Regardant à Jésus (Théodore Monod)

Nous donc aussi, puisque nous sommes environnés d’une si grande nuée de témoins, rejetons tout fardeau, et le péché qui nous enveloppe si facilement, et courons avec persévérance dans la carrière qui nous est ouverte, ayant les regards sur Jésus, le chef et le consommateur de la foi, qui, en vue de la joie qui lui était réservée, a souffert la croix, méprisé l’ignominie, et s’est assis à la droite du trône de Dieu.

Hébreux 12:1-2

Théodore Monod (1836-1921) était un pasteur, auteur et rédacteur de cantiques français. Monod était le fils d’un ministre réformé. Il a été pasteur de la Chapelle du Nord et de l’église réformée de Paris et a été agent des Missions Nationales en France.

Monod a également écrit un petit pamphlet intitulé Regardant à Jésus, dans lequel il indique à ses lecteurs, dans des paragraphes simples et dévotionnels, comment tourner leur regard de toutes choses vers Jésus.


» … Regardant à Jésus … «

(Hébreux 12:2)

Trois mots seulement, mais en trois mots c’est tout le secret de la vie.

Regardant à Jésus

dans l’Ecriture, pour y apprendre ce qu’Il est, ce qu’Il a fait, ce qu’Il donne, ce qu’Il demande ; pour trouver dans Son caractère notre modèle, dans Ses enseignements notre instruction, dans Ses préceptes notre loi, dans Ses promesses notre appui, dans Sa personne et dans Son oeuvre une pleine satisfaction offerte à tous les besoins de nos âmes.

Regardant à Jésus crucifié, pour trouver dans Son sang répandu notre rançon, notre pardon, notre paix.

Regardant à Jésus ressuscité, pour trouver en Lui la justice qui seule nous justifie, et nous permet, tout indignes que nous sommes, de nous approcher avec assurance en Son nom, de Celui qui est Son Père et notre Père, Son Dieu et notre Dieu.

Regardant à Jésus glorifié, pour trouver en Lui notre céleste avocat, complétant par Son intercession l’œuvre de Sa miséricorde et de notre salut, comparaissant maintenant même pour nous devant la face de Dieu, souverain sacrificateur, victime sans tache, purifiant incessamment l’iniquité de nos saintes offrandes.

Regardant à Jésus révélé par le Saint-Esprit, pour trouver dans Sa communion constante la purification de nos cœurs souillés, l’illumination de nos esprits obscurcis, la transformation de nos volontés rebelles ; pour être rendus capables de triompher de tous les assauts du monde et du malin, résistant à la violence par Jésus notre force, déjouant leur ruse par Jésus notre sagesse ; soutenus par la sympathie de Dieu, à qui aucune tentation n’a été épargnée, et par le secours de Jésus, qui n’a succombé à aucune.

Regardant à Jésus qui donne la repentance aussi bien que la rémission des péchés, pour qu’Il nous fasse la grâce de connaître, de déplorer, de confesser et de délaisser nos transgressions.

Regardant à Jésus pour recevoir de Lui la tâche et la croix de chaque jour, avec la grâce qui suffit pour porter la croix et accomplir la tâche ; patients de Sa patience, actifs de Son activité, aimants de Son amour ; demandant, non point : » Que puis-je ? » mais : » Que ne peut-Il pas ? » et nous attendant à Sa vertu, qui se déploie tout entière dans l’infirmité.

Regardant à Jésus pour sortir de nous-mêmes et nous oublier ; pour que nos ténèbres se dissipent à la clarté de Sa face ; pour que nos joies soient saintes et que nous douleurs soient sereine ; pour qu’Il nous humilie et qu’Il nous élève, pour qu’Il nous nous afflige et qu’Il nous console, pour qu’Il nous dépouille et qu’Il nous enrichisse ; pour qu’Il nous enseigne à prier et qu’Il réponde à nos prières ; pour que, tout en nous laissant dans le monde, Il nous en sépare, notre vie étant cachée avec Lui en Dieu, et notre conduite Lui rendant témoignage devant les hommes.

Regardant à Jésus qui, rentré dans la maison de son Père, s’occupe à nous y préparer une place, pour que cette bienheureuse perspective nous fasse vivre dans l’espérance et nous prépare à mourir dans la paix, quand viendra le jour de rencontrer ce dernier ennemi qu’Il a vaincu pour nous, que nous vaincrons par Lui, – naguère le roi des épouvantements, aujourd’hui le messager de la félicité éternelle.

