Qu’est-ce que le sixième commandement interdit ? (Kevin DeYoung)

En termes simples, le sixième commandement interdit de prendre des vies humaines innocentes. L’expression « commettre un meurtre » est une bonne traduction du mot hébreu original, ratsach, qui est employé dans le commandement. Cette traduction est plus exacte que l’emploi du terme « tuer ». Le mot hébreu ratsach apparaît surtout dans les quelques passages du Pentateuque qui font mention des villes refuges ou des endroits où ceux qui avaient commis un homicide involontaire pouvaient se réfugier avant que des amis ou des membres de la famille en colère ne cherchent à se venger. Ratsach n’apparaît pas souvent en dehors de ces passages. En revanche, on compte des centaines d’occurrences du mot hébreu qatal, qui signifie « tuer ». Il y a une différence entre ratsach et qatal. 

Le sixième commandement n’interdit pas la légitime défense

Comme nous pouvons le constater dans l’Ancien Testament, le sixième commandement n’interdit pas la légitime défense : 

« Si le voleur est surpris dérobant avec effraction, et qu’il soit frappé et meure, on ne sera point coupable de meurtre envers lui; mais si le soleil est levé, on sera coupable de meurtre envers lui » (Ex 22.2,3). 

En d’autres mots, si quelqu’un n’avait d’autre choix que celui de tuer pour se défendre lors d’une effraction, il n’était pas coupable. Néanmoins, le verset 3 précise que « si le soleil [était] levé, on [était] coupable de meurtre envers lui ». Cela signifie que si la personne pouvait voir ce qui se passait et savait que tuer n’était pas nécessaire, elle était coupable. La légitime défense n’est donc pas une violation du sixième commandement.

Selon Genèse 9, la peine capitale n’était pas considérée comme une violation du sixième commandement  

« Si quelqu’un verse le sang de l’homme, par l’homme son sang sera versé, car Dieu a fait l’homme à son image » (v. 6). 

La peine capitale pour meurtre n’était pas considérée comme une atteinte à l’image de Dieu, mais au contraire, comme sa défense. La vie humaine est si précieuse que le fait de la prendre était sévèrement sanctionné.

La peine doit correspondre au crime et non le dépasser

Ce célèbre principe de la loi du talion décrite dans Exode 21, « œil pour œil et dent pour dent, blessure pour blessure », ne constituait pas une punition cruelle ou inhabituelle. Gandhi a déclaré un jour : « Œil pour œil et le monde finira aveugle. » Et nous pensons : « Comme c’est vrai ! Ce n’est pas une très bonne loi. » Cependant, dans le contexte du Proche-Orient antique, il s’agissait d’une loi plutôt humaine. Elle disait « œil pour œil, dent pour dent, blessure pour blessure» au lieu de dire «ta tête pour un œil, ta famille pour une dent, ton clan si tu m’offenses ».

Cela a établi le précédent selon lequel la peine doit correspondre au crime et non le dépasser. Une vie pour une vie, ni plus ni moins. Ce même principe est répété dans Romains 13. Les autorités sont des serviteurs de Dieu pour notre bien, pour exercer la vengeance et punir ceux qui font le mal (v. 4). La peine capitale n’était pas considérée comme une violation du sixième commandement.

L’Ancien Testament n’interdisait pas la guerre

Il en allait de même pour la guerre, dans certaines circonstances. La paix est toujours l’objectif, bien sûr, mais la guerre est parfois nécessaire pour défendre la paix. De toute évidence, l’Ancien Testament n’interdisait pas la guerre, puisque Dieu a lui-même envoyé Israël au combat et a proclamé être un guerrier qui combattait pour eux. Selon Romains 13, l’État en place doit être l’agent de la colère de Dieu et protéger les innocents. 

