Cet article fait partie de la série : « Desiring God sur la famille ».
Trois façons de restaurer le foyer chrétien
La pandémie de Covid-19 a bouleversé la vie de la plupart des pays du monde. Les gens sont confrontés à des défis de taille lorsqu’il s’agit de savoir comment continuer à travailler, comment continuer à participer à leurs églises, et même comment bien gérer leur vie de famille.
Avant la pandémie, il était courant d’entendre parler de la nécessité de restaurer la vie familiale. La famille américaine typique ne passait que quelques heures éphémères ensemble, généralement pour se préparer ou se reposer des activités qui occupaient la majorité de son temps, que ce soit à l’école ou au travail. La « maison » était une piste d’atterrissage. Un endroit où se reposer entre des services essentiels. Mais aujourd’hui, les familles ont été forcées de se regrouper, et la société dans son ensemble a été invitée à « rentrer à la maison ». Mais sait-on ce qu’il faut faire une fois qu’on y est ?
La raison pour laquelle les gens ne savent pas quoi faire à la maison est fondamentalement la même raison pour laquelle la vie de famille semble peu attrayante pour beaucoup. C’est la même raison pour laquelle les gens se marient plus tard, ont moins d’enfants et sont plus susceptibles de divorcer. Il ne s’agit pas seulement de péchés personnels ou de négligence, bien que ceux-ci aient leur place. La réalité la plus importante est que la structure sociale du monde moderne est construite de cette façon, construite contre les familles. Face à tout cela, il n’est pas étonnant que les familles se déchirent et se brisent et que les jeunes hésitent à fonder leur propre famille. La famille est une cheville carrée dans le trou rond du monde.
Mais maintenant, nous sommes là, tous à la maison. Une pandémie mondiale pourrait-elle être l’occasion rêvée pour les chrétiens de s’atteler sérieusement à la restauration de leur foyer ?
Restaurer un foyer chrétien ?
Dès que nous tentons d’aborder cette question de manière un tant soit peu détaillée, nous sommes confrontés à un certain nombre de réactions viscérales : « Voulez-vous dire que tous les chrétiens doivent se marier ? N’essayez-vous pas simplement de ramener les années 50 ? C’est un style de vie légaliste ! » Et beaucoup de gens en auront aussi simplement marre de leur expérience de foyer forcé et seront prêts à revenir à la normale. Il convient donc de faire quelques distinctions.
Cette question n’est pas une question de salut, à proprement parler. L’homme est justifié par la foi seule, et cette foi est elle-même un don miraculeux de l’Esprit, dont le mouvement est semblable à celui du vent (Jean 3.8). Il n’existe aucune technique permettant de maîtriser cette grâce salvatrice, et les chrétiens sont appelés à être fidèles à Christ dans toutes sortes d’épreuves, de tribulations et de normes sociales peu idéales.
Il est également vrai que tous les chrétiens ne sont pas appelés au mariage. Le christianisme n’a jamais dit que le mariage était une exigence pour tous les croyants, et il a en effet réservé une place d’honneur à ceux qui sont appelés au célibat afin d’aider de façon unique à l’implantation d’églises et à l’évangélisation du monde (1 Corinthiens 7.38).
Cela dit, nous ne devrions avoir aucune difficulté à affirmer que les situations et les appels exceptionnels sont exceptionnels. Par définition, ils ne constituent pas la norme. La Bible est très claire sur le fait que le mariage est la vocation ordinaire des humains. « Il n’est pas bon que l’homme soit seul » (Genèse 2.18). « Dieu donne un foyer à ceux qui sont solitaires » (Psaume 68.7).
La famille comme vocation ordinaire
Les Écritures utilisent constamment le mariage et la procréation comme symbole de bénédiction (Psaume 113.9 ; 128.3-4). L’Ancien Testament commence par l’image archétypale de l’humanité en tant qu’homme et femme. Le Nouveau Testament se termine par un banquet de noces symbolique. Ainsi, si le mariage et la famille ne sont pas des caractéristiques essentielles du salut chrétien, ils sont les caractéristiques ordinaires de l’anthropologie créationnelle et les éléments sanctifiés de la communauté chrétienne.
Plus encore, la Bible désigne la famille comme la première école de formation spirituelle. Le Deutéronome 6.7-8 demande aux parents de faire des choses de Dieu le sujet ordinaire de la conversation et de la vie quotidienne. Éphésiens 6.1-4 demande aux parents et aux enfants d’entretenir des relations les uns avec les autres « dans le Seigneur », avec l’obéissance et la formation appropriées à la condition de chacun. Ainsi, bien qu’il ne soit pas vrai que les parents chrétiens puissent contrôler la destinée spirituelle de leurs enfants, ils restent des instruments que Dieu utilise pour la formation ordinaire des disciples.