Regardant à Jésus dont le retour certain, à une époque incertaine, est de siècle en siècle l’attente et l’espoir de l’Eglise fidèle, qui s’encourage à la patience, à la vigilance et à la joie par la pensée que le Seigneur est proche.

Regardant à Jésus

le Chef et le Consommateur de la foi, c’est-à-dire Celui qui en est le modèle et la source, comme Il en est l’objet, et qui, du premier pas jusqu’au dernier, marche à la tête des croyants ; afin que par Lui notre foi soit inspirée, encouragée, soutenue, amenée à sa consommation suprême.

Regardant à Jésus

et à rien d’autre, comme le dit notre texte en un seul mot intraduisible (‘Ajorwntez), qui nous prescrit à la fois de fixer nos regards sur Lui et de les détourner de tout le reste.

A Jésus, et non point à nous-mêmes, à nos pensées, à nos raisonnements, à nos imaginations, à nos goûts, à nos désirs, à nos projets ; –

A Jésus, et non point au monde, à ses convoitises, à ses exemples, à ses maximes, à ses jugements ; –

A Jésus, et non point à Satan, soit qu’il cherche à nous effrayer par ses fureurs ou à nous séduire par ses flatteries. – Oh ! combien nous nous épargnerons de questions inutiles, de scrupules inquiets, de temps perdu, de dangereux pourparlers avec le mal, de dissipation d’esprit, de vains rêves, de désappointements amers, de luttes douloureuses, de chutes lamentables, en regardant tout droit à Jésus et Le suivant partout où Il nous mènera, trop soucieux de ne pas perdre de vue le sentier qu’Il nous trace pour donner même un coup d’œil à ceux où Il ne juge pas à propos de nous conduire.

A Jésus, et non point à nos systèmes, si évangéliques qu’ils puissent être. La foi qui sauve, qui sanctifie et qui console, ce n’est pas l’assentiment à la doctrine du salut, c’est l’attachement à la personne du Sauveur. «Il ne suffit pas, disait Adolphe Monod, de savoir Jésus-Christ, il faut avoir Jésus-Christ » ; à quoi l’on peut ajouter que nul ne Le connaît véritablement si d’abord il ne Le possède. Selon la parole profonde du disciple bien-aimé, c’est dans la vie qu’est la lumière, et c’est en Jésus qu’est la vie .

A Jésus, et non point à nos méditations et à nos prières, à nos conversations pieuses et à nos lectures édifiantes, aux saintes assemblées que nous fréquentons, ni même à notre participation à la cène du Seigneur ; usons fidèlement de tous ces moyens de grâce, mais sans les confondre avec la Grâce elle-même, et sans détourner notre regard de Celui qui seul les rend efficaces, quand, par leur intermédiaire, Il se communique Lui-même à nous.

A Jésus, et non point à notre position dans l’Eglise chrétienne, à la famille à laquelle nous appartenons, à notre baptême, à l’éducation que nous avons reçue, à la doctrine que nous professons, à l’idée que d’autres se font de notre piété ou à celle que nous nous en faisons nous-mêmes. Plusieurs de ceux qui auront prophétisé au nom de Jésus L’entendront un jour leur dire : » Je ne vous ai jamais connus » ; mais Il confessera devant Son Père et devant Ses anges jusqu’au plus humble de ceux qui auront regardé à Lui.

A Jésus, et non point à nos frères, non pas même aux meilleurs d’entre eux et aux plus aimés. En suivant un homme, nous courons le risque de nous égarer ; en suivant Jésus, nous sommes certains de ne nous égarer jamais. D’ailleurs, à mettre un homme entre Jésus et nous, il arrive qu’insensiblement l’homme grandit et Jésus diminue ; bientôt nous ne savons plus trouver Jésus quand nous ne pouvons pas trouver l’homme, et si celui-ci vient à nous manquer, tout nous manque ; au contraire, si Jésus se tient entre nous et notre plus intime ami, notre attachement à l’homme sera tout ensemble moins direct et plus profond, moins passionné et plus doux, moins nécessaire et plus utile, instrument de riches bénédictions entre les mains de Dieu lorsqu’Il Lui plaira de s’en servir, et dont l’absence nous sera une bénédiction encore, lorsqu’il Lui plaira de s’en dispenser, pour nous rapprocher d’autant plus du seul ami dont ne nous puissent séparer » ni la mort ni la vie «.

