Une Union Immuable (Vincent Lemieux)
La discipline perdue de la communion avec Dieu – Partie 2
Dans l’article précédent, j’ai introduit l’idée que Dieu ne veut pas être connu de manière purement intellectuelle. Il désire ultimement être expérimenté par ceux qui sont dans le Christ Jésus. J’en conviens, cette manière de parler de notre communion avec Dieu est peut-être peu employée de nos jours. Cependant, elle est loin d’être nouvelle. Augustin (354-430), par exemple, écrit :
Les véritables objets de jouissance sont donc le Père et le Fils et le Saint-Esprit. [1]
Sinclair Ferguson, adressant la compréhension qu’avait le puritain John Owen (1616-1683) sur la communion avec Dieu, écrit ceci :
La vie chrétienne n’est rien de moins que la communion avec le Dieu Trinitaire, conduisant à la pleine assurance de la foi . [2]
La vie chrétienne n’est rien de moins que la communion avec le Dieu Trinitaire… Wow ! Cela veut donc dire que pour ce puritain, s’il n’y a pas de communion avec Dieu, il n’y a pas de véritable vie chrétienne. Owen exprima sensiblement la même chose ailleurs :
De quelle utilité sera votre vie si vous n’avez plus une communion paisible avec Dieu… [3]
Trouvons-nous cela trop dur comme paroles ? Si oui, ça démontre la véracité de ce que nous avons déjà adressé dans le premier article. Il semble que la communion avec Dieu soit rendue de la moindre importance pour nous.
Expérimenter Dieu
Frères et sœurs, comment voyez-vous votre vie chrétienne ? Est-ce pour vous uniquement un évènement du passé ? Une prière faite dans un camp de vacances, une main levée devant quelques chrétiens rassemblés ? Ou peut-être même que vous ne savez pas trop, vous disant que vous avez toujours été chrétien… Lorsque vous vous posez la question, vous ne savez peut-être pas vraiment quoi dire. Vous formulez vaguement que la vie chrétienne est d’accepter Jésus dans son cœur puis faire de son mieux pour obéir à ses commandements.
Mais la vie chrétienne est infiniment plus que ça ! Elle devrait au minimum être une expérimentation quotidienne de l’être le plus satisfaisant qui existe. Aimer, faire confiance, se réjouir et se satisfaire en Dieu, voici certaines des choses qu’inclut l’expression « expérimenter Dieu ». Je vous avoue que cette vision de la vie chrétienne me semble bien plus palpitante et biblique que celle vécue par plusieurs d’entre nous !
Le sujet de cette série d’articles est donc de présenter les vérités bibliques qui nous enseignent sur le comment nous pouvons quotidiennement expérimenter Dieu. Nous allons voir, par exemple, qu’elle place dans nos journées devrait avoir la Parole de Dieu, la prière, le jeûne, la méditation, l’église locale, etc. Avant de parler de ces disciplines chrétiennes cruciales à une réelle expérience de Dieu, il est essentiel de comprendre sur quoi est basée et dirigée la communion avec Dieu.
Une communion avec Dieu centrée sur l’Évangile
C’est pourquoi je parle d’une communion centrée sur l’Évangile. Les chrétiens ne cherchent pas sans cesse à s’approcher de Dieu pour les mêmes raisons que les autres religions. En fait, l’Évangile rend le christianisme complètement unique principalement à cause de son fondement et de son but.
Dans cet article, nous parlerons donc de l’union immuable que nous avons avec Dieu, qui est le fondement de nos expériences de Dieu. Autrement dit, sans union avec Dieu il n’y a aucune communion.
Deux fosses à éviter
Mais d’abord, pourquoi tiens-je tant à écrire sur quoi est basée notre communion avec le Christ ? Parce que si nous n’avons pas une saine compréhension de l’union que nous avons avec Dieu en Christ, nous courrons le danger que notre discipline à rechercher l’Éternel tombe dans plusieurs fosses. Deux d’entres elles sont le légalisme et la culpabilité accablante.