Les chrétiens ont raison de considérer le mariage et la famille comme une vocation ordinaire. Il est bon pour les chrétiens de promouvoir la famille. Et il est approprié pour les pasteurs et les enseignants d’aborder les défis contemporains de la famille et de proposer des outils et des concepts pour surmonter ces défis et aider la famille à s’épanouir. Donc oui, les chrétiens doivent restaurer le foyer, et ce faisant, en tant que chrétiens, ils doivent faire du foyer chrétien un centre de productivité pour le corps et l’âme. Et à l’époque de ce virus, ils disposent d’une opportunité naturelle. Comment peuvent-ils s’y mettre ?
1. Faites votre maison
Cette première étape peut sembler un peu trop évidente, mais moins d’Américains se marient que dans les générations précédentes, et ceux qui se marient se marient plus tard dans la vie. En particulier dans les zones métropolitaines, les jeunes adultes repoussent le mariage en raison de contraintes culturelles et économiques.
Cela conduit à des problèmes moraux prévisibles. Après tout, le Grand Catéchisme de Westminster inclut le « report excessif du mariage » dans sa liste des péchés interdits par le septième commandement (voir question 139). Viennent ensuite les problèmes sociaux systémiques. Des mariages moins nombreux et plus tardifs entraînent moins de naissances. La procréation est souvent considérée comme un fardeau plutôt que comme une bénédiction, et toute grossesse après 35 ans est considérée comme « à haut risque ». Les taux de natalité sont en baisse dans tous les pays développés, y compris aux États-Unis. Rétrospectivement, la « normalité » semble plutôt bizarre.
Si les jeunes se contentent de suivre les tendances et les pressions culturelles, ils seront souvent découragés de se marier et on leur dira que le parcours ordinaire vers le mariage est peu attrayant et peu gratifiant. Les responsables de l’Église devront donc encourager activement le mariage.
Nous pouvons le faire en enseignant la valeur et la vertu du mariage. Dieu a donné un mandat fondamental à toute la race humaine : « Reproduisez-vous, devenez nombreux, remplissez la terre et soumettez-la ! » (Genèse 1.28). L’épître aux Hébreux dit : « Que le mariage soit honoré de tous » (Hébreux 13.4). La plupart des chrétiens devraient vouloir se marier, et ils devraient faire du mariage une pierre angulaire plutôt qu’une pierre de touche de leur vie d’adulte.
Mais au-delà de la simple louange du mariage et de la famille, nous devons également recadrer la façon dont la famille « s’intègre » dans notre vie. Nous devons unir le concept de famille au concept de foyer. Le foyer n’est pas simplement l’endroit où la famille dort et se recharge pour son travail réel « à l’extérieur ». Le foyer devrait plutôt être le centre du travail de la famille, un centre d’activité productive et de culture sociale. Un foyer productif sera un correctif utile contre le foyer solitaire et isolé que beaucoup connaissent actuellement, et il sera un correctif à l’expérience de la fièvre de la cabane, où l’on a l’impression d’être coincé à la maison plutôt que de vivre vraiment sa vie.
2. Rendez votre maison productive
Qu’est-ce que cela signifie de rendre son foyer productif ? Allan C. Carlson a écrit un certain nombre de livres sur la famille. L’un de ses plus importants est From Cottage to Work Station : The Family’s Search for Social Harmony in the Industrial Age (trad. Du foyer au bureau : La recherche de l’harmonie sociale par la famille à l’ère industrielle). Carlson explique comment la révolution industrielle a modifié le rôle ordinaire du foyer. Au lieu de travailler et de vivre essentiellement au même endroit, aux côtés des mêmes personnes, beaucoup ont commencé à quitter leur maison pour se rendre à leur travail.
Au fil du temps, le foyer s’est vidé de presque toutes ses activités significatives. Le foyer est devenu de moins en moins important pour la productivité sociale. Finalement, la famille a subi le même sort.
Dans le même ordre d’idées, l’ouvrage d’Andy Crouch, The Tech-Wise Family (trad. La famille branchée), soutient qu’une grande partie de ce que nous appelons «technologie» ne nous aide pas vraiment à devenir plus productifs au travail, mais fait plutôt notre travail à notre place et nous convainc de consacrer notre nouveau temps libre à des activités plus passives et consommatrices. Tout en prétendant nous aider à devenir plus efficaces, ce type de technologie nous entraîne en fait à faire peu ou rien du tout, et quoi que nous fassions avec cette technologie, nous avons tendance à le faire par nous-mêmes, loin des autres. Nous consommons, et nous consommons seuls.
Carlson et Crouch donnent tous deux le même conseil pour lutter contre ces problèmes. Nous devons, selon eux, transformer nos foyers en centres de productivité. Nous devons nous approprier nos outils et notre technologie, et nous devons faire des choses qui comptent avec nos familles. Nous avons besoin de foyers productifs.