A Jésus, et non point à Ses ennemis et aux nôtre. Au lieu de les haïr et de les redouter, nous saurons alors les aimer et les vaincre.

A Jésus, et non point aux obstacles qui se rencontrent sur notre chemin. Dès que nous nous arrêtons à les considérer, ils nous étonnent, nous ébranlent, nous abattent, incapables que nous sommes de comprendre soit la raison pour laquelle ils sont permis, soit le moyen par lequel nous les pourrons surmonter. L’apôtre fut englouti sitôt qu’il se prit à regarder aux vagues agitées par la tempête ; c’est tandis qu’il regardait à Jésus qu’il marcha sur les flots comme sur un rocher. Plus notre tâche est difficile, plus nos tentations sont redoutables, plus il importe que nous regardions uniquement à Jésus.

A Jésus, et non point à nos afflictions, pour en calculer le nombre, pour en estimer le poids, pour trouver peut-être je ne sais quelle étrange satisfaction à en savourer l’amertume. Hors de Jésus, l’affliction ne sanctifie pas, elle endurcit ou elle écrase. Elle produit, non la patience, mais la révolte ; non la sympathie, mais l’égoïsme, non l’espérance, mais le désespoir. C’est seulement à l’ombre de Sa croix que nous pouvons apprécier la juste mesure de la nôtre, l’accepter chaque jour de Sa main, la porter avec amour, avec actions de grâces, avec joie, y trouver pour nous-mêmes et pour d’autres une source de bénédictions.

A Jésus, et non point aux plus chères, aux plus légitimes de nos joies terrestres, de peur d’en être tellement captivés qu’elles nous dérobent la vue de Celui même qui nous les donne. Regardant à Lui tout d’abord, c’est de Lui que nous recevrons ces bienfaits, plus précieux mille fois parce que nous les tiendrons de Sa bonté, pour les confier à Sa garde, pour en jouir dans Sa communion, et pour en user à Sa gloire.

A Jésus, et non point aux instruments quels qu’ils soient, de Ses dispensations à notre égard. Par delà les hommes, par delà les circonstances, par delà les mille causes nommées à si juste titre secondes, remontons jusqu’à la cause première, Sa volonté ; remontons jusqu’à la source ce cette volonté elle-même, Son amour. Alors notre reconnaissance, sans être moins vive envers ceux qui nous font du bien, ne s’arrêtera pas à eux ; alors, au jour de l’épreuve, sous le coup le plus inattendu, le plus inexplicable, le plus accablant, nous pourrons dire avec le Psalmiste : » Je me suis tu, et je n’ai point ouvert la bouche, parce que c’est toi qui l’as fait «, et dans le silence de notre muette douleur nous répondra doucement la voix céleste : » Tu ne sais pas maintenant ce que je fais, mais tu le sauras dans la suite. «

A Jésus, et non point aux intérêts de notre cause, de notre parti, de notre église, – bien moins encore à nos intérêts personnels. L’unique objet de notre vie, c’est la gloire de Dieu ; si nous n’en faisons pas le but suprême de nos efforts, nous nous privons nécessairement de Son secours, car Sa grâce n’est au service que de Sa gloire. Si, au contraire, c’est Sa gloire que nous cherchons avant tout, nous pouvons toujours compter sur Sa grâce.

A Jésus, et non point à la sincérité de nos intentions, à la fermeté de nos résolutions. Hélas ! combien de fois les desseins les plus excellents n’ont servi qu’à préparer les défaites les plus humiliantes ! Appuyons-nous, non sur nos intentions, mais sur Son amour ; non sur nos résolutions, mais sur Sa promesse.

A Jésus, et non point à notre force. Notre force n’est bonne qu’à nous glorifier nous-mêmes ; pour glorifier Dieu, il faut la force de Dieu.

A Jésus, et non point à notre faiblesse. A lamenter notre faiblesse, sommes-nous jamais devenus plus forts ? Regardons à Jésus, et Sa force se communiquera à nos cœurs. Sa louange éclatera sur nos lèvres.

