était un spectacle qui attirait immanquablement l’attention. Clouer des corps vivants à des arbres le long des voies publiques était un sport sanglant que les Romains affichaient pour les masses – une pratique publique et visible, non confinée à l’arène. Symboliquement, la crucifixion était le bras fléchissant du pouvoir dirigeant romain devant un public ébahi. Le châtiment était si ignoble que les Romains, eux, ne pouvaient être condamnés à la crucifixion. La croix était réservée à la déshumanisation publique des esclaves rebelles ; une forme d’intimidation visant à brimer, intimider et discipliner la vaste classe servile de Rome1.

Le but de la crucifixion n’était rien de moins que l’« élimination des victimes de toute considération en tant que membres de la race humaine », une « extermination ritualisée » de contrevenants inaptes à vivre2. C’était un jeu de rôle, affirme un théologien : « Les moqueries et les railleries qui accompagnaient la crucifixion étaient non seulement autorisées, mais elles faisaient partie du spectacle et étaient programmées3. »

La crucifixion impliquait une participation masochiste. « Tout le monde comprenait que le rôle spécifique des passants était d’exacerber la dégradation de la personne qui avait été ainsi désignée pour être le spectacle. La crucifixion était habilement destinée – nous pourrions même dire diaboliquement destinée – à être une représentation presque théâtrale des impulsions sadiques et inhumaines qui reposent en chaque être humain4. »

Comme il est écrit dans l’Évangile selon Luc : « Et tous ceux qui assistaient en foule à ce spectacle… » (Lu 23.48a). Les Écritures avaient présagé que le Christ verrait les gens l’observer, le regarder (voir Ps 22.18b). Cette mise en scène théâtrale du sadisme présent dans le cœur humain a attiré de grandes foules. Et ils ont vu un spectacle ! Un homme ridiculisé, méprisé, battu, ensanglanté et pendu au bois. Cependant, ils ont également vu la création frémir. La terre a tremblé, le rideau du temple s’est fendu de haut en bas, le soleil de midi s’est éclipsé pendant trois heures, les tombeaux se sont ouverts et les cadavres de nombreux chrétiens sont revenus à la vie.

De la mort à la vie

La mort de Jésus-Christ n’a pas été qu’un spectacle de crucifixion de plus ; elle a été le summum de tous les spectacles de crucifixion. Pour les Romains, « chaque croix était un trône pour ridiculiser les rebelles », mais d’après les Écritures, la croix de Christ « a été la parodie d’un couronnement et d’une intronisation5 ». La croix de Christ a été le plus grand spectacle de l’histoire cosmique en raison de ce qu’elle a ironiquement renversé. Là, sur le mont du Calvaire, Christ « a dépouillé les dominations et les autorités », et dans sa victoire, il « les a livrées publiquement en spectacle, en triomphant d’elles par la croix » (Col 2.15). Mourir pendu à du bois signifiait mourir sous la malédiction de Dieu, mais en étant pendu au bois de la croix, Christ est devenu malédiction pour nous6.

Par une opération de grande envergure, nous pourrions crucifier à nouveau chacun des dizaines de milliers de prisonniers, esclaves et ennemis vaincus dans l’histoire romaine, ou du moins recréer la scène au moyen de la technologie CGI* ; ce Roi crucifié n’en demeurerait pas moins le plus grand spectacle.


La mort de Jésus-Christ n’était pas un spectacle de crucifixion comme les autres ; c’était le summum de tous les spectacles de crucifixion.


À partir de ce moment-là, Dieu a voulu que chaque regard humain soit centré sur cet instant crucial. On aurait pu croire qu’il disait : « Voici mon Fils bien-aimé, crucifié pour vous, un spectacle qui capturera votre cœur à jamais ! » Ou, comme l’a exprimé Augustin à l’époque des spectacles romains : « Ne pensez pas, frères, que notre Seigneur Dieu nous a écartés de tout spectacle. » Non, car il n’y a rien à voir dans le monde de plus grand que ceci : « le lion vaincu par le sang de l’Agneau7 ». Par décret divin, les chrétiens sont amateurs de représentations, et nous donnons nos vies entières à ce grand spectacle, aujourd’hui passé et invisible.

Par la foi, ce spectacle ultime est maintenant la vie que je mène. Le spectacle suprême de la croix crée une collision cosmique avec ceux de ce monde, et nous nous trouvons juste au milieu. J’ai maintenant été crucifié pour le monde, et le monde a été crucifié pour moi8. Notre réponse au spectacle ultime de la croix du Christ nous définit.

Selon la façon dont vous voyez les choses, la croix représente l’un ou l’autre de ces spectacles : la moquerie d’un faux souverain ou le couronnement du vrai Roi de l’univers. La croix a été, soit un malentendu tragique et le meurtre impitoyable d’un homme innocent, soit un spectacle planifié et orchestré par Dieu dans le but de montrer au monde une beauté inégalée.