La mise en œuvre de cette vision sera différente selon les familles. Voici quelques suggestions à prendre en compte.
Le travail
L’un des effets sociaux les plus courants de la pandémie a été le travail à domicile. Ce n’est pas le cas de tout le monde, mais beaucoup plus de personnes ont pu y recourir, même si c’est de manière restreinte et limitée, que nous aurions pu le penser. On peut se demander combien de personnes retourneront « au bureau » et combien resteront simplement à la maison une fois les mesures de confinement terminées. En effet, certaines personnes pourraient perdre complètement leur emploi et devoir recommencer à zéro, avec de nouvelles visions et de nouvelles orientations.
Même s’il n’est pas possible pour tout le monde et qu’il n’est pas exempt de difficultés, le travail à domicile présente un avantage évident : il unit le travail et la maison de la manière la plus élémentaire. Lorsque vous travaillez à domicile, vous poursuivez littéralement votre vocation au sein et autour de votre famille et de votre lieu de vie. Et les méthodes de travail à domicile peuvent varier. Elles peuvent aller de la vieille ferme familiale à la rédaction en free-lance, en passant par le télétravail en ligne et les appels sur Zoom.
L’école
Les options en matière d’éducation ont évolué de la même manière, et l’effet de ces journées persistera probablement longtemps après la réouverture de l’économie américaine. De nombreuses écoles choisiront de ne pas retourner sur les campus pendant un certain temps. Beaucoup ne survivront pas à l’impact des changements et fermeront tout simplement pour de bon. Cela nécessitera de nouvelles méthodes d’enseignement, et là encore, nous avons une opportunité.
L’enseignement à domicile est manifestement la nouvelle norme. Même les élèves des écoles publiques font l’école à la maison en ce moment. Mais nous devons faire attention à ce fait. L’école en crise n’est pas la même chose que l’école à la maison. Une expérience typique d’école à la maison commence des mois avant le début de l’année scolaire, lorsque les parents planifient à l’avance un programme et une routine. La plupart des enfants scolarisés à la maison n’y restent normalement pas tout le temps, et beaucoup rencontrent d’autres familles et groupes pour des classes choisies et des activités parascolaires. L’enseignement dû au Covid-19 n’est normal pour personne.
Mais l’expérience forcée de l’enseignement à domicile peut donner à certaines familles le goût d’être ensemble plus souvent pendant la semaine, et elles peuvent être surprises de voir à quel point elles aiment cela, une fois le choc passé. En effet, l’enseignement à domicile est un moyen important de créer un foyer productif, car il unit les parents et les enfants dans la culture de l’esprit et des vertus.
Lorsque les options de scolarisation sur le campus reviendront, les familles chrétiennes ne devront pas se précipiter pour revenir à la normale. Elles doivent conserver les principes clefs de la productivité à domicile. Les écoles chrétiennes peuvent être une bonne option à cet égard si elles peuvent resserrer leurs liens avec la communauté locale et les familles qui les fréquentent. La participation des parents doit être encouragée, notamment dans les activités extrascolaires, les sports et la culture récréative de l’école.
Les modèles d’écoles hybrides, qui combinent des éléments de l’enseignement à domicile et de la scolarité classique à l’extérieur, sont peut-être les plus intrigants. Ils permettent aux élèves de travailler à la maison une partie de la semaine et de fréquenter une école avec des enseignants et des administrateurs professionnels le reste de la semaine. Les frais de scolarité sont généralement inférieurs à ceux des écoles privées normales, et la famille est profondément intégrée à l’expérience scolaire. Cette option pourrait se développer dans le paysage éducatif post-pandémique.
Les repas et les loisirs
Nombreux sont ceux qui ne seront pas en mesure de restructurer leur emploi ou leur scolarité de manière aussi radicale. Et même si nous sommes tous à la maison, le simple fait d’être là ne fera pas tout le travail nécessaire. Il existe encore des activités de base importantes qui peuvent rendre le foyer plus productif. Commencez simplement : mangez à la maison. On nous oblige à le faire maintenant, mais c’est en fait une excellente pratique à conserver après la fin de la pandémie. Manger à la maison est économiquement avantageux et généralement plus sain. Apprenez à cuisiner, investissez dans les éléments de base d’une cuisine et mangez en famille autour d’une table.
Et ne mangez pas seulement avec votre famille. Lorsque nous en avons à nouveau l’occasion, étendez l’hospitalité chrétienne en festoyant avec d’autres. Invitez des amis, des membres de l’église, et même des membres de votre voisinage à venir manger chez vous. Avant longtemps, votre maison sera un centre bourdonnant de la société humaine, et cela donne aux chrétiens une excellente occasion de faire preuve d’hospitalité.