A Jésus, et non point à nos péchés, à la source dont ils procèdent, au châtiment qu’ils méritent. Ne regardons à nous-mêmes que pour reconnaître combien nous avons besoin de regarder à Lui, et cela non pas assurément comme si nous n’étions point pécheurs, mais, au contraire, parce que nous le sommes, mesurant la grandeur même de notre offense à celle du sacrifice qui l’a expiée et de la grâce qui la pardonne. » Pour un regard que nous portons sur nous-mêmes, disait un éminent serviteur de Dieu portons-en dix sur Jésus. » – » S’il est bien prouvé, dit Vinet, qu’on ne perdra pas de vue sa misère en regardant Jésus-Christ crucifié, parce que cette misère est comme gravée sur la croix, il est bien prouvé aussi qu’en regardant à sa misère on peut perdre de vue Jésus-Christ, parce que la croix n’est pas naturellement gravée dans l’image de notre misère » ; et il ajoute : » Regardez-vous vous-mêmes, mais en présence de la croix, mais à travers Jésus-Christ. » La contemplation du péché ne donne que la mort, la contemplation de Jésus donne la vie ; ce qui guérissait l’Israélite au désert, ce n’était pas de considérer ses plaies, mais de lever les yeux vers le serpent d’airain.

A Jésus, et non point – est-il besoin de le dire ? – à notre prétendue justice. Malade entre tous les malades est celui qui se croit en santé, aveugle entre les aveugles celui qui pense y voir clair  ; s’il est dangereux de regarder longtemps à notre misère, hélas ! trop réelle, il est bien plus dangereux de nous reposer complaisamment sur des mérites imaginaires.

A Jésus, et non point à la loi. La loi donne des ordres et ne donne point de force pour les exécuter ; la loi condamne toujours et ne pardonne jamais ; nous replacer sous la loi, c’est nous soustraire à la grâce. Dans la mesure où nous faisons de notre obéissance le moyen de notre salut, nous perdons notre paix, notre force, notre joie, pour avoir oublié que Jésus est » la fin de la loi en justice à tout croyant «. Aussitôt que la loi nous a contraints de chercher en Lui notre seul Sauveur, c’est à Lui seul aussi de nous commander l’obéissance ; une obéissance qui ne s’étend à rien moins que notre cœur tout entier et nos pensées les plus secrètes, mais qui a cessé d’être un joug de fer et un fardeau insupportable pour devenir un joug aisé et un fardeau léger ; une obéissance qu’Il rend aimable en même temps qu’obligatoire, une obéissance qu’Il inspire en même temps qu’Il la prescrit, et qui, à le bien prendre, est moins une conséquence de notre salut qu’elle n’est une partie de ce salut même, – et, comme tout le reste, une grâce.

A Jésus, et non point à ce que nous faisons pour Lui. Trop occupés de notre œuvre, nous pouvons oublier notre Maître, – il est possible d’avoir les mains pleines et le cœur vide ; occupés de notre Maître, nous ne pouvons pas oublier notre œuvre ; si le cœur est rempli de Son amour, comment les mains ne seraient-elles pas actives à Son service ?

A Jésus, et non point au succès apparent de nos efforts. Le succès apparent n’est pas la mesure du succès réel ; et d’ailleurs, Dieu ne nous a pas donné ordre de réussir, mais de travailler ; c’est de notre travail qu’Il nous demandera compte, et non pas de notre succès, – pourquoi donc nous en préoccuper ? A nous de jeter la semence, à Dieu de cueillir le fruit ; si ce n’est aujourd’hui, ce sera demain ; si ce n’est par nous, ce sera par d’autres. Lors même que le succès nous est accordé, il est toujours dangereux d’y fixer nos regards : d’une part, nous sommes tentés de nous en attribuer quelque chose ; d’autre part, nous nous accoutumons ainsi à laisser se ralentir notre zèle quand nous cessons d’en apercevoir l’effet, c’est-à-dire dans le temps même où il faudrait redoubler d’énergie. Regarder au succès, c’est marcher par la vue ; regarder à Jésus et persévérer à Le suivre et à Le servir, en dépit de tous les découragements, c’est marcher par la foi.