Le légalisme est une manière de rechercher Dieu dans le but de recevoir son approbation, d’être accepté par lui. La culpabilité est le sentiment qui envahira et découragera celui qui recherche Dieu sans être fermement appuyé sur la grâce incompréhensible de Dieu manifesté dans la Bonne Nouvelle du Christ. Aucune de ces deux fosses n’est la manière d’expérimenter Dieu d’une façon qui magnifie son Nom. C’est pourquoi nous méditons maintenant l’union immuable que nous avons avec Dieu en Jésus-Christ.
L’Éternel est juste
La justification est l’une des vérités les plus excellentes de l’Évangile. Pourtant, à mon humble avis, c’est l’une des vérités les moins bien comprises lorsque vient le temps de parler de notre union avec Dieu. Voyez-vous, nous parlons et célébrons souvent le pardon de nos péchés, amen ! Mais je crois que si ce que nous avons par Christ est uniquement le pardon de nos fautes, nous n’aurions pas, à mon avis, une si grande espérance que ça. Je m’explique : il est écrit dans le Psaume 11.7 que « L’Éternel est juste » et qu’« il aime la justice ; les hommes droits contemplent sa face. »
Par conséquent, il est clair que ce sont seulement ceux qui sont parfaitement justes qui peuvent oser se présenter devant l’Éternel et expérimenter une communion avec lui. Pas un seul pécheur ni un seul injuste ne sera accepté dans sa présence. Ils seraient tous détruits sur-le-champ par la grandeur de sa sainteté. Le standard de perfection est même encore plus accablant pour nous lorsque nous comprenons qu’être parfaitement juste ne signifie pas uniquement de n’avoir jamais rien fait de mal depuis le jour de nôtre naissance jusqu’à celui de nôtre mort ; mais aussi d’avoir toujours agi de la manière la plus juste, bonne et droite qui soit.
Nous sommes justifiés
Est-ce bien cela que vous voyez lorsque vous regardez à votre vie ? Pour être franc, ce n’est pas mon cas. Et pour être franc, ce n’est pas le vôtre non plus. C’est pourquoi je dis que si nous n’avons que le pardon des péchés, nous n’avons en fait pas grand-chose de plus, car la présence de Dieu nous ne serait pas pour autant accessible. Il n’est pas dit que ce sont ceux qui sont neutres, ne faisant jamais rien de mal ni jamais rien de bien qui contemplerons Dieu ; cela est l’héritage des justes !
Nous nous décrivons souvent comme des pécheurs pardonnés. Gloire à Dieu, car c’est merveilleusement vrai. Mais, par Jésus Christ, nous sommes beaucoup plus que cela ! L’une des vérités les plus époustouflantes de l’Évangile est que nos fautes ne sont pas seulement pardonnées. Nous sommes des pécheurs justifiés. C’est-à-dire que nous sommes déclarés légalement juste aux yeux de Dieu ! Nous appelons cette vérité la justification, qui peut être définie comme suit : la justification est un acte légal de Dieu qui déclare qu’un pécheur coupable est maintenant considéré comme parfaitement juste à ses yeux.
Cela est notre réalité si nous avons la foi dans le Christ, comme l’apôtre Paul l’écrivit à l’église de Rome :
Étant donc justifiés par la foi, nous avons la paix avec Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, à qui nous devons d’avoir eu par la foi accès à cette grâce, dans laquelle nous demeurons fermes, et nous nous glorifions dans l’espérance de la gloire de Dieu. (Romains 5.1-2)
Une réalité qui change tout
La réalité de notre justification aux yeux de Dieu change absolument tout pour nous ! Il n’est pas possible, avec un seul article (ou même 100 000 livres), de décrire tous ces changements, mais laissez-moi vous montrer comment une meilleure compréhension de cette réalité change drastiquement notre recherche de Dieu.
Il est écrit en 2 Corinthiens 5.21 que :
celui qui n’a point connu le péché, il l’a fait devenir péché pour nous, afin que nous devenions en lui justice de Dieu.
Laissons ces paroles pénétrées au plus profond de notre âme. Christ a été́ regardé et traité par son Père comme un pécheur coupable, afin que nous soyons regardés et traités par Lui comme des justes.