Le spectacle du Christ ne peut être compris qu’à travers la conversion, quand je regarde ma vie passée et que je vois mes péchés perforer le corps ensanglanté de Christ. J’ai transpercé le corps de celui qui m’aime9. Aux yeux non déchus – et à ceux rachetés –, la croix a été un spectacle avec lequel ce monde n’a jamais rivalisé et ne rivalisera jamais, que ce soit en importance, en signification ou en gloire.

Le moment décisif de l’histoire

Il est donc tout à fait approprié que le théologien John Murray désigne la croix comme la « scène la plus solennelle de toute l’Histoire, sans égale et unique, qu’il est impossible de jamais répéter10 ». Comme le serpent venimeux moulé en bronze et élevé en tant que spectacle pour guérir des milliers de corps empoisonnés, le corps brisé de Christ a été élevé sur une croix romaine comme spectacle de guérison pour réveiller des millions d’âmes pécheresses11. Le corps de Christ élevé sur la croix à Golgotha représentait le summum du spectacle qu’aucun autre dans l’Histoire du monde ne pourra jamais atteindre, le spectacle prééminent de la vie et de l’amour de Dieu, gratuitement offert à un monde bouche bée.

L’axe de la croix marque le tournant du plan de Dieu pour cet univers12. La croix pointe dans quatre directions avec ce spectacle qui réunit les cieux, la terre, toutes les nations à sa gauche et chacune d’elles à sa droite. Rejeté par la terre, abandonné du ciel, la traverse de la croix a maintenu les bras du Seigneur grand ouverts. Sur cette croix, la colère et la compassion divines se rencontrent. Plus expressive encore que le déluge, la croix de Christ a été la démonstration publique de la juste colère de Dieu devant des milliards de péchés, jusque-là impunis mais désormais jugés par la pleine manifestation de son courroux, visible dans l’histoire de l’humanité13.À la lumière de ce suprême spectacle, Charles Spurgeon a demandé de façon rhétorique : « Y a-t-il jamais eu pareille image que celle dessinée par Dieu avec le crayon de l’amour éternel, plongé dans la couleur de la colère du Tout-Puissant sur le mont du Calvaire14 ? » Réponse : non. Ce fardeau de colère porté par le Christ, invisible à l’œil nu, est le spectacle le plus authentique, un moment culminant dans l’histoire trinitaire, celui où la coupe pleine de la colère de Dieu a été remise au Fils pour qu’il la boive jusqu’à la lie15. Celui qui ne connaissait pas le péché est devenu péché, notre péché, et a incarné toute l’impiété de nos iniquités16.

Notes :

1 Martin Hengel, La Crucifixion dans l’Antiquité et la folie du message de la croix, Paris, Les Éditions du Cerf, 1981.

2 Fleming Rutledge, The Crucifixion: Understanding the Death of Jesus Christ [La crucifixion : comprendre la mort de Jésus-Christ], trad. libre, Grand Rapids, Mich., Eerdmans, 2015, p. 91-92.

3 Ibid.

4 Ibid.

5 Peter J. Leithart, Defending Constantine: The Twilight of an Empire and the Dawn of Christendom [Défense de Constantin : le crépuscule d’un empire et l’aube de la chrétienté], trad. libre, Downers Grove, Ill., IVP Academic, 2010, p. 24.

6 De 21.22,23 ; Ga 3.13,14

7 Augustin d’Hippone, « Lectures or Tractates on the Gospel according to St. John », dans St. Augustin: Homilies on the Gospel of John, Homilies on the First Epistle of John, Soliloquies [« Lectures ou traités sur l’Évangile selon Saint Jean », dans Saint Augustin : Homélies sur l’Évangile de Jean, homélies sur la première épître de Jean, soliloques], trad. libre, Philip Schaff, éd., John Gibb et James Innes, trad., vol. 7, une collection de textes choisis des Pères nicéens et post-nicéens de l’Église chrétienne, première série, N. Y., Christian Literature Co., 1888, p. 50.

8 Ga 2.20 ; 6.14.

9 Voir David Clarkson, The Works of David Clarkson [Les œuvres de David Clarkson], trad. libre, Édimbourg, James Nichol, 1864, vol. 1, p. 108.

10 John Murray, La rédemption accomplie par Jésus-Christ, appliquée par le Saint-Esprit, Chalon-sur-Saône, France, Europresse, 2018, p. 105.

11 No 21.4-9 ; Jn 3.14,15.

12 Ép 1.10.

13 Ro 3.23-26.

* N.D.T. La Common Gateway Interface (littéralement « Interface de passerelle commune »), généralement abrégée CGI, est une interface utilisée par les serveurs HTTP.

14 C. H. Spurgeon, The Metropolitan Tabernacle Pulpit Sermons [Les sermons depuis la chaire du Metropolitan Tabernacle], trad. libre, vol. 10, Londres, Passmore & Alabaster, 1864, p. 359-360.

15 És 51.17,22 ; Jé 25.15,16 ; Ap 14.9,10 ; 16.19, en lien avec Mt 20.22,23 ; 26.39 ; Mc 10.38 ; 14.36 ; Lu 22.42 ; Jn 18.11.

16 2 Co 5.21.


Cet article est adapté du livre : « La guerre des spectacles » de Tony Reinke