Une seule race unie en Christ (Julius Kim)
Comment la justification détruit les divisions ethniques
La nuit de sa trahison et de son arrestation, la veille de sa crucifixion, Jésus a prononcé une sublime prière pleine de foi à son Père céleste. En plus d’aborder des sujets transcendants, tels que la gloire de Dieu dans l’élection et sa propre obéissance dans l’obtention du salut, Jésus a demandé à plusieurs reprises à son Père une réalité apparemment simple, mais profonde : l’unité des chrétiens suivant le modèle de la Trinité. Il a prié : « Père saint, garde-les en ton nom, ce nom que tu m’as donné, afin qu’ils soient un comme nous. » (Jean 17.11) L’unité était si importante pour Jésus qu’il a répété cette demande trois autres fois dans la prière (Jean 17.21-23).
Le pasteur puritain Anthony Burgess demande à juste titre : « Si les paroles d’un homme mourant sont très importantes, combien plus celles d’un Christ mourant ? » Alors que les chrétiens luttent pour trouver la paix au milieu des défis, tant dans nos cœurs que dans notre monde, nous devons une fois de plus écouter et apprendre non seulement les mots de sa prière, mais aussi la mort et la résurrection qui ont rendu cette prière possible. Car Christ ne s’est pas contenté de prononcer ces mots ; il a rendu possible une humanité nouvelle, unifiée et une, par sa vie sans péché, sa mort sacrificielle et sa glorieuse résurrection.
Pourrait-il y avoir une véritable unité entre les disciples de Christ, quelle que soit leur race ou leur origine ethnique ? L’apôtre Paul le croyait, car il voyait le lien vital entre la justification des croyants par la foi seule et leur unité les uns avec les autres, qu’ils soient Juifs ou non-juifs, esclaves ou libres.
Justice et justification
Les chrétiens de la tradition réformée connaissent bien les thèmes liés à la justice. Après tout, l’un des tournants majeurs de l’histoire du christianisme a porté sur l’idée de savoir comment on peut être considéré comme juste ou droit devant un Dieu saint. Pendant la Réforme protestante, plusieurs cris de ralliement sont devenus le cœur de ce mouvement : L’Écriture seule (sola Scriptura), le Christ seul (solus Christus), la grâce seule (sola gratia), la foi seule (sola fide) et la gloire de Dieu seule (soli Deo gloria). Mais aucune doctrine n’était plus centrale et plus débattue que le sola fide, ou l’idée que nous pouvons être déclarés justes devant Dieu en raison de la justice de Christ qui nous est imputée, reçue par la foi seule, et non par les œuvres.
La Bible enseigne que tous les hommes seront appelés à rendre des comptes devant Dieu. Tout ce que nous avons pensé, dit ou fait sera mis à nu devant le Juge du monde entier (Romains 2.6-8 ; 2 Corinthiens 5.10). Et dans ce tribunal divin, chacun entendra l’un des deux verdicts suivants : coupable ou non coupable. Le problème, cependant, est que tous sont maudits et condamnés à cause de leur péché. L’apôtre Paul nous rappelle l’universalité du péché : « Que dire donc ? Sommes-nous supérieurs aux autres ? Pas du tout. En effet, nous avons déjà prouvé que Juifs et non-juifs sont tous sous la domination du péché, comme cela est écrit : “Il n’y a pas de juste, pas même un seul.” » (Romains 3.9-10) Comment donc les Juifs ou les non-juifs, les Américains ou les Coréens, peuvent-ils échapper à cette malédiction et à ce jugement ? La réponse se trouve dans la doctrine de la justification.
Justes à ses yeux
Le Petit Catéchisme de Westminster donne cette définition succincte, mais solide de la justification : « La justification est un acte de la libre grâce de Dieu, par lequel il pardonne tous nos péchés et nous accepte comme justes à ses yeux, uniquement à cause de la justice de Christ qui nous est imputée et que nous recevons par la foi seule. » (Question 33) En d’autres termes, lorsqu’un pécheur coupable se tient devant Dieu, il peut être déclaré « non coupable » lorsqu’un autre homme se tient à sa place et offre la justice parfaite que Dieu exige.
Ce Dieu-homme parfait, c’est Jésus, qui, par sa vie totalement obéissante et sans péché, a mérité la justice. Pourtant, il a subi notre peine sur la croix, mourant à la place de pécheurs. Ceux qui se tournent donc vers Jésus dans la foi, en se confiant en lui comme gardien de la probation et payeur de la peine, sont déclarés justes. C’est pourquoi Paul peut dire que la mort de Jésus « montre ainsi sa justice [de Dieu] dans le temps présent, de manière à être juste tout en justifiant celui qui a la foi en Jésus » (Romains 3.26). En effet, la justification est par la grâce seule, en Christ seul, par la foi seule.
En d’autres termes, les réformateurs, s’inspirant de l’apôtre Paul, croyaient que les pécheurs, séparés d’un Dieu juste, peuvent être pleinement acceptés par la foi seule, qu’ils soient juifs ou non-juifs, esclaves ou libres. Par conséquent, comme le montre Paul dans des passages tels que Romains 3 et Galates 3, la justification est indispensable non seulement à l’Évangile lui-même, mais aussi à l’unité des chrétiens. L’étude de la doctrine de la justification nous aide à voir comment l’œuvre de Christ et notre foi en son œuvre conduisent à l’harmonie ethnique : une seule race unie à Christ et, par conséquent, les uns aux autres. La doctrine de la justification est le fondement et le carburant d’une nouvelle humanité unifiée.