Souvenez-vous que Jésus, lors de son entretien avec le centurion, ne lui a pas dit : « Va et ne pèche plus, et si tu veux vraiment être mon disciple, quitte ton poste de centurion de l’armée romaine. » Le livre des Actes rapporte que Corneille (commandant d’une cohorte) était un homme qui craignait Dieu. Lorsque des soldats ont demandé à Jean-Baptiste ce qu’ils devaient faire pour se repentir, Jean ne leur a pas répondu : « Démissionnez de l’armée romaine diabolique. Vous ne pouvez pas être à la fois soldats et membres du peuple de Dieu. »

Il leur a plutôt dit : « Ne commettez d’extorsion envers personne par des menaces ou de fausses accusations. Contentez-vous de votre solde. Soyez des soldats honnêtes et respectables. » Et ce, même dans une force militaire comme l’armée romaine qui se livrait souvent à des actes répugnants (voir Lu 3.14). Ainsi, le sixième commandement n’interdisait pas les homicides associés à la légitime défense, la peine capitale et les guerres justes.

Le sixième commandement interdisait le meurtre prémédité et intentionnel

En revanche, il interdisait le meurtre prémédité et intentionnel. L’Ancien Testament relate de tels cas, par exemple, le meurtre de la concubine ou de la femme du lévite et le meurtre de Naboth pour s’approprier son vignoble. Il interdisait les meurtres intentionnels, mais non prémédités, que nous appellerions « homicides volontaires ». Il interdisait l’homicide involontaire ou inconscient, comme ce serait le cas pour une personne qui conduit en état d’ébriété et en tue une autre. Bien que dans un tel cas, il n’y ait aucune intention de tuer, l’imprudence entraîne tout de même la mort. La loi israélite faisait une distinction entre une mort accidentelle et une mort motivée par la haine (De 19.1-13). L’Ancien Testament considère avec sagesse les intentions sous-jacentes à la mort. 

Le sixième commandement interdit l’homicide causé par négligence 

Si tu bâtis une maison neuve, tu feras une balustrade autour de ton toit, afin de ne pas mettre du sang sur ta maison, dans le cas où il en tomberait quelqu’un (De 22.8).

Si un bœuf frappe de ses cornes un homme ou une femme, et que la mort en soit la suite, le bœuf sera lapidé, sa chair ne sera point mangée, et le maître du bœuf ne sera point puni. Mais si le bœuf était auparavant sujet à frapper, et qu’on en ait averti le maître, qui ne l’a point surveillé, le bœuf sera lapidé, dans le cas où il tuerait un homme ou une femme, et son maître sera puni de mort (Ex 21.28,29).

Dieu désire que nous prenions soin de notre prochain

Au premier abord, ces lois peuvent paraître étranges. À vrai dire, la plupart d’entre nous ne craignent pas d’être poursuivis par des bœufs au cours de leur promenade. Nous ne nous soucions guère d’avoir des balustrades sur notre toit. Cependant, nous avons des lois qui exigent l’installation de clôtures autour des piscines creusées. Nous devons empêcher les gens de tomber dans la piscine, tout comme Israël devait protéger les gens des bœufs et des toits. À cette époque, pour se rafraîchir le soir, on allait sur le toit qui faisait office d’espace de vie supplémentaire. Dieu leur disait de prendre soin de leur prochain. Ils ne pouvaient pas s’en sortir en disant simplement : « Eh bien, tu es tombé du toit, c’est ta faute ! » 

Ainsi, Dieu leur a ordonné de se soucier du bien-être de leur prochain en installant une balustrade autour du toit. Il en allait de même pour les bœufs. Si un bœuf devenait agressif et poursuivait des gens, c’était un accident. En revanche, si le propriétaire du bœuf savait que l’animal avait tendance à charger, et qu’il advenait que le bœuf encorne quelqu’un, le propriétaire, n’ayant pas fait ce qu’il fallait pour protéger son prochain, devait alors être mis à mort.

Tout cela démontre que le sixième commandement excède largement le cas du meurtre prémédité et commis de sang-froid. Il interdit de tuer toute personne juridiquement innocente ou de causer sa mort, par une action directe ou par l’inaction. 


Cet article est tiré du livre : Les dix commandements de Kevin DeYoung