D’autres activités productives ordinaires sont le jardinage, la construction, l’artisanat, l’art et la musique. Faire revivre la pratique du chant populaire est un excellent moyen d’apporter une activité amusante à votre famille. Les jeunes enfants aiment particulièrement chanter, car cela leur permet de faire un peu de bruit. Si les membres de votre famille peuvent apprendre quelques instruments pour assister le chant, vous avez ajouté une couche supplémentaire de productivité. Lorsque les parents prennent plaisir à faire de la musique avec leurs enfants, ils transmettent également certaines de leurs passions à leurs enfants.
3. Faites de votre maison un lieu favorable à l’Église
Les routines mentionnées ci-dessus ne produiront pas à elles seules des résultats chrétiens. Des grâces typiquement chrétiennes doivent être ajoutées à la routine de la famille, ce qui signifie qu’il faut toujours donner la priorité aux choses spirituelles. Cela commence par l’Église. Mais alors que l’on pourrait s’attendre à ce qu’un article comme celui-ci préconise des églises favorables aux familles, la réalité est que nous avons besoin de familles favorables aux églises.
Cela signifie plusieurs choses. La première et la plus fondamentale est que les chrétiens doivent effectivement aller à l’Église. Ils doivent appliquer le quatrième commandement chaque semaine et ils ne doivent pas « abandonn[er] [leur] assemblée » (Hébreux 10.25). Une famille chrétienne qui ne va pas à l’Église est une contradiction en soi. Beaucoup d’entre nous font actuellement l’expérience de l’Église numérique, et cette expérience nous a donné le désir ardent de retourner une fois de plus à l’assemblée réunie. « Mon âme soupire et même languit après les parvis de l’Éternel » (Psaume 84.2).
Le culte familial
Mais les familles chrétiennes n’exercent pas leur spiritualité uniquement à l’Église. Elles doivent aussi avoir un culte familial régulier. Les chrétiens devraient passer des moments religieux intentionnels et ciblés à la maison avec leur famille (Deutéronome 6.7-9). De plus, dans l’Ancien Testament, Dieu commandait aux prêtres des sacrifices quotidiens (Exode 29.38 ; Nombres 28.3). À l’aube de la nouvelle alliance, tous les croyants sont des prêtres, et il nous est donc commandé d’offrir le sacrifice de louange par nos lèvres (Hébreux 13.15).
Il est ordonné aux croyants d’être « toujours joyeux » et de « prie[r] sans cesse » (1 Thessaloniciens 5.16-17), et même de s’adresser les uns aux autres avec « des psaumes, des hymnes et des cantiques spirituels ; chantez et célébrez de tout votre cœur les louanges du Seigneur » (Éphésiens 5.19). Le culte familial est également un moment naturel pour un père de famille pour enseigner les choses spirituelles à sa famille de manière approfondie. En faire une routine régulière est le moyen le plus simple de s’assurer que cela se produise, et intégrer le temps de culte familial dans le rythme ordinaire de votre journée est un excellent moyen d’exercer une autorité spirituelle sur votre emploi du temps. C’est une forme de consécration de votre temps.
Par où commencer
Le culte familial n’a pas besoin d’être compliqué, et il ne doit pas être considéré comme une corvée. Les parents doivent donner l’exemple de la vraie foi et de la piété vivante lorsqu’ils pratiquent le culte à la maison, et ils doivent chercher à mettre l’accent sur la lecture de l’Écriture, le chant des louanges de Dieu et les moments de prière.
Lorsque les enfants sont jeunes, ce temps doit être relativement court. Cinq minutes, c’est long pour les tout-petits. Au fur et à mesure que les enfants vieillissent, les choses peuvent être prolongées, mais l’avantage du culte familial quotidien est de savoir que vous aurez une autre occasion demain. Vous n’êtes pas obligé de tout caser à chaque fois. Et n’oubliez pas que le culte de famille ne vise pas d’abord et avant tout votre famille et ses différents besoins. Le culte de famille vise à ce que votre famille adore Dieu. Il faut donc que cela reste l’objectif principal. Glorifiez Dieu en trouvant votre bonheur en lui ensemble.
Dans tout cela, la famille chrétienne apprendra à simplement être une famille chrétienne. Comme tous les membres en viennent à croire réellement ce qu’ils disent et entendent, le foyer sera caractérisé par une odeur constante de Christ. Les parents apprendront à leurs enfants à croire et à ne pas douter, et toute la famille organisera ses affaires à la gloire de Dieu. Ceci ne devrait pas être une mesure temporaire pendant les périodes d’urgence, mais une vision durable de la vie chrétienne, pour reconquérir le foyer, édifier le foyer et consacrer le foyer à notre maître, Jésus Christ.
Cet article est une traduction de l’article anglais « Your Family Is the Frontlines » du ministère Desiring God par Timothée Davi.