Autrement dit : tu mérites la colère, le jugement, la honte et le rejet pour ta rébellion envers Dieu, mais c’est le Christ qui a ainsi été traité à ta place. Uniquement le Christ mérite la pleine acceptation, la joie inaltérable, la paix surabondante, l’honneur et la bonté́, mais c’est maintenant toi qui es ainsi traité à cause de lui.
Comprenions bien ceci : le Seigneur Jésus-Christ n’est pas seulement mort pour nous, il a aussi vécu pour nous. Quelqu’un dira : oui, il est ressuscité pour nous. C’est vrai, mais ce n’est pas ce que je veux dire. Notre Seigneur et Sauveur n’est pas seulement mort pour expier le jugement qui nous était destiné ; il a aussi vécu une vie parfaitement juste et droite, étant parfaitement soumis au Père et à la Loi, et cela afin que sa justice soit mise à notre compte et qu’elle soit considérée par Dieu comme étant la nôtre.
Nous avons des vêtements propres
Lorsque Dieu vous regarde maintenant, vous qui êtes en Christ Jésus, il agit envers vous comme avec un homme ou une femme qui possèdent la justice parfaite de son Fils bien-aimé. Le cœur de Dieu est disposé envers vous comme envers quelqu’un qui depuis sa naissance jusqu’à sa mort à toujours parfaitement aimer Dieu de tout son cœur, de toute son âme, de toute sa force, de toute sa pensée, et cela sans jamais flancher, à l’image du Fils unique.
Il se passe quelque chose comme ce que Zacharie voit dans sa vision concertant le souverain sacrificateur Josué :
Il me fit voir Josué, le souverain sacrificateur, debout devant l’ange de l’Éternel, et Satan qui se tenait à sa droite pour l’accuser. L’Éternel dit à Satan : que l’Éternel te réprime, Satan ! que l’Éternel te réprime, lui qui a choisi Jérusalem ! N’est-ce pas là un tison arraché du feu ? Or Josué était couvert de vêtements sales, et il se tenait debout devant l’ange. L’ange, prenant la parole, dit à ceux qui étaient devant lui : ôtez-lui les vêtements sales ! Puis il dit à Josué : vois, je t’enlève ton iniquité, et je te revêts d’habits de fête. Je dis : qu’on mette sur sa tête un turban pur ! Et ils mirent un turban pur sur sa tête, et ils lui mirent des vêtements. L’ange de l’Éternel était là. (Zacharie 3.1-5)
Ceux qui sont gratuitement déclarés justes par la foi n’ont plus aucun vêtement souillé par leur iniquité. Ils s’expriment maintenant avec le prophète Ésaïe :
Je me réjouirai en l’Éternel, mon âme sera ravie d’allégresse en mon Dieu ; car il m’a revêtu des vêtements du salut, il m’a couvert du manteau de la délivrance, comme le fiancé s’orne d’un diadème, comme la fiancée se pare de ses joyaux. (Ésaïe 61.10)
Une union immuable
En Romains 5.5-10, Paul ajoute quelque chose d’absolument extraordinaire par rapport à notre justification :
Dieu prouve son amour envers nous, en ce que, lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. A plus forte raison donc, maintenant que nous sommes justifiés par son sang, serons-nous sauvés par lui de la colère. Car si, lorsque nous étions ennemis, nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils, à plus forte raison, étant réconciliés, serons-nous sauvés par sa vie.
Voyez-vous la logique de l’argument de l’apôtre ? Alors que nous étions les ennemies de Dieu, il a envoyé son Fils donner sa combien précieuse vie afin que nous soyons déclarés juste et ainsi réconcilier avec Lui. Puisque nous sommes maintenant ses enfants justifiés, ne croyez-vous pas que vous serez sans aucun doute gardés pour la vie éternelle ? Il aurait tellement de merveilleuses choses à dire là-dessus, mais une d’entre-elles est plus que claire : par le pardon et la justification, l’union que nous avons avec Dieu, par Christ, est immuable, c.-à-d. qu’elle ne changera jamais. Ceux qui sont justifiés seront à coup sûr glorifiés (Romains 8.30).