Unis à Christ et les uns aux autres
Il est frappant de voir comment Paul passe de la nature de la justification, ou ce qu’elle est, aux effets de la justification, ou pourquoi elle est importante. Tant dans Romains 3 que dans Galates 3, Paul fait ressortir l’implication que l’union du chrétien avec Christ dans sa justification conduit à l’unité avec les autres chrétiens qui partagent le corps et le sang de Christ. Autrement dit, si nous sommes unis à Christ dans la justification, nous sommes également unis les uns aux autres.
Dans l’esprit de Paul, la division qui existait entre Juifs et non-juifs dans l’Église chrétienne était de la plus haute importance. Il savait que l’unité en Christ exigeait l’unité par Christ. Après avoir stipulé que tous les êtres humains partagent un problème universel commun – la réalité du péché et du manque de justice (Romains 3.9-11) – il dit à ces premiers chrétiens qu’une justice en dehors de la loi et en dehors d’eux-mêmes est disponible pour tous par la foi (Romains 3.21-22 ; 28). Tout le monde peut être justifié par Dieu, quel que soit son héritage racial ou ethnique ; le don gratuit de la justification de Dieu est disponible pour tous. Une humanité nouvelle, unie, composée de toutes les tribus, de tous les peuples et de toutes les langues, est en train d’être formée par l’homme Dieu Jésus Christ.
Le plan de salut de Dieu, autrefois apparemment réservé à ceux qui avaient du sang israélite, s’ouvre à ceux qui ont d’autres origines. Ce que beaucoup ne réalisaient pas, c’est que cette méthode faisait partie intégrante de la mission de Dieu depuis le début des temps. Paul reconnaît la portée du plan rédempteur de Dieu lorsqu’il écrit : « En effet, nous estimons que l’homme est justifié par la foi, indépendamment des œuvres de la loi. Ou bien Dieu est-il seulement le Dieu des Juifs ? N’est-il pas aussi celui des non-juifs ? Oui, il est aussi le Dieu des non-juifs, puisqu’il y a un seul Dieu, qui déclarera les circoncis justes sur la base de la foi et qui déclarera aussi les incirconcis justes au moyen de la foi. » (Romains 3.28-30) Comme il n’y a pas de distinction pour ceux qui ont besoin de la grâce par la foi, il n’y a pas de distinction pour ceux qui reçoivent la grâce par la foi.
Ce n’est pas seulement une vérité biblique et théologique, c’est une vérité pastorale et pratique. Lorsque les chrétiens réaliseront que Christ construit une humanité nouvelle en unissant à lui ceux qui croient en son œuvre justificatrice, ils verront qu’ils sont spirituellement unis les uns aux autres. Les enfants de Dieu seront alors dénombrés par ceux qui croient en Christ, et non par ceux qui sont issus d’Abraham. En fait, en écrivant aux Galates, Paul énoncera cette vérité surprenante : « Ce sont ceux qui ont la foi qui sont les fils d’Abraham. » (Galates 3.7)
Ces chrétiens non-juifs de Galatie peuvent se considérer comme faisant partie de la famille spirituelle d’Abraham. Ils ont été unis à la famille spirituelle de Dieu à cause des réalisations de l’œuvre de Christ qu’ils ont reçues par la foi seule.
Vaincre le mal par le bien
Cette réalité évangélique devient alors le fondement et le carburant pour suivre les pas de Christ. Ayant été justifiés par la justice de Christ, ses disciples recherchent maintenant la justice, la paix et l’unité. Tel est l’argument de Paul dans sa lettre aux Romains. Après avoir clarifié l’universalité du péché et de la justification, il les exhorte plus loin dans sa lettre à :
Je vous encourage donc, frères et sœurs, par les compassions de Dieu, à offrir votre corps comme un sacrifice vivant, saint, agréable à Dieu. Ce sera de votre part un culte raisonnable. Ne vous conformez pas au monde actuel, mais soyez transformés par le renouvellement de l’intelligence afin de discerner quelle est la volonté de Dieu, ce qui est bon, agréable et parfait. (Romains 12.1-2)
À quoi cela ressemble-t-il ? En plus d’utiliser nos dons uniques pour servir l’Église, les disciples de Christ sont appelés à afficher les marques contre-culturelles de ceux qui sont unis à Christ et les uns aux autres. Paul le dit dans le reste de Romains 12 (en particulier les versets 14-21). La réalité de notre union avec Christ et l’unité qui en résulte entre nous nous permettent d’agir de façon semblable à Christ. Nous pouvons bénir ceux qui nous calomnient et nous insultent. Nous pouvons nous réjouir quand la justice est rendue, mais aussi pleurer quand nos frères chrétiens (de quelque ethnie que ce soit) souffrent. Nous pouvons renoncer à la sagesse du monde, qui nous polarise si facilement et sert souvent notre orgueil. Nous sommes ceux qui recherchent la paix, dans l’Église et dans le monde, parce que nous sommes en paix avec Dieu.
Cet article est une traduction de l’article anglais « One Race United in Christ » du ministère Desiring God par Timothée Davi.