Vivre avec la dépression : un combat de tous les jours (Cara Croft)

Je prononce doucement les mots : « Je compte pour Dieu. » Ils passent lentement sur mes lèvres, tournoient autour de ma tête et atterrissent dans mes oreilles avec un bruit sourd. Ces mots, incapables de pénétrer plus loin dans mon cerveau encombré de messages contradictoires, ne se rendent jamais jusque dans mon cœur où j’ai le plus besoin de les sentir. Je me répète vainement ce que je sais être vrai, mais mes expériences de vie s’attaquent à la puissance de ces mots et refusent obstinément de les laisser s’enraciner dans mon cœur d’une manière significative.

Les mensonges

« Je ne compte pas, je suis invisible, personne ne me remarque et je suis en train de disparaître… » : ces paroles ne sortent pas de ma bouche, mais descendent au fond de ma gorge et pénètrent directement mon cœur.

Je peux me répéter ce que l’Écriture me dit, mais il semble que je sois plus encline à laisser les mensonges s’infiltrer au plus profond de mon être. Ce sont ces mots qui aspirent toute mon énergie et me font sombrer dans le trou noir de la dépression. Chaque fois que j’ouvre la Parole de Dieu, je prie pour que le feu de la vérité consume tous ces messages mensongers et illumine mon âme assombrie. Toutefois, je doute que cela se produise aujourd’hui.

Tout semble sombre

Tout semble sombre, parce que c’est sombre. C’est cela la dépression.

Elle m’appelle une fois de plus. Elle débarque à l’improviste tel un visiteur trop familier. J’aimerais bien qu’elle s’annonce à l’avance et qu’elle s’informe si elle est la bienvenue avant de se présenter à ma porte, mais elle ne le fait pas. En fait, la dépression n’a jamais été aimable et attentionnée envers moi. Elle ne m’a jamais demandé si j’étais disposée à la recevoir. Combien de temps demeurera-t-elle cette fois-ci ? Un jour, une semaine, un mois ? Et si elle décidait de ne plus jamais partir ? Chaque fois, je crains qu’elle ne se loge en moi de façon permanente, même si mon expérience me dit qu’elle finira par partir.

Essayer de gérer la dépression

Lorsque la dépression me frappe, j’essaie toujours de trouver une nouvelle façon de gérer son passage. Nous devrions aller nous promener, lui dis-je, mais elle se satisfait de rester à la maison et de regarder la télévision. Nous devrions appeler une amie et lui faire savoir que tu es en visite, mais elle préfère regarder des photos sur Instagram et suivre ses amis de loin sur Twitter. Elle préfère m’étouffer plutôt que de me laisser respirer, me garder en otage plutôt que de me libérer, me tirer plus profondément sous les couvertures du lit plutôt que de me laisser aller prendre une douche vivifiante.

Aujourd’hui, une idée me vient à l’esprit : « Et si je lui imposais des limites comme je le ferais pour toute autre relation malsaine ? Et si je décidais la manière dont elle peut se manifester et ce qu’elle peut faire ? Et si je prenais les choses en main aujourd’hui et que je ne laissais pas la dépression surgir à l’improviste ? »

La dépression ne demande pas la permission pour entrer

Je sais que certains me diraient de la chasser définitivement de ma vie et de ne pas ouvrir la porte quand elle frappe. Ce qu’ils ne comprennent pas, c’est que je n’ouvre jamais la porte et que plus j’essaie de la mettre dehors, plus elle devient forte. Elle entre par la fenêtre, par la porte de derrière ou s’infiltre à travers les murs comme un fantôme. Elle devient plus forte quand je la rejette et me rappelle que l’ignorer et prétendre qu’elle n’existe pas ne fait qu’intensifier son pouvoir.

La dépression ne me demande pas l’autorisation pour s’enraciner dans mon cœur, elle se fraie un chemin à travers les fissures et les trous de mon humanité.

C’est vrai, parfois je l’aime trop. Parfois, je suis fatiguée et épuisée, et je me réjouis de sa présence. Parfois, je la laisse me prendre en otage parce que je prie et j’espère que quelqu’un viendra me sauver de son emprise. Mais en vérité, personne ne le peut. Personne ne peut m’arracher à sa présence, et personne ne peut la chasser de chez moi. Ceux qui me soutiennent vraiment sont ceux qui m’aident à remettre la dépression à sa place, qui m’encouragent à repousser son apathie et à prendre soin de moi pour ramener un peu de vie, d’énergie et de lumière à mes périodes d’obscurité.

Dieu fait grâce

Je reconnais que la dépression fait bel et bien partie de ma vie. Je la remercie de me rendre visite et de me rappeler mon humanité. Je l’invite à venir lire la Parole de Dieu, à rendre visite à mes amis, à respirer l’air frais et à prendre du soleil. Je l’invite à se doucher et à se laver avec moi, même si c’est la seule chose que nous arrivons à faire dans notre journée. Je lui demande de prendre un repas avec moi, de sentir la nourriture, de nourrir les parties affamées de mon âme. Je me rappelle que Dieu me fait grâce. Il sait que je ne peux pas accomplir autant de choses lorsqu’elle me rend visite.

Dieu me rappelle qu’il connaît bien le visiteur qui se trouve dans ma maison et qu’il ne me méprise pas pour cela.

Peu à peu, je me relève et je commence à faire les choses qui me semblent trop difficiles. Éventuellement, elle finira par se lasser et elle partira. Elle reviendra certainement me rendre visite. Cependant, chaque fois, j’apprends un peu mieux à tolérer les périodes où elle est présente, à lutter contre ses mensonges avec la vérité de Dieu et à me reposer davantage sur la grâce divine que sur mon humanité.