Libres d’expérimenter Dieu
J’ai mentionné plus haut que l’importance d’adresser le sujet de notre union immuable avec Dieu dès le début de notre série allait nous aider à éviter au moins deux pièges dans notre recherche de communion avec Dieu : celui du légalisme et celui de la culpabilité accablante.
Piège #1 : Le légalisme
Cela nous aide à éviter le légalisme en nous assurant hors de tout doute que la seule et unique raison que le Père nous accepte dans les parvis de son Temple et de sa présence si satisfaisante est à cause du Christ Jésus, par qui nous sommes justifiés et pardonnés de tout péché. Nous ne cherchons pas à expérimenter Dieu afin d’être sûrs d’être aimés et acceptés de lui. Nous ne faisons pas tous nos efforts pour être en communion avec lui afin d’être certains d’éviter l’enfer et d’avoir la vie éternelle.
Bien au contraire, nous recherchons la communion avec le Dieu trinitaire parce que Christ nous a déjà gratuitement donné un libre et sûr accès au trône de la grâce (Hébreux 4.16). Nous ne cherchons pas à attirer la faveur de Dieu ; le Christ nous a déjà fait trouver faveur aux yeux de Dieu.
Piège #2 : la culpabilité
De plus, bien comprendre notre union immuable avec Dieu nous aide aussi à éviter une culpabilité accablante. Je précise bien accablante, parce que toute forme de culpabilité n’est pas mauvaise en soi. Si nous péchons contre Dieu et que notre conscience nous accuse, c’est normal que nous ressentions une certaine culpabilité et cela même si nous sommes certains du pardon de nos péchés. Mais, en disant accablante, je veux préciser cette sorte de culpabilité qui est si forte qu’elle nous retient d’aller de nouveau vers le Christ. Je parle de cette culpabilité qui nous dit : « comment oses-tu croire que tu peux demander pardon à Dieu et penser le recevoir encore ? Tu as déjà demandé vingt fois pardon pour ce péché, et tu le fais encore ! »
Une bonne compréhension de l’Évangile et de notre merveilleuse justification nous garde de telles pensées. Comment ? Parce que notre justice n’est pas la nôtre. Notre justice est celle du Christ : voilà LA SEULE RAISON pour laquelle nous pouvons nous réjouir en Dieu pour l’éternité. Concrètement parlant, cela signifie que dans le meilleur de tes journées : lorsque tu as jeûner et prier pendant 12 heures ; que tu as parlé de Jésus à tout le monde et que tu as dominé toutes tentations ; et bien, assois-toi et écoute : Dieu ne t’aime pas plus. Vraiment ? Oui, vraiment. Et cela signifie que dans la pire de tes journées : lorsque tu t’es levé en retard et que tu n’as même pas eu l’opportunité de prier et de lire la Bible, lorsque tu as perdu patience avec ta femme et devant tes collègues de travail, Dieu ne t’aime pas moins. Vraiment ? Oui vraiment.
En Jésus seul
L’amour et l’acceptation de Dieu ne sont pas basés sur toi ! Elle est acquise par Christ ! Autrement dit, la seule possibilité que l’amour du Père diminue pour toi est qu’elle diminue aussi pour son Fils. C’est chose impossible.
Nous sommes donc en mesure d’expérimenter Dieu sans que cela soit motivé par une culpabilité ou par un désir insensé d’essayer d’acquérir la faveur de Dieu par nos efforts. Ce n’est pas pour ces raisons que nous ferons tous nos efforts à être discipliné dans notre utilisation des moyens de grâces. Nous ferons tous nos efforts plutôt pour trouver notre pleine satisfaction en Lui. Et cela sera le sujet du prochain article où nous méditerons le but de se discipliner à expérimenter le Seigneur.
Que Dieu vous dirige vers son Fils. Amen.
Notes :
[1] Augustine, “On Christian Doctrine” (1.5), cité dans Joel R. Beeke, Puritan Theology, version kindle. Traduction libre[2] Cité dans Joel R. Beeke, Puritan Theology, version kindle. Traduction libre. Emphase ajoutée.
[3] John Owen, La mortification du péché, p.86.