A Jésus, et non point aux dons spirituels que nous avons reçus déjà ou que nous recevons maintenant de Lui, Quant à la grâce d’hier, elle a passé avec l’œuvre d’hier ; nous ne pouvons plus en faire usage, nous ne devons plus nous y arrêter ; quant à la grâce d’aujourd’hui, donnée pour l’œuvre d’aujourd’hui, elle nous est confiée, non pour la regarder, mais pour l’employer, – non pour la faire sonner dans nos mains et nous estimer riches, mais pour la dépenser aussitôt et demeurer pauvres, «»regardant à Jésus».

A Jésus, et non point au degré de douleur que nous font éprouver nos péchés, ou au degré d’humiliation qu’ils produisent en nous. Si seulement nous en sommes assez humiliés pour ne plus nous complaire en nous-mêmes, si nous en sommes assez affligés pour regarder à Jésus afin qu’Il nous en délivre, c’est tout ce qu’Il demande de nous, et c’est aussi ce regard qui, plus que tout le reste, fera couler nos larmes et tomber notre orgueil. Et quand il nous est donné, comme à Pierre, de pleurer amèrement, oh ! qu’alors nos yeux voilés demeurent plus que jamais attachés sur Lui, car notre repentance même nous deviendrait un piège si nous pensions effacer en quelque mesure par nos larmes ces péchés que rien n’efface, sinon le sang de l’Agneau de Dieu.

A Jésus, Et non point à la vivacité de notre joie, à la fermeté de notre assurance, ou à la ferveur sensible de notre amour. Autrement, pour peu que cet amour semble s’attiédir, que cette assurance soit ébranlée, que cette joie vienne à nous faire défaut – soit par l’effet de notre infidélité, soit pour l’épreuve de notre foi – tout aussitôt, notre émotion perdue, nous croirons avoir perdu notre force, et nous nous laisserons aller à un abattement funeste, si ce n’est à une lâche inactivité et peut-être à des murmures coupables. Ah ! plutôt, souvenons-nous que si parfois l’émotion et sa douceur nous manquent, la foi et sa puissance nous restent, et pour pouvoir » abonder en tout temps dans l’œuvre du Seigneur «, regardons sans cesse, non pas à nos cœurs toujours mobiles, mais à Jésus toujours le même.

A Jésus, et non point au degré de sanctification où nous sommes parvenus. Si nul ne devait se croire enfant de Dieu tant qu’il continue à trouver des taches dans son cœur et des chutes dans sa vie, qui donc pourrait goûter la joie du salut ? Mais cette joie n’est point à ce prix. La sainteté est le fruit de notre rédemption, elle n’en est pas la racine : c’est l’œuvre de Jésus-Christ pour nous qui nous réconcilie avec Dieu, c’est l’œuvre du Saint-Esprit en nous qui nous renouvelle à Sa ressemblance. L’imperfection d’une foi sincère, mais encore peu affermie et peu féconde, n’altère en rien la plénitude de l’œuvre parfaite du Sauveur, ni la certitude de Sa promesse immuable, assurant la vie éternelle à quiconque se confie en Lui. Aussi bien, nous reposer sur le Rédempteur est le vrai moyen de Lui obéir, et c’est seulement dans la paix du pardon que l’âme est forte pour la lutte. – Que s’il en est qui abusent de cette bienheureuse vérité pour s’abandonner sans scrupule au relâchement spirituel, s’autorisant de la foi qu’ils pensent avoir pour faire bon marché de la sainteté qu’ils n’ont pas, il convient de leur rappeler cette solennelle déclaration de saint Paul : » Ceux qui sont à Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises «, et celle-ci de saint Jean : » Celui qui dit : Je l’ai connu, et qui ne garde point ses commandements, est menteur, et la vérité n’est point en lui » ; et cette autre de Jésus Lui-même : » Tout arbre qui ne porte point de bon fruit est coupé et jeté au feu. «

A Jésus, et non point à notre foi. La dernière ruse de l’Adversaire, quand il ne peut nous faire regarder ailleurs, c’est de détourner nos yeux de notre Sauveur sur notre foi, et ainsi de nous décourager si elle est faible, de nous enorgueillir si elle est forte, dans l’un et l’autre cas de nous affaiblir. Car ce n’est pas de la foi que vient la force, mais du Sauveur, par la foi ; ce n’est pas en regardant notre regard, c’est en regardant à Jésus.

A Jésus, et c’est de Lui et en Lui que nous apprendrons à connaître, non seulement sans danger, mais pour le bien de nos âmes, ce qu’il est bon que nous connaissions du monde et de nous-mêmes, de nos misères, de nos périls, de nos ressources, de nos victoires ; voyant toutes choses sous leur vrai jour parce que c’est Lui qui nous les fera voir, et cela seulement dans le temps et dans la mesure où cette connaissance portera en nous des fruits d’humilité et de sagesse, de gratitude et de courage, de vigilance et de prière. Tout ce qu’il est désirable que nous sachions, Jésus nous en instruira ; tout ce que nous n’apprendrons pas de Lui, il nous vaut mieux ne pas le savoir.

Regardant à Jésus pendant le temps qui nous reste sur la terre, – à Jésus de moment en moment, sans nous laisser distraire ni par les souvenirs d’un passé que nous devons laisser derrière nous, ni par les préoccupations d’un avenir dont nous ne connaissons rien ;

à Jésus maintenant si nous n’avons jamais regardé à Lui,

à Jésus de nouveau, si nous avons cessé de le faire,

à Jésus seul,

à Jésus encore,

à Jésus toujours,

d’un regard de plus en plus assidu, de plus en plus assuré, » transformés en la même image de gloire en gloire » ; et ainsi attendant l’heure où Il nous appellera à passer de la terre au ciel et du temps à l’éternité,

l’heure promise,

l’heure bénie

où enfin » nous Lui serons semblables, parce que nous Le verrons tel qu’Il est «.

» IL ACCORDE PLUS DE GRACE «

Jacques 4:6

Ah ! donne à mon âme
Plus de sainteté,
Plus d’ardente flamme,
De sérénité ;
Plus de confiance,
Pour rester debout ;
Plus de patience,
Pour supporter tout.
Fais que je contemple
Sans cesse l’Agneau,
Son vivant exemple,
Sa croix, son tombeau ;
Sa grâce fidèle,
Son immense amour,
Sa grâce éternelle,
Son prochain retour.
Jésus, à Tes larmes
Je veux compatir ;
De toutes Tes armes
Viens me revêtir ;
Par plus de prière,
De zèle et de foi,
Que dans la lumière
Je marche avec toi.
Donne, à ton service,
Un cœur plus joyeux,
Prompt au sacrifice,
Toujours sous Tes yeux ;
Qui chante et qui tremble,
Humble en sa ferveur,
Un cœur qui ressemble
Au Tien, mon Sauveur !

PAS A PAS

O honte ! O mémoire cruelle !
A Jésus, le Berger fidèle,
Quand il m’appelait par mon nom,
Insensé, j’ai répondu Non !
De Lui j’ai détourné ma face,
J’ai crié : » Pour toi point de place !
De tes bienfaits je ne veux rien ;
Laisse-moi tout mon cœur et garde tout le Tien ! «

Pourtant il sut trouver mon âme ;
Je le vis, sur le bois infâme,
Navré d’opprobre et de douleur,
Priant : » Père, pardonne-leur ! «
Et devant sa beauté sanglante,
Je lui dis d’une voix tremblante :
» Sois mon modèle, mon soutien,
Et répands dans mon cœur quelque chose du Tien ! «

De jour en jour, de grâce en grâce,
Sa clémence qui rien ne lasse,
Douce étoile à mon horizon,
Fut ma joie et ma guérison.
A cet ami si fort, si tendre,
Ma requête se fit entendre :
» Daigne, ô Christ ! me rendre chrétien,
Plus pauvre de mon cœur et plus riche du Tien ! 

Plus haute que les cieux sublimes,
Plus profonde que les abîmes,
Plus vaste que l’immensité,
Dieu Sauveur, est Ta charité !
Je suis vaincu, je rends les armes,
Et, baignant Tes pieds de mes larmes,
Je soupire après un seul bien :
» Viens m’ôter tout mon cœur, me donner tout le Tien ! «


Référence: Reproduction de la brochure «Regardant à Jésus», Théodore Monod – Edité par LA VOIX DE L’EVANGILE, Boîte Postale 2045, 13020 MARSEILLE Cédex 01, 9e édition, janvier